"> - Indiepoprock

A la rentrée, le groupe slovène Laibach nous avait surpris, et son public avec, en sortant un album à contre courant de sa discographie. En compagnie de leurs compatriotes de Silence, ils proposaient en effet, loin de la techno-indus à laquelle ils nous avaient habitués récemment, une relecture d’hymnes de 13 pays, poursuivant ainsi cette réflexion entre musique pop et propagande. Leur passage annoncé sur notre territoire entraînait déjà de nombreuses interrogations car de nombreux fans étaient restés relativement dubitatifs face à ce "Volk" pourtant très réussi (lire la chronique). 

C’est malgré tout une foule nombreuse qui se presse en ce dimanche aux abords de la Locomotive, haut lieu de la culture gothique et industrielle parisienne. Public hétérogène et hétéroclite, entre uniformes militaires, vêtements noirs, métalleux, crânes rasés et finalement une grande majorité qui n’affiche aucun signe d’une quelconque appartenance à un groupe identifiable. Ouverture des portes à 21h00 et tout ce petit monde attend patiemment sur fond de mix fort à propos. Changement de lumières et l’atmosphère rapidement se transforme à l’écoute de chants digne d’une kermesse totalitaire de l’entre-deux-guerres. La tension est palpable, le public commence à trépigner… beaucoup moins passé le huitième, l’impatience se fait entendre. C’est alors que résonne la Marseillaise reprise par une partie de l’audience et le spectacle commence enfin après plus d’une heure d’attente.

Laibach lance la machine, Germania, America, Anglia… on se rend rapidement compte que le groupe déroule l’album, sans sourciller. Milan Fras mène la danse de sa diction grave et charismatique. Une partie du groupe est là, les membres de Silence et une charmante chanteuse enturbannée d’or et d’ébène pour assurer toutes les parties chantées. Pour chacun des hymnes ainsi retravaillés, des vidéos viennent soutenir les messages envoyés à chaque pays. Extraction de pétrole pour les Etats-Unis, extrait du clip malsain d’Anglia, moment d’émotion pour la France sur fond de guillotines et d’émeutes, ou réunion en une même entité et une même bannière d’Israël et de la Palestine. Malgré tout on repère quelques bras tendus (le premier est d’ailleurs lancé par un… chevelu) nous rappellent que Laibach pratique un jeu dangereux, que certains ne peuvent malheureusement s’empêcher de prendre au premier degré, ou ne cherchent pas une seule seconde à s’intéresser à la démarche artistique et politique, la réflexion et, par-là même, la dénonciation de ce que ces déviants adulent. 

Le tout est carré mais peine peut-être un peu à nous transporter car trop fidèle à "Volk" dont le logo vient détourner, chaque fois que la chose est possible les étendards de chaque nation. Le groupe quitte la scène au bout de ¾ d’heure et laisse place à un petit message de propagande  invitant à rejoindre la république virtuelle et universelle du Neue Slowenische Kunst (Nouvel Art Slovène) dont il existe d’ailleurs un vrai passeport… Mais c’est pour mieux revenir au grand complet, deux choristes féminines prenant alors place à chaque extrémité devant tambour et cymbales. Elles captent alors le regard du public dans leur chorégraphie de bras et de baguettes, martiales. Laibach nous assène ce pourquoi le public est venu, une techno-indus massive essentiellement tirée de "WAT" et qui a de quoi faire marcher au pas, danser et conquérir la planète. La fosse s’anime et applaudira longuement le long du générique de fin qui défile sur les deux écrans, alors que la sono laisse s’échapper un medley des meilleures reprises du groupe, des Beatles… à Europe. 

Malgré un découpage un peu trop radical entre ce que l’on a vecu comme deux spectacles distincts, Laibach séduit et réjouit par son univers très attractif mais grinçant comme du sable entre les dents… A ne pas mettre entre toutes les mains, ni toutes les oreilles !!!

Chroniqueur
  • Publication 370 vues26 novembre 2006
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