Brazos

"Loin d'être qualifiée de formation à l'univers ultra singulier, le trio texan Brazos vogue pourtant sur les traces d'un folk/pop délectable, affûté en un rafraîchissant recueil orné d'un exotisme mélodique proche de la quintessence . . . "

« La vie est un long fleuve tranquille ». Difficile de ne pas adhérer à cette sentence après avoir dégusté les neuf pistes de « Saltwater ». De fleuve justement, The Brazos est en réalité le plus important cours d’eau de l’état du Texas, parcourant ses terres sur plus de deux mille kilomètres de long. Ça c’était pour la petite histoire. Brazos, c’est aussi mais surtout un projet musical initié par Martin McNulty Crane, longiligne descendant d’un célèbre politicien américain du même patronyme, accompagné de Spencer Zahn (basse, claviers) & Ian Chang (batterie), tous trois originaires de la ville d’Austin, capitale du . . . Texas. Ça ne s’invente pas. Les interactions entre le groupe et ses origines génétiques semblent donc massives, inutile d’en étaler davantage.

Après un premier album auto-produit paru en 2009 (« Phosphorescent Blues »), le trio signe avec « Saltwater » sa seconde production, la première sous l’égide du label Dead Oceans. Loin d’être qualifiée de formation à l’univers ultra singulier, Brazos vogue pourtant sur les traces d’un folk/pop délectable, affûté en un rafraîchissant recueil orné d’un exotisme mélodique proche de la quintessence. Si la plupart des compositions se révèlent être érigées dans la plus simple instrumentation, ses atouts conviviaux et la performance vocale délicieusement familière de son leader décernent à ces fresques un caractère aussi chaleureux que coloré (How The Ranks Was Won, One Note Pillow, Irene). Un sentiment renforcé à la lumière d’agréments savamment dispersés, qu’ils s’inspirent de rythmiques bossa nova (Valencia) ou d’autres courants émanant du reste du continent américain (l’inaugural Always On, Saltwater). Des touches dépaysantes parcimonieusement illustrées, symboles d’une indéniable légèreté livrée en forme d’offrande audacieuse et subtile, et qui se distingue quelque peu des clichés monotones du traditionnel pop/rock occidental. Ce qui n’empêche pas au trio texan d’aligner un morceau phare beaucoup plus conventionnel (Charm) mais exécuté avec brio, ainsi que son lot réglementaire de ballades larmoyantes (Deeper Feelings, Long Shot), deux morceaux somme toute anecdotiques.

On retiendra surtout de cet album sa capacité à s’aventurer hors des sentiers battus grâce à ses teintes latinisantes, distillées tout en retenue et intelligemment maîtrisées, sans pour autant omettre la teneur populaire de ses racines folk et rock. Pas une révolution en soi, mais l’homogène « Saltwater » dispose d’attraits suffisants pour être apprécié à sa juste valeur. Un complément idéal pour profiter sereinement des beaux jours.