Ce qui avait séduit avec l’or de "Lungs", à savoir exaltation et emphase, peut-il se transformer en vil plomb (grandiloquence, maniérisme) sur le deuxième album de Florence and The Machine ? C’est presque un cas d’école qui nous est offert avec "Ceremonials". Prenez une artiste très typée, un premier disque sur lequel les lauriers sont tressés et […]
Ce qui avait séduit avec l’or de "Lungs", à savoir exaltation et emphase, peut-il se transformer en vil plomb (grandiloquence, maniérisme) sur le deuxième album de Florence and The Machine ? C’est presque un cas d’école qui nous est offert avec "Ceremonials". Prenez une artiste très typée, un premier disque sur lequel les lauriers sont tressés et attendez-vous à ce qu’elle soit attendue au tournant de sa deuxième production. Le choix a été celui d’entériner presque ce qui est la marque de fabrique de la chanteuse, cet amalgame bigarré mais subtil de folklore anglo-saxon, de pop d’aujourd’hui, de rock et de soul.
Plutôt que de privilégier l’instantanéité des compositions qui donnait son charme à "Lungs", le groupe a choisi, au contraire, d’enfoncer encore plus le cérémonial (comme l’indique le titre du disque) de son inspiration en lui infligeant un véritable amoncellement d’orchestrations débridées comme pour prêter flanc aux accusations d’excès qui fleuraient déjà au sortir du premier album. Only If For A Night va ainsi servir d’ouverture pompeuse comme pour fournir le diapason sur lequel tous les titres vont s’aligner. Le single extrait de l’album, Shake It Out, en revêt presque une valeur emblématique dans la manière dont le staccato des percussions cumulé à la voix de de Florence Welch, qui atteint presque le registre de la sirène, se fond ou s’affontre à un incroyable embrouillaminis de sons où nappes claviers et couches de guitares semblent vouloir tous concourir pour le titre de qui sera le le premier à atteindre les hauteurs.
Le « la » est dit, ou plutôt la Messe puisqu’il faut presque entendre tout ce qu’un tel titre donné à un album peut avoir comme connotation religieuse. Bien sûr celle-ci n’est pas orthodoxe et une composition comme What The Water Gave Me est bien proche d’évoquer une transe païenne par son amalgame judicieux entre guitares et harpes lui donnant une tonalité improbable et étrange jusqu’à l’explosion finale. On retrouve cette même violence de harpes frappées sur Spectrum et on peut également imaginer vers quoi la chanteuse pourrait aller si on considère cette déroutante rencontre entre paganisme africain et choeurs d’un opéra décavé et semblable au « Bâteau Ivre »). Mais puisqu’il est question de cérémonie (et donc d’un certain rituel), le groupe ne va pas se contenter de gorger ses orchestrations jusqu’à plus soif. Comme dans tout cheminement, il est des pauses et Florence Welch sait faire percevoir vulnérabilité sur le mélancolique Breaking Down , évoquer crainte de l’abandon sur une litanie comme Never Let Me Go ou même revendiquer ces odes à l’apaisement et à l’affranchissement que sont Leave My Body et All This And Heaven Too.
On le voit, le groupe fonctionne toujours comme un melting pot musical, un melting pot si revendiqué ici, qu’on peut très bien considérer qu’il est comme un pêle-mêle jeté au hasard. L’emphase apportée aux arrangements ne peut qu’inciter, en outre, à une écoute prononcée. Cela suffira précisément pour comprendre que, injustement comparée à des vocalistes comme Céline Dion, Florence Welch est une artiste hors-normes, en tous cas hors de celles qui s’inscrivent dans la rubrique « Grand Public ».
- Publication 779 vues12 janvier 2012
- Tags Florence and The MachineIsland Records
- Partagez cet article
Tracklist
- Only If For A Night
- Shake It Out
- What The Water Gave Me
- Never Let Me Go
- Breaking Down
- Lover To Lover
- No Light, No Light
- Seven Devils
- Heartlines
- Spectrum
- All This And Heaven Too
- Leave My Body
- Remain Nameless
- Strangeness And Charm
- Bedroom Hymns
- What The Water Gave Me - Demo