"> Matt Elliott - The Broken Man - Indiepoprock

The Broken Man


Un album de sorti en chez .

7

Matt Elliott s’est maintenu dans une semi-pénombre tout au long de sa carrière juqu’à aujourd’hui, poussant tranquillement les frontières de son écriture vers un idéal de beauté et de désolation qui a des airs d’inéluctable. Il est de ceux que l’on croise par hasard, parce qu’ils ne sont pas très loin, parce qu’ils ont la […]

Matt Elliott s’est maintenu dans une semi-pénombre tout au long de sa carrière juqu’à aujourd’hui, poussant tranquillement les frontières de son écriture vers un idéal de beauté et de désolation qui a des airs d’inéluctable. Il est de ceux que l’on croise par hasard, parce qu’ils ne sont pas très loin, parce qu’ils ont la gentillesse de se produire à Toulouse pour trois malheureux euros et de laisser flotter la grace d’un moment hypnotique parmi le public clairsemé. Découvrir Matt Elliott est comme se pointer dans l’arrière salle d’une brasserie du XIème arrondissement et tomber sur Josh T. Pearson en train de jouer Honeymoon Great : Wish you Were Her, une litanie de plus de treize minutes à la beauté terrassante, la clairvoyance en plus. Vous aimez Bill Callahan ? Matt Elliott a une voix grave, dans l’esprit de celle du parangon de Smog, même s’il l’utilise ici avec une parcimonie qui tient plus de l’illustration que de la chanson, comme un autre instrument dans la fresque que constitue « The Broken Man ».
Les chansons de cet album extrême sont austères mais denses, d’une inspiration qui leur donne un aspect grandiose. Démarrant souvent sous le joug d’une guitare hispanisante au jeu complexe, elles s’affirment avec une précision méticuleuse et une sagesse à toute épreuve. Les suites qui constituent la première face du vinyle démontrent le pouvoir et la détermination de Matt Elliott pour exprimer les sentiments de regret et de solitude dans leurs infinies variations.
Ce premier acte culmine avec les dix minutes de Dust, Flesh and Bones, qui démarre comme une lamentation nue évoquant Leonard Cohen et s’oriente en volutes autour d’une phrase répétée, conjurant toute la conviction d’Elliott envers sa propre sagesse affective. La chanson décolle lentement de terre, prend un tour presque effrayant avec ses chœurs murés, le son d’une cloche lointaine contribuant à la sensation d’un vide immense qui s’ouvre de plus en plus sous nos pieds. Cet aspect atmosphérique fait de « The Broken Man » l’album le plus accompli de Matt Elliott à ce jour, et sa voix circonspecte demeure, malgré tout, un élément auquel se raccrocher. Avec la confiance qu’il met à répéter « This is what it feels to be alone », on est convaincu que la solitude le hante depuis des années, et la chanson documente cette relation vaguement amusée avec elle. Le résultat est d’une beauté, d’une évidence extraordinaires.
« The Broken Man » s’enfonce plus avant, construisant sa pièce maîtresse sur deux improvisations au piano comme surgies des noirceurs d’une ancienne Vienne, retranscrites et interprétées par Katia Labèque. Matt Elliott multiplie encore la fascination produite par son œuvre, allant à rebours de la cohérence habituelle pour nous obliger à trouver de nouvelles pistes de lecture, entre acceptation d’un certain psychédélisme et reconstruction de quelque monument sonore gothique oublié. Derrière une prestation stoïque et confiante se révèle la force de chansons qui contiennent non seulement leur raison profonde, mais s’articulent en un tableau d’une force étonnante.
Chroniqueur

Tracklist

  1. Oh How We Fell
  2. Please Please Please
  3. Dust Flesh and Bones
  4. How to Kill a Rose
  5. If Anyone Tells Me...
  6. This Is For
  7. The Pain That's Yet to Come