"> Interview de Attaque - Indiepoprock

Interview de Attaque

Comment es-tu devenu DJ de techno ?

J’ai commencé à jouer de la batterie dans un groupe, et parfois à soutenir des groupes comme Mogwai. J’ai toujours été intéressé par le shoegaze. Puis, habitant dans l’Essex (en Angleterre), j’allais à des raves et à des soirées. J’adorais The Chemical Brothers ou The Prodigy, qui venaient tous deux d’une ville proche de la mienne. J’ai fait des études d’ingénieur du son. Je voulais travailler pour des groupes, et puis à force de sortir en club tous les week-ends, je me suis dit que je voulais faire de la musique.

J’ai habité plusieurs endroits en Angleterre, comme Sheffield ou Brighton. C’est dans cette dernière que je voulais faire quelque chose de plus net, moins bruyant. J’ai commencé à faire de la techno et j’ai signé avec le label Bad Life. J’ai sorti des morceaux sur le label, pour Lektroluv, et aussi des remixes. J’aimais beaucoup ce son techno, mais j’ai toujours été intéressé par des sons qui ne se classent pas dans les genres habituels. La techno c’est la techno, l’électro c’est l’électro. Mais j’aime bien l’entre-milieu.

 

Tu as même participé à une Boiler Room. C’était comment ?

Ça m’a vraiment fait peur (rires) parce qu’il n’y a personne en face de toi. Il y a une caméra. Tu as des amis autour de toi, mais tu ne joues pour personne. C’est difficile. C’était à Londres et c’était vraiment sympa à faire. J’adore jouer des titres en live.

Peu importe où tu es ou ce que tu as à faire, même si ça fait peur, même si c’est calme ou au contraire très animé, tant que tu aimes ce que tu passes alors tu passes du bon temps. C’est aussi simple que ça.

 

Tout ça fait partie de ton passé désormais. Tu as radicalement changé de style de musique. Comment c’est venu ?

Je pense qu’à force de jouer dans des groupes et de vraiment aimer de la jolie musique, du shoegaze et plein d’autres sons, j’en suis venu à me dire que la musique que je faisais ne représentait seulement qu’une facette.

J’allais dans les clubs pour faire un DJ set vers 3 heures du mat’. Je devais faire une intro, je devais faire un outro, je devais avoir un buildup, je devais envoyer du lourd. Quelque part, j’en ai eu assez de la façon dont ça se passait. J’ai commencé à écouter beaucoup plus de groupes et de guitare.

 

 

Tu voulais arrêter de te produire en clubs ?

Non, mais je ne voulais pas jouer dans un club tous les week-ends parce que la seule chose que j’entendais c’était mon choix de titres ou mon travail sur les remixes. Je commençais à n’écouter que de la dance music et ça ne me satisfaisait pas. J’étais fatigué la semaine de faire des tournées et constamment chercher le son à mettre dans le prochain set. Je ne me sentais pas libre. Je me sentais contraint à faire de la musique pour les clubs. Je me suis dit que ce n’était pas moi. Je voulais faire quelque chose de beau, qui apporte de l’émotion et pas juste faire danser les gens. J’avais besoin de plus.

Je ne pensais pas que j’allais faire un album. C’était juste comme une délivrance de composer de la musique qui n’était pas 4/4 ou à 128bpm. J’ai commencé à jouer avec différents sons, à couper des morceaux, à ajouter des voix, de la guitare, de la batterie. J’étais vraiment très excité. À partir de là, j’ai composé quelques titres, les ai assemblés et me suis dit que ça pouvait faire un album.

Pendant un an j’ai arrêté de faire le DJ et me suis vraiment concentré à faire quelque chose juste pour moi. Je voulais faire quelque chose que je pourrais adorer écouter dans 10 ans plutôt que d’avoir une collection de titres techno que je ne voudrais pas écouter parce que ça ne se joue qu’en club.

 

Quand a débuté le projet de ce nouvel album « On Ly Ou » ?

C’était à la même période l’année dernière, vers l’hiver 2013. Ça m’a pris plusieurs mois pour écrire l’album et quelques autres pour le mixer. Il y a eu beaucoup de travail : écrire les parties de chaque morceau, trouver des guitaristes, etc. Et puis quand les morceaux ont été finis et qu’il était temps de trouver quel serait le single phare, je voulais en faire plus. Par exemple, pour Future Earth, j’ai trouvé un quatuor à cordes, écrit leur partie et l’ai enregistré. Nous en avons fait une version différente.

Écrire de la musique c’est toujours vouloir quelque chose d’autre. Dès que tu te sens à l’aise, tu penses déjà à la prochaine étape, à ce que tu peux y ajouter, juste pour te faire plaisir. Cet album « On Ly Ou » (« seulement toi »), ça veut en fait dire « only me » (« seulement moi »), parce que ça parle de mes préférences. Ça veut dire « seulement toi » peux faire cet album, « seulement toi » peux mettre toute cette émotion, « seulement toi » peux mettre autant de travail.

 

C’est très introspectif.

Oui, ça l’est. Mais ça veut aussi dire « seulement toi » à n’importe qui voulant faire quelque chose. Personne ne va écrire de la musique pour toi, travailler aussi dur que toi. Ça doit venir de toi.

 

Il y a différents chanteurs sur l’album. Comment les as-tu rencontrés ?

Il y a Adam (Pless) qui chante sur Change Your Mind. Quand je l’ai écrit, j’ai pensé qu’il avait une voix à la fois belle et éthérée. Il est dans un groupe qui s’appelle Qtier que j’adore. Je savais que sa voix fonctionnerait sur ce titre.

Mon manager m’a aidé à trouver Native Young qui change sur Future Earth. Je ne savais pas si ça fonctionnerait parce que c’est basé sur un sample de guitare classique sur des sonorités garage, et les Sud-Africains chantent avec une voix très haute perchée. Mais, encore une fois, je voulais vraiment combiner différentes influences et différentes sonorités et les transformer en quelque chose d’excitant.

Pour Let It Down, mon manager était à SXSW, prenant un verre dans un bar et a bousculé quelqu’un qui se trouve être le manager de celle qui chante. Nous lui avons envoyé le morceau et quand il nous est revenu, c’était génial. Ça ne se passe pas toujours comme ça.

J’ai demandé à 20 personnes différentes de chanter et de donner leur avis.

 

 

Tu es toujours sur le label Bad Life. Comment ont-ils réagi à cette nouvelle tournure musicale ?

J’ai arrêté de leur envoyer des démos de techno et les choses se sont calmées. J’ai travaillé sur quelques morceaux que je ne voulais pas leur envoyer. Quand j’ai écrit Only You, c’était juste pour moi. Quand j’ai eu finir d’en écrire 4, je les ai envoyés au label qui était tellement excité. Bien plus que je ne l’étais.

Je pense vraiment que  travailler avec un label ne consiste pas seulement à lui faire aimer ta musique, c’est aussi une question de relation. Il sait qui tu es et comment tu travailles. Ça marche avec beaucoup de respect entre nous et beaucoup d’amour aussi. Ça paraît naïf, mais partager cet amour et respecter ce que chacun peut apporter au projet, c’est vraiment bien.

 

Tu es actuellement en tournée avec cet album. Comment ça se passe ?

Encore une fois, ça a demandé beaucoup de travail. C’était plus dur que d’écrire l’album parce que je suis passé de DJ à composer moi-même dans un studio, puis décomposer les morceaux et trouver qui allait jouer quoi dans le groupe. Quand tout commence à s’assembler, tu retrouves l’excitation. Je suis très heureux que nous ayons trouvé ce son et que nous fassions la tournée.

C’est vraiment différent d’aller dans un club plein à craquer avec une centaine de personnes déjà sur place, qui s’amuse, à passer des morceaux sans avoir à les faire venir à ton show. À chaque concert, tu dois tout donner parce que tu aimes ça. Si les gens sont là, c’est bien, s’ils ne le sont pas tu dois quand même tout donner.

Évidemment c’est beaucoup mieux quand les gens sont là et qu’ils sont à fond parce que ça te fait jouer encore mieux. C’est une sensation que tu ne peux pas avoir en tant que DJ : lorsque les gens sont à fond, tout ce que tu peux faire c’est passer un autre morceau. Quand tu es sur scène à jouer tes morceaux, ça peut te transporter et c’est ce que je cherche.

 

Comment as-tu rencontré les membres de ton groupe ?

Dave (Yallop) est un ami depuis que je suis ado. Nous sommes tous les deux batteurs, mais il a toujours joué mieux que moi. Nous avons fait un live quand je faisais de la techno. Il jouait de la batterie électronique et il était génial, donc je savais qu’il fallait qu’il soit le batteur. Il joue d’ailleurs sur l’album.

Christian (Wright) habite près de chez moi. C’est un chanteur incroyable, il a une jolie voix, il est guitariste, il gère le groupe, il fait tout bien. Je savais que j’avais besoin d’un frontman. Je me vois toujours comme le producteur.

 

En effet, c’est rare de voir que la tête d’affiche n’est en fait pas du tout le frontman.

Je pense qu’on devrait faire une affiche de nous 3 pour que les gens sachent que nous formons un groupe. Je veux que Christian soit le frontman, que les gens se concentrent sur lui et sur sa voix. J’ai voulu faire quelques chœurs. Je n’étais pas dans ma zone de confort, il me l’a déconseillé et je suis ravi qu’il l’ait fait parce que c’est un mec bien.

 

Que peut-on attendre d’Attaque dans les mois à venir ?

Une fois la tournée terminée, je vais avoir un nouveau studio qui se construit près de là où j’habite, à la campagne, entouré de champs. Je vais commencer à travailler sur un nouvel album, mais en travaillant davantage avec Dave et Christian parce qu’ils ont vraiment apporté beaucoup pour le live. Je veux retrouver cette énergie et l’utiliser dans un prochain enregistrement plutôt que d’utiliser des beats programmés ou de la batterie préenregistrée.

 

Tu vas encore changer de style musical ?

Je suis vraiment content de mon album, mais je suis toujours à la recherche du petit plus qui permet de dire que ce que tu entends c’est du Attaque. Cet album a beaucoup d’idées différentes et tout marche parfaitement ensemble, mais je cherche…

 

… Une identité forte ?

Voilà. C’est le mot : une identité. Je pense que ça viendra de nous 3.

J’espère également qu’on continuera à faire des tournées, à jouer dans des festivals et à toucher de plus en plus de monde.

 

 

« On Ly Ou » est sorti le 27 octobre sur le label Bad Life.

Interview réalisée le 20 novembre.

Remerciements : Dominic, Russell.

Chroniqueur
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