"> The Decemberists - I'll Be Your Girl - Indiepoprock

I’ll Be Your Girl


Un album de sorti en chez .

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Huitième album des Decemberists, celui de la tentative d'une redéfinition. Judicieux ?

The Decemberists aiment les contes, mythes et légendes, aiment s’en inspirer ou en inventer, et cette fibre a irrigué nombre de leurs albums, aux titres d’ailleurs évocateurs, de « Picaresque » à « The Crane Wife » en passant par « The Hazards Of Love ». De fait, leur carrière a un moment évoqué le mythe d’Icare, le groupe s’étant clairement brûlé les ailes à vouloir aller trop loin dans sa démarche conceptuelle. Puis, brusquement redescendue au sol, la troupe a tenté de gravir de nouveau la montagne en repartant sur les mêmes bases avec son dernier album, « What A Terrible World, What A Beautiful World » en 2015. Et là, Colin Meloy et consorts ont certainement vite compris qu’ils étaient bons pour rejouer le mythe de Sisyphe… Conséquence, « I’ll Be Your Girl », qui paraît aujourd’hui, voit les Decemberists changer d’approche, dans une nouvelle tentative d’apparaître comme le phénix qui renaît de ses cendres (même si là on pousse un peu, le groupe ne s’étant jamais désintégré).

Concrètement, sur « I’ll Be Your Girl », le groupe, sans l’abandonner complètement, délaisse quelque peu sa fibre organique pour intégrer à sa palette sonore des arrangements synth-pop. Tout heureux de leur trouvaille, ils la dévoilent façon pochette surprise sur Once In My Life, le premier titre, qui démarre sur quelques accords de guitare acoustique et la voix caractéristique de Colin Meloy, histoire de nous placer en terrain (archi) connu pour mieux nous surprendre en milieu de morceau quand éclate une plage synthétique qui fait son petit effet, sans plus. Mais, si l’idée de se redéfinir, ne serait-ce qu’en partie, au niveau sonore, peut certainement constituer un bon stimulant, elle ne saurait se suffire à elle-même. Or, sur « I’ll Be Your Girl », jamais elle ne semble s’inscrire dans une volonté plus large de redéfinir les contours de l’écriture des chansons. Surtout, plus grave, alors que les meilleurs albums des Decemberists brillaient par leur construction minutieuse, un ordre des morceaux soigneusement choisi, celui-ci ressemble à une suite de chansons sans véritable cohérence, sans réelle direction. Colin Meloy, qui signe comme d’habitude les textes, y apparaît quelque peu amer, ou désabusé, quand il déclame sur des arrangements faussement enjoués « We all die young » sur le morceau du même nom, ou étale un catalogue bien sombre sur Everything Is Awful.

Le syndrome du groupe qui n’arrive plus à aller de l’avant devient encore plus criant quand, après une série de morceaux globalement courts et enlevés, démarre Rusalska, Rusalska/Wild Rushes, qui, avec ses huit minutes et sa construction épique, tente de renouer avec le souffle des moments les plus ambitieux de la carrière du groupe. Mais, sans être totalement raté, le morceau manque, à l’image de l’album, d’une réelle conviction, et c’est encore plus criant quand, derrière, le groupe conclut laconiquement l’album sur le fadasse I’ll Be Your Girl. Là, l’effet est terrible : le groupe vient successivement de placer le morceau à priori le plus ambitieux de l’album en fin de parcours, comme s’il fallait « faire l’effort » avant de conclure, puis de refermer le disque sur un morceau qui n’a d’autre ambition que de marquer la fin, justement. Et c’est le morceau qui donne son titre à l’album… Même si ça fait mal de le dire, tout ce qu’on ressent depuis 2012 dans les albums des Decemberists se cristallise ici. Retour à la simplicité sur « The King Is Dead », tentative de repartir de l’avant sur les mêmes bases avec « What A Terrible World… », essai d’une palette sonore différente cette fois-ci, mais ça ne marche pas. Colin Meloy lui-même semble ne plus y croire, et ça commence à se voir et s’entendre.

Rédacteur en chef
  • Pas de concert en France ou Belgique pour le moment

Tracklist

  1. Are You Going to See the Rose in the Vase, or the Dust on the Table
  2. Us Vs. Them