"> Art Brut - Indiepoprock

Art Brut

Salle bondée, billetterie sold-out depuis deux semaines. Rien de très surprenant par les temps qui courent pour un concert de rock. Mais le buzz tel qu?on l?a connu pour Bloc Party l?année dernière, et tel qu?il profite actuellement à Arctic Monkeys ou Clap Your Hands, n?a pas été aussi hystérique avec les londoniens d?Art Brut. On aurait plutôt tendance à s?en réjouir. Car il est rassurant de penser que ce groupe puisse échapper à la logique du « consommé-jeté » et à toute cette frénésie ambiante.

Il y a en tout cas chez Art Brut une forme de sincérité et une capacité à l?autodérision qui font cruellement défaut à beaucoup de formations du moment. De ce point de vue déjà, les Art Brut occupent une petite place à part dans le paysage rock. Et après la prestation enflammée qui a été la leur à la Maroquinerie, tout le bien que l?on pensait d?eux s?en trouve renforcé.

Avec une entrée en matière singeant le Back In Black d?AC/DC pour glisser sur Formed a Band, Eddie Argos et ses acolytes piétinent joyeusement les codes habituels avec un plaisir à peine contenu, sourire en coin et filet de moustache à l’appui. Fidèle à ce qui fait la substance même du rock, Art Brut enchaîne les morceaux sans laisser au public le temps de reprendre son souffle, dans une urgence jouissive. Le son des guitares est incendiaire, et à l?écoute du chant déjanté d?Eddie Argos, on se prend à imaginer ce que pouvait être la grande période du punk, à la fin des 70?s. Une partie du public est prise d?une crise aigue de pogo à laquelle Eddie Argos participe activement, pour finir en train de slamer. Après une palpation en règle, il retourne sur la scène avec? ses chaussettes dans les mains. Commencer en chaussette, finir pieds nus, ça c?est rock?n roll…

Impossible en tout cas de ne pas se dandiner sur les bombes à répétition que sont Emily Kane, Bad Weekend, ou Little Brother, tant l?énergie déployée est brute et sans artifice. Argos ponctue les brefs interludes de « Art you ready Art Brut ?! » , manière de remobiliser ses troupes avant chaque nouvelle déflagration. Il ne manque pas non plus de resituer avec beaucoup d?à propos le cadre de ses chansons pour le public : « It?s a song about falling in love in Hambourg ». Lumineux Eddie ! Avec ?du jamais vu- un batteur jouant debout et au groove puissant, deux guitaristes aux riffs complices et une bassiste exécutant sa tâche avec brio, Eddie Argos a trouvé là une sacrée troupe pour soutenir ses textes à l?humour acide et parodique, des histoires empreintes d?une naîveté potache et en même temps profondément lucide et sarcastique. Son accent bien anglais rajoute à ses chroniques de débandade ou de flirt prépubère un côté à la fois grossier et chic (pas un seul « fuck »dans ses textes) assez exquis. On pourrait multiplier les compliments.

En à peine une heure et quart et quatre titres en guise de rappel, Art Brut aura tenu le haut du pavé d?un rock post-punk puissant et allègrement déconneur. Pas de posture faussement rebelle ou de message pompeux, Art Brut y va cash. Art Brut de décoffrage. Et c?est ça qu?on adore.

Chroniqueur
  • Publication 446 vues6 février 2006
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