Interview de Gypsophile
Bonjour Guillaume…tout d’abord, peux tu nous parler un peu de Gypsophile en tes propres termes ? Tu es certainement celui qui saura mieux le décrire…
Gypsophile a été formé en 1995 sous forme de duo, et, aujourd’hui, il s’agirait un peu plus d’un collectif monocéphale. C’est à dire que je suis à l’origine des morceaux (écriture et destination) qui prennent pourtant leur forme définitive après que chacun des cinq membres du groupes (dans lesquels je me compte à nouveau…) a apporté sa touche personnelle, s’il ressent véritablement le besoin d’en exprimer une. Des véritables débuts de Gypsophile, il ne reste qu’un disque édité par Elefant records apportant la preuve d’une « pure pop ». Ensuite, le style s’est orienté vers une pop mêlée de bossa, pour en arriver aujourd’hui à une sorte de chanson française, que nous appelons nous même « chanson free. » Aujourd’hui, l’intérêt de Gypsophile se trouve autant dans l’interprétation de chansons de « composition classique » que dans le laisser-aller de l’improvisation.
En ce qui concerne » Eloquence des fatigués « , votre dernier album : comment s’est passé sa conception (composition, enregistrement…). Avez vous travaillé différemment par rapports aux disques précédents ?
Il me faut toujours un peu de temps avant de penser à écrire de nouveau après l’enregistrement d’un disque. Le précédent album, « De loin, les choses », a pris ses aises avec les délais (surtout en ce qui concerne sa distribution en France), et il a donc fallu plus de temps que prévu au départ pour l’oublier un peu au profit de l’écriture de nouvelles chansons. Une fois qu’un peu moins d’une vingtaine de nouveaux morceaux ont commencé à fournir la matière d’un possible nouvel album, Noise digger nous proposa de produire « Eloquence des fatigués « . Sans avoir, pour autant, dû faire avec des moyens colossaux, l’enregistrement s’est déroulé de façon beaucoup moins spartiate qu’auparavant. Nous avons enregistré en studio, une semaine entière, respectant de véritables horaires de travail. Outre le changement de décor, Noise digger nous a donné la possibilité de travailler plus précisément la couleur du disque, de mieux nous pencher sur les liaisons d’entre les morceaux, ce genre de petites choses qui donnent l’impression du travail bien fait. L’unique problème qui se pose aujourd’hui, est que nous demanderons plus encore la prochaine fois.
Comment êtes vous venus à travailler avec Noise Digger ? Vous avez plus ou moins fait le » tour du monde » niveau labels, peux tu nous en dire plus ?
Espagnol, japonais, américain, voici d’où étaient originaires nos précédents labels jusqu’à ce que Noise digger ne décide d’aller contre l’irréparable méprise qui voulait qu’au pays des misérables Bénabar et Vincent Delerm on oubliât de célébrer le bon goût. Etant donné que les musiciens, à notre échelle, préfèrent, de beaucoup, se plaindre du sort qui leur est réservé plutôt que de se concentrer à correctement jouer leurs cinq accords, je devrais te dire qu’il est très difficile de ne pas être « reconnu » dans son propre pays. Or, ce n’est absolument pas le cas, les choses sont comme elles sont et, en réfléchissant un peu, je préfère qu’on écoute simultanément Gypsophile à New York, Hong Kong ou en Croatie, même en petite quantité, plutôt qu’en France exclusivement. Maintenant, que la France se lève, il est, pour elle, grand temps de commencer son devoir de mémoire !
Une autre sortie récente pour Gypsophile est « Gypsophile VS Shop », qui est un disque assez vieux. Pourquoi décider de le sortir maintenant ? parle nous un peu de ce disque un peu à part dans votre discographie…
Ce disque a été enregistré en compagnie d’Emmanuel Lamour, du groupe rennais Shop, en 1998. L’intérêt était de confronter sa musique électronique à ce qui était alors la pop influencée par la bossa de Gypsophile. Il s’agissait, pour chacun des deux groupes, de composer 5 titres pour l’occasion, et d’interpréter la dizaine résultante ensemble. A l’époque, nous avons décidé d’autoproduire ce disque, et la petite centaine écoulée le fut principalement à l’étranger. Par la suite, Alexander Bailey, du label Radio Khartoum, m’a fait connaître son envie de le rééditer : il lui a fallu trois ans pour me convaincre, afin que le disque sorte, remasterisé, en août 2002.
Tu remercies Michael Korchia dans chacun de vos albums. Watoo Watoo serait une influence pour Gypsophile… ?
Michael est, avant tout, un ami; et c’est à ce titre que, souvent, je lui conseille de cesser toute activité musicale. S’il se trouve remercié sur quasiment tous nos disques, c’est qu’il me laisse utiliser certaines boucles rythmiques de logiciels qui lui appartiennent. Voilà pourquoi je ne pourrais, malgré tout, me passer de Michael, pourvu qu’il ne s’empare d’aucun instrument.
Dans ton premier album, » Unaneelmi « , la majorité des chansons étaient chantées en anglais. Qu’est ce qui t’a fait revenir au français en ce qui concerne tes textes ?
Dès mes premières chansons, l’anglais s’est imposé à moi, rapport évident à la musique, essentiellement de langue anglaise, que j’écoutais alors. A côté de cela, il me paraissait net que le français peinait à se fondre totalement dans des refrains pop. Peu à peu, en perdant justement de cette caractéristique dans ma musique, le français a pu s’y faire une place, de plus en plus importante au fil du temps, jusqu’à obtenir, aujourd’hui, un monopole implacable. Le tout était de ne pas forcer la chose.
Pour quoi si peu de concerts de Gypsophile ?
Nous avons donné une petite quinzaine de concert l’année dernière. Pour certains groupes, c’est peu, mais pour Gypsophile, cela me semble assez. La scène est une chose particulière, et je ne sais encore si ce type de performance nous convient tout à fait. Tout le monde est d’accord pour reconnaître qu’il y a des disques que l’on écoute seul, et d’autres, à plusieurs. Un peu comme en peinture il y a des dessinateurs et des coloristes, il ne faut pas oublier qu’une dualité de la sorte existe aussi en musique. Certains se montrent efficaces dans les deux domaines. En plus de cela, le public, avec toute cette écœurante vague de groupes néo-réalistes, a maintenant tendance à demander à un groupe français de s’amuser sur scène. Il faut que le concert devienne cirque, que l’on y danse ou que l’on y rit. Cela me paraît être trop d’efforts à fournir ; et les musiciens ne doivent pas être les seuls à être à la hauteur…
Un dernier mot pour conclure ?
Juste le temps, alors, de préciser que, si « Eloquence des fatigués » n’est pas distribué près de chez vous (il faut parfois aller chercher loin pour revenir satisfait), vous pouvez le commander en passant sur le site internet de gypsophile, dont voici l’adresse : http://site.voila.fr/gypsophile Il faut écouter, de son vivant, un peu de musique sombre, si l’on veut rire un peu plus tard. (Petr Grisli)
Merci.
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