"> Heavy Trash - Noir! - Indiepoprock

Noir!


Un album de sorti en chez .

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Le rockabilly iconoclaste de Jon Spencer'n'co

Ne cherchez ni streaming ni CD, les séries « Aphonos » présentent la conception de cet album de la manière suivante : « Nous avons traversé de nombreuses embûches pour nous assurer que cet album ne sera jamais un hit ». De la part d’un distributeur, la démarche quelque peu arrogante suscite tout de même la curiosité. « Noir! » n’aura donc connu qu’un pressage vinyle, et le précieux sésame n’a pas inondé non plus les bacs de disquaires. Dès lors s’agit-il d’un énième ersatz de pratique marketing de la raréfaction, ou la démarche nous offre-t-elle une vraie expérience musicale?

Jusqu’ici le side project de Jon Spencer et Matt Verta-Ray nous avait habitué à un rockabilly somme toute bien moderne dans ce monde de revival. « Noir! » fait par contre office d’OVNI total dans un paysage musical cloisonné. S’appuyant sur l’essentiel du rockabilly, l’attitude et les instruments classiques, les acolytes se fendent de compositions franchement géniales de trouvailles et créent des sonorités ou rythmiques jusqu’ici inconnues. Out Demon Out, notamment résonnerait à la manière d’un electro indus, tout en gardant une âme vintage.

Avec ces délires sentant l’impro de jazzmen géniaux, cohabitent des instrumentaux flirtant avec le trip hop, (sans platine), comme l’hypnotique Vila Dolor. Sur certains morceaux plus proches des standards 60’s, par l’interprétation possédée de Jon spencer et le travail d’orfèvre sur les sonorités et tonalités, l’état d’esprit défrichage continue de présider aux destinées de ce disque à part.

Profitant d’arrangements et d’une production qui ne prennent jamais le pas sur la démarche artistique, ce quatrième album du groupe, qui ressemble plus à une récréation sérieuse, est clairement le plus original et habité des albums du groupe, dans la démarche le plus « Jon Spencer Blues Explosionien ». Alors qu’il continue à casser les codes du blues au sein de son trio new-yorkais, nous offrant des hybrides géniaux, Jon Spencer semble communiquer comme personne son goût pour l’expérimentation. Ce qui rend ses albums uniques, c’est que, bien qu’allant très loin dans ses tentatives, le bonhomme et ses compagnons, quels qu’ils soient, préservera toujours la philosophie des styles qu’il semble vouloir violenter.

Tels des Pierre Boulez respectueux de leurs aînés, Heavy Trash livre un album plein de contours qui sont autant de mystères à découvrir, et pourtant, qui reste un effort efficace et accessible comme le plus classique des albums de rock sixties US. Ne se privant d’aucune incartade comme la clôture de l’album, Last Saturday Night, titre sans paroles, mais chanté, à la manière du « Animals » des Floyd, le groupe s’amuse studieusement et le résultat s’en ressent. Plus dense que nombre d’albums pop réputés, « Noir! » est avant tout un album qui touche à l’instinct, s’appuyant sur une démarche expérimentale pour faire réagir le primate en nous.

Comme évoqué à son sujet sur ce site, Jon Spencer est définitivement une icône rock par nature, une sorte d’image fantasmée d’un roman, mais il existe. En chair et en os, avec Matt Verta-Ray, le rockeur fou a trouvé à qui parler et le résultat est tout simplement diablement magique.

Le label ne voulait pas de hit, ils y sont parfaitement arrivés, aucun titre ne se dégage particulièrement, malgré les grands écarts perpétuels de la tracklist. Sans l’idée de départ, l’album ne serait peut-être pas ce qu’il est, mais quelle tristesse de ne pouvoir vous diffuser ces joyaux, le fait est que « Noir! » est rare, comme tout trésor.

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La disco de Heavy Trash

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