L'empire de la soul(e)
Rythm’n’blues et soul, peu de styles auront été aussi galvaudés que ceux-ci. Ses héros (grand public) tels que Ray Charles, Stevie Wonder ou encore Marvin Gaye, ont bien souvent été au mieux singés. C’est dans ce traquenard que tente de surnager l’album qui nous occupe avec plus ou moins de réussite.
C’est par un titre éponyme que démarre « Sound And Color ». Un titre à la voix haut perchée, très haut, dont les chœurs semblent s’être échappés d’un vieux studio décrépi de la Motown, attendant trop longtemps le retour d’Al Green au micro. Le titre tente tout de même quelques facéties, comme ces instrumentaux à contre courant, tout en légèreté, froid comme de la cold wave. La rencontre des deux mondes fonctionne, même si à la longue la lenteur devient pesanteur… Second de la liste, Don’t Wanna Fight ne manquera pas de ravir bon nombre d’adeptes du « Random Access Memories » des Daft Punk par sa funk très old school. Par Dunes, troisième de cordée, le groupe se rapproche de sonorités qui l’a fait se faire produire un temps par Jack White, chantre du vintage, avec un rock très « Alabama » (entre Creedence Clearwater Revival et Buffalo Springfield).
Future People vient sauver un peu ce qui, sans être désagréable manque tout de même d’allant, avec une composition tout en rupture rythmique, entre funk, rock’n’roll tutti fruttiesque et envolées pop viriles, un vrai bel exercice d’équilibre parfaitement exécuté. On pourra reprocher peut-être à ce morceau de manquer de souffle sur la fin, et pour un amateur peu studieux de soul, l’ensemble des titres souffrent d’ailleurs de ce défaut.
La suite ressemble à ce qui précède, un culte avoué aux fantômes des 70’s, afro-américains de préférence. Par moments, orgues et arrangements particulièrement originaux sortent les compositions du carcan quelque peu cliché. Quelques superbes trouvailles rythmiques sont à noter comme le final de Guess Who et son enchevêtrement de chœurs magnifiés par une orchestration bien sentie. On aura par contre bien du mal à défendre l’anachronisme total qu’est The Greatest, une sorte de reprise des Strokes interprétée par un gentil garçon, belle voix, mais trop gentil.
Voilà donc ce qu’est « Sound and Color » un album que l’on ne peut vraiment décrier, mais dont on met au défi quiconque d’en faire son disque de chevet pour plus d’une poignée de jours. A moins d’être réfractaire à la soul on imagine mal un dégoût total, mais seuls des inconditionnels y trouveront vraiment de la matière.
S’il ne devait en rester qu’un titre : Future People.
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- Publication 698 vues8 juin 2015
- Tags Alabama ShakesRough Trade
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