Certains artistes nous donnent parfois mauvaise conscience. On aime leurs disques et l’on voudrait que notre enthousiasme soit partagé par le plus de monde possible. Mais souvent ces artistes ont une musique qui s’adresse tellement à l’intime que l’on sait très bien que l’endroit où elle s’exprimera le mieux est la discrétion d’une chambre, dans […]

Certains artistes nous donnent parfois mauvaise conscience. On aime leurs disques et l’on voudrait que notre enthousiasme soit partagé par le plus de monde possible. Mais souvent ces artistes ont une musique qui s’adresse tellement à l’intime que l’on sait très bien que l’endroit où elle s’exprimera le mieux est la discrétion d’une chambre, dans un rapport privilégié avec son auditeur.

Shannon Wright fait partie de ceux là. Frêle demoiselle pourtant capable de fulgurer un public lors de ses prestations live ou sur ses albums où elle transfigure son mal-être, tantôt à travers de délicates mélodies acoustiques, d’autres fois à travers de rageuses saillies électriques. Mais aujourd’hui quelque chose a changé dans la vie de Shannon Wright : elle est devenue maman et son nouvel album s’intitule Let In The Light, signe d’un certain apaisement intérieur.

Le risque était que sa musique ne tiédisse quelque peu, ne perde en intensité, mais l’écoute nous rassure très vite. Si le propos est effectivement plus serein que par le passé, la forme révèle de vraies pépites. Il y a d’abord ces morceaux où la guitare domine, comme St Pete, Don’t You Doubt Me et surtout In the morning, balades folk rock derrière lesquelles se nichent encore en entrejour colère et frustration, comme chez PJ Harvey, mais aussi des qualités mélodiques évidentes. Mais plus encore, il y a les morceaux articulés autour du piano, qui donnent le vrai relief de ce disque et constituent la majorité des titres. Chaque ligne de piano a les atours d’un prélude : les noms de Debussy sur Defy This Love, Satie sur Steadfast and True ou Chopin pour They’ll Kill the Actor in the End nous viennent en tête, la voix de Shannon Wright se fait moins neutre et plus émouvante, un véritable état de grâce se dégage de l’ensemble.

Cet album sonne donc comme celui de la maturité, terme ici tout sauf péjoratif, pour exprimer que Shannon Wright trouve un équilibre subtil entre forme et fond, ses colères d’hier et ses espoirs d’aujourd’hui, son écriture et son propos.

• Publication 673 vues2 avril 2007
• Tags Shannon WrightVicious Circle
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