Jenny Wilson

Le nouvel album d'une survivante.

Peu connue en France, où ses albums sont distribués de manière erratique et avec beaucoup de retard, Jenny Wilson n’en est pas moins une artiste accomplie, à l’univers accessible mais bien affirmé, entre mélodies souvent accrocheuses, arrangements electro et voix qui part volontiers dans les aïgus sans provoquer de crispations. Au delà de tout cela, Jenny Wilson est également une (com)battante pour qui éditer des albums représente sans doute plus que pour beaucoup. « Hardships », son précédent album, suivi d’une tournée triomphale, annonçait un épanouissement artistique et une large reconnaissance qui avaient tout pour la combler et lui ouvrir de belles années. Hélas, alors que la suédoise entamait l’écriture de ce nouvel album, Jenny Wilson s’est vu diagnostiquer un cancer du sein et l’obligation de subir un lourd traitement, avec le lot d’effets secondaires, physiques et psychologiques, qu’on peut imaginer.

Pour autant, refusant de tout repousser ou même laisser tomber, Jenny Wilson a décidé de poursuivre l’élaboration de « Demand The Impossible ! », envers et contre tout. Détermination exemplaire et payante puisqu’elle est aujourd’hui en rémission. Sachant cela, qu’on le veuille ou pas, difficile de ne pas chercher dans ce nouvel album des traces de ce qu’elle a vécu. Mais la première leçon, c’est que « Demand The Impossible » est d’une unité et d’une cohérence impeccables de bout en bout. Le chant est intense, sans faiblesse, parfaitement au diapason du chaloupé et orientalisant Opposition, touchant sur la belle ballade Mean Bone, adoptant un phrasé qui flirte avec le hip-hop sur Wanna Have It All.

Sur la forme, l’album garde le groove propre à la musique de Jenny Wilson, avec des titres enlevés, voire même décapants dès le départ (on pense à Opposition, Restless Wind, The Future, Battle With God ou encore au surprenant quasi-instrumental Autobiography). Toutefois, les morceaux s’appuient sur des arrangements electro plus tendus, plus « métalliques » qu’à l’accoutumée, avec une production épaisse et complexe, du meilleur effet. Résultat, à côté de titres au potentiel « tubesque » indéniable s’invitent des compositions surprenantes, au premier rang desquelles Pyramids (Rose Out Of Pain) ou encore le déjà cité Autobiography. Jenny Wilson continue donc à tracer sa route en développant sa pop sophistiquée, à portée de toutes les oreilles sans tomber dans le conformisme. Pour le plus grand bien de tous.