« Grössë Ämbïäncë » est le 51ème album d’un musicien, à la production si vaste qu’il est désormais possible de la cartographier. Ce disque s’inscrit ainsi dans sa collaboration avec Super Apes Label, qui abrite son rock le plus radical. Un krautrock de l’enfer qui rappelle, furieusement, les géniaux Sunn O))) .

Et, étonnement, ce black metal noise renvoie au « Metal Machine Music » de Lou Reed. Disque maudit, inécoutable – soi-disant – et sensationnel, qui fut l’un des tout premiers exemples de rock bruitiste. Véritable machine de guerre sonique dont on ne saura jamais s’il était un geste désespéré ou un pur trait de génie. Le fait est que la grosse ambiance de Kim a tout d’un disque suicidaire commercialement, mais prodigieusement inventif, dont le radicalisme force l’enthousiasme. Au casque, il est quasiment hypnotique et paradoxalement apaisant.

Cette arme massive pour les acouphènes est d’une beauté sidérante, le bruit de fond de toutes les peurs, du chaos intégral de l’époque. Il explore le mystère absolu – et totalement euphorisant – qu’est la drone musique, sa violence absolue. Un mystère renforcé ici par des titres absurdes, même pas surréalistes. Juste banalement quotidien. Alors que s’écoule un flot continu de lave en fusion qui semble recouvrir des pensées sans importance. Et briser l’écoulement d’une existence sans qualité, soulevée par ces monstrueuses compositions/improvisations au lance-flammes.

On ne sort jamais indemne d’un disque pareil. Une telle montagne bruitiste relativise la notion même de musique. Sans que l’on sache très bien si elle est l’expression d’une brutalité primitive, ou le contraire. L’incarnation de l’essence même de la musique. Une musique littéralement sculptée dans la matière. Si l’on accepte d’être violemment secoué, « Grössë Ämbïäncë » est incontestablement une pièce maîtresse.

• Publication 227 vues30 août 2024
• Tags KimSuper Apes Label
• Partagez cet article