"> Andoni Iturrioz - J'ai vécu les étoiles - Indiepoprock

On a aussi écouté Andoni Iturrioz – J’ai vécu les étoiles

Le nouvel album d’Andoni Iturrioz s’ouvre sur « Révolution ». Et l’on se plait à penser que cette révolution-là plonge ses racines dans le « revolutio » latin, et sa notion de cycle, de mouvement circulaire. Au fond l’antithèse de la rupture violente, à laquelle la révolution est désormais exclusivement associée.

Car, de l’aveu même d’Andoni Iturrioz, le disque est nourri des évènements dramatiques qui n’ont cessé de secouer Paris depuis 10 ans. Des évènements qui semblent signer le retour presque inexorable d’un temps historique et forcément tragique. Toutes les peurs, tous les malheurs se coalisent et balaient avec une régularité effrayante tout un monde qui s’était patiemment reconstruit dans la paix. Avant d’être rattrapé par le feu, le sang et la maladie. Les progrès semblent alors impuissants à stopper la fatalité du désastre.

Voilà à quoi ressemble « J’ai vécu les étoiles ». Un formidable et très impressionnant tableau musical d’une époque saccagée par ces tumultes millénaristes et fanatiques, le désordre cyclique emportant hommes et civilisations. Au son d’une musique âpre et mélodique, rock et viscéralement blues, hypnotique et austère.

Disque d’un chaos mettant tout à terre, brouillant toute perspective, il s’ancre pourtant dans un espoir furieux et lucide, un élan désespéré mais vital. Sa beauté noire irradie littéralement. Sa poésie est forgée aux éclats d’une électricité incandescente, ou d’une douceur étrange pleine de gravité.

L’album lui-même porte les stigmates d’une plaie encore ouverte, celle de la pandémie, ayant perturbé son enregistrement en public, et contraint à le finaliser en studio. Dans l’enfermement d’une panique mondiale.

Il résonne ainsi d’un voyage initiatique, proche d’une divine – et terrible – comédie des temps réputés modernes. Un voyage musical rempli de lieux à peine imaginaires, d’expériences tristement concrètes, d’épisodes historiques. Comme un éternel recommencement qui remettrait brutalement  le monde technologique – celui que l’on pensait sauvé de la sauvagerie et de la fragilité si humaine – au cœur d’une évidence difficile à admettre. La rationalité finit toujours par céder sous le poids de la folie.

Andoni Iturrioz prend le parti, magnifique, de transformer cette folie en magie, d’en faire un mystère définitif et salutaire. On veut bien le suivre dans ce chemin dont la force et l’esthétique ramassent tous les fragments encore brûlants d’une décennie en enfer, pour en faire une authentique et profonde oeuvre d’art.

Yan
Chroniqueur
Andoni Iturrioz - J'ai vécu les étoiles