On a aussi écouté Raffut – Nocturnalia
Raffut livre avec « Nocturnalia » un spectaculaire voyage intérieur. C’est toute une géographie nouvelle que le trio érige. Les frontières ne sont plus ici que des artifices, au profit d’un dialogue profond entre le Brésil, l’Afrique et une Europe méditerranéenne enflammée par mille nuances. La musique se redessine à la faveur de cette carte mentale affolante et redoutable d’intelligence. Du rock psychédélique aux musiques populaires, elle délivre une charge de diversité et de poésie humaniste aux pouvoirs aussi violents que bienveillants.
Violent parce que ces compositions ont la rage d’un art en fusion, qui semble s’être mis en marche contre les replis effrayants qui s’expriment d’un bout à l’autre de la planète. Bienveillant parce que ce combat là préfère la force de la créativité, de la mémoire aux déchirements destructeurs.
Et par les temps qui courent, c’est peu dire que cette énergie a la puissance d’un antidote. « Nocturnalia » voyage incessamment d’une langue à l’autre, d’une évocation historique à la grâce poétique, et démontre par la beauté et le feu nourri d’une musique incendiaire l’absurdité de choix politiques et collectifs tout juste motivés par la peur ; et surtout par l’ignorance, la perte de patrimoines pourtant inestimables.
Ce raffut n’a rien d’un chaos ou d’une juxtaposition d’univers, il exprime au contraire toute la cohérence que l’on découvre dans ces rapprochements et dialogues transcontinentaux. Il existe bel et bien des courants qui se rejoignent et se mêlent, derrière l’apparence d’un monolithisme culturel aussi triste que révoltant. Raffut les fait remonter à la surface. Y déversant toute l’évidence d’un monde destiné à s’hybrider, pour se comprendre, et à créer des réalités artistiques toujours renouvelées, pour éteindre la haine.