Comme tout artiste à forte personnalité du paysage musical, Björk a toujours eu ses admirateurs fervents et ses détracteurs. Toutefois, il faut bien reconnaître que, récemment, ces derniers ont eu du grain à moudre : un album, "Volta", plutôt décevant, sur lequel l’islandaise ne faisait guère plus que recycler ses vieux schémas avec une inspiration […]
Sur la forme, justement, "Biophilia" est un album qui n’offre rien de véritablement neuf : Björk pose sa voix sur des morceaux où arrangements électro s’imbriquent avec instruments organiques, harpe, cuivres, et on retrouve meme Leila, dont on n’avait plus de nouvelles depuis une bonne dizaine d’années, au casting des "ingénieurs de l’ombre". Une fois tout cela dit, "Biophilia" n’en reste pas moins un bel album. D’abord parce qu’il faut se faire une raison et accepter qu’en termes d’innovations, Björk a atteint le bout de sa quête. Elle a trituré l’électro dans tous les sens, l’a dépouillée, en a fait de même avec sa voix, et désormais, il n’est guère possible d’aller plus loin. Ensuite, contrairement à "Volta", qui ressemblait surtout à un album "prétexte" à partir en tournée, avec titres incendiaires et défouloirs, "Biophilia" est un disque intimiste, recueilli. Certes, cela ne garantit pas sa qualité, mais c’est tout simplement un album fait pour lui-même, qui découle d’une véritable volonté d’écriture et de composition. Enfin, il faut voir cet album sous l’angle du temps qui passe. Ca peut faire mal de se dire qu’on s’est intéressé à Björk à la sortie de son premier album et que, depuis, près de vingt ans ont passé, mais rien ne sert de cultiver la nostalgie. "Biophilia" doit donc être vu comme une oeuvre sur laquelle Björk fait ce qu’elle sait faire, avec un talent intact.
On n’a jamais fait le reproche à des artistes folk d’enchaîner des albums avec guitare sèche et voix rocailleuse. Pour Björk, voix céleste limpide et arrangements sophistiqués en sont peu ou prou l’équivalent. Certes, un morceau comme Hollow, condensé de musique classique contemporaine avec ses notes d’orgue répétitives peut un tantinet agacer, et encore… Mais des pièces comme Moon, Cosmogony ou Virus, sont des écrins soignés, parfaitement interprétés et ne peuvent laisser indifférents. Des titres tels Crystalline, Sacrifice ou Mutual core représentent de beaux équilibres entre mélodies rapidement identifiables et exigence d’écriture, et les déflagrations de beats drum’n’bass qui viennent secouer ces titres sont des secousses tectoniques qui évitent à l’album de sombrer dans la torpeur et, accessoirement, nous rappellent que les racines de Björk sont sur une terre volcanique. Or, les racines, quand on veut créer un album personnel, fort, ça compte. Bien sûr, "Biophilia" ne bouleversera rien : ceux qui aiment Björk sont plus susceptibles de s’y retrouver que ceux qui sont hermétiques a son style. Mais, là encore, il n’est pas certain que le débat entre pro et anti soit encore d’actualité. Contentons-nous du fait que des artistes exigents aient encore envie de sortir des disques forts, sans lassitude ni cynisme. C’est essentiel.
- Publication 830 vues20 novembre 2011
- Tags BjörkOne Little Indian
- Partagez cet article
Tracklist
- Moon
- Thunderbolt
- Crystalline
- Cosmogony
- Dark Matter
- Hollow
- Virus
- Sacrifice
- Mutual Core
- Solstice
- Hollow - 7 Minute Version
- Dark Matter - With Choir & Organ
- Nattura