Nouvel album avec une vraie diffusion pour un collectif à part.
Des artistes soucieux de décloisonner pop et musique classique, on en connaît, il suffit de penser à Sarah Neufeld ou aux albums de Clogs par exemple. David Moore, la tête pensante de Bing & Ruth, a lui créé ce collectif il y a déjà plus de dix ans précisément pour atteindre un public plus large que celui qui s’intéresse au « classique contemporain », si on ose dire. Après deux albums parus en catimini, « No Home Of The Mind » offre enfin à Moore et ses acolytes la possibilité d’atteindre cet objectif. D’abord grâce à un certain luxe de moyens dont ils ont disposé cette fois-ci, sachant que David Moore, pianiste de formation, a justement pu enregistrer sur pas moins de dix-sept pianos différents, lors de diverses sessions d’enregistrement entre l’Amérique du nord et l’Europe.
David Moore ne fait pas non plus mystère de sa sensibilité cinématographique et Starwood Choker, magnifique entrée en matière de cet album, s’agrémente d’une vidéo en prolongement parfait de la musique. Ainsi, aux accords à la fois virevoltants et troublants de piano répondent de superbes images poétiques et légèrement inquiétantes d’une forêt entre chien et loup, avec toutes les beautés et les mystères qu’elle peut receler.
Après cette entrée en matière, un des défis de l’album consiste à ne pas faire paraître la suite comme de simples variations de ce premier morceau. Mais l’exigence s’applique également à l’auditeur, sachant que, si la volonté de Moore est de sortir le classique de son carcan, sa musique ne peut être taxée de légère ou facile d’accès. Plusieurs écoutes patientes sont donc nécessaires pour apprécier « No Home Of The mind » dans sa globalité. As Much As Possible, en contrepoint de Starwood Choker, prend alors des vertus apaisantes, une douce torpeur baigne l’ensemble du morceau. Puis le climat se tend de nouveau imperceptiblement sur Scrapes et on reste dans cet entre-deux instable jusque sur The How Of It Sped, second sommet de l’album qui nous envoûte avec sa phrase mélodique d’une beauté en clair obscur reprise en boucle pour un effet saisissant.
La seconde moitié de l’album débute par un long drone intrigant puis le piano s’affole de nouveau sur Form Takes, les morceaux sont encore plus évanescents mais on est désormais complètement dans l’album et on capte instantanément le son différent, moins métallique, plus chaleureux de l’instrument sur Flat Line/Peak Colour qui donne au morceau une teinte presque romantique pour un nouveau sommet de beauté. Le voyage se termine enfin par What Ash It Flow Up, tour à tour délicat, hésitant, dissonant… « No Home Of The Mind » n’est définitivement pas de l’easy listening, mais David Moore et sa bande offrent une oeuvre qui mobilise les sens, nous demande de ne pas être passifs face à elle. Comment s’y refuser ?
- Publication 1 093 vues17 février 2017
- Tags Bing & Ruth4AD
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