"> Interview de Oscar and the Wolf - Indiepoprock

Interview de Oscar and the Wolf

Comment as-tu commencé à faire de la musique ?

Je pense que j’avais 12 ans quand j’ai commencé à apprendre le piano. Je ne connaissais que 3 accords : do, sol et fa. J’ai du écrire une dizaine de chansons avec ces 3 accords. J’ai fait quelques autres projets solo étant jeune, plutôt comme hobby, pas en envisageant une carrière.

Plus tard, je suis tombé amoureux et j’ai réalisé que je pouvais faire de la musique d’une façon plus profonde. J’en ai eu besoin comme thérapie. Et j’ai commencé à l’aborder d’une meilleure manière. Je pense que les chansons ont plus de sens quand tu as beaucoup de choses à l’intérieur de toi.

 

Tu as sorti l’album « Entity » cette année. Tu peux nous raconter l’histoire de cet album ?

J’ai été super amoureux mais on ne m’a pas aimé en retour. Ça a été très douloureux. Je me suis rendu compte que je ne connaissais pas bien la personne en question. Parfois, je peux rencontrer quelqu’un 2 ou 3 fois et être complètement sous le charme alors que je ne connais pas cette personne.

J’ai donc créé une sorte de personnage qui n’existe pas vraiment et qui m’aveugle complètement. Cette « entité », c’est cette forme que tu penses comprendre alors que non : tu es amoureux de quelque chose qui pourrait littéralement te tuer. C’est comme l’histoire de « La Belle au Bois Dormant » qui suit la lumière verte qu’elle désire, sans savoir que ça va la tuer. Tu n’es pas capable de donner forme à cette entité, c’est quelque chose que tu ne comprends pas, mais qui t’attire.

 

Dans ces 2 premières questions, tu parles beaucoup de l’expression de tes sentiments. Tu te sens mieux après avoir écrit des chansons ?

Oui, c’est comme une thérapie. Après chaque chanson, je cicatrise un peu. Je n’étais pas totalement soigné quand l’album est sorti. J’ai eu aussi l’idée, aussi mauvaise soit-elle, de faire un album parce que je désirais que les gens m’aiment à travers ce disque. J’ai donc écrit cet album pour que mon amour perdu m’aime, mais aussi pour que les gens m’aiment et qu’ils m’aident à guérir. C’est étrange, non ? J’ai besoin d’être plus rationnel.

 

Tu as travaillé avec Leo Abrahams (Imogen Heap, Brian Eno, Jon Hopkins). Tu peux nous raconter un peu comment s’est passée votre collaboration ?

C’est un mec tellement sympa. J’avais un peu peur parce que je ne suis pas très technique en musique. Je ne sais pas jouer de beaucoup d’instruments. J’ai tout enregistré sur mon ordinateur portable. Mais il m’a fait comprendre qu’il n’y a pas besoin d’être un musicien technique pour être le meilleur. Même quand tu as un handicap, quand tu ne sais pas lire les notes par exemple, ça peut être une bonne chose. C’est un mec qui a vraiment les pieds sur terre. Quand il mixe, il est à l’écoute de ce que l’artiste veut.

 

Donc il t’a aidé à structurer l’album.

Pas à le structurer. Mais parfois il m’est arrivé de vouloir qu’une chanson soit plus forte et je n’étais pas assez technique pour le faire. Il m’a aidé pour ça, mais aussi à simplement mixer des chansons et à m’apprendre à mieux le faire. C’était vraiment un travail à 2, 50/50.

 

Tu aimes mixer avec GarageBand sur ton ordi. Tu penses que tout le monde peut faire de la musique facilement comme ça avec ce genre de logiciel ?

GarageBand est ma religion ! Vraiment. Comme je le disais, quand tu entres en studio et que tu as 50 guitares et 50 synthés, il y a trop de choix. Tu dois essayer plusieurs instruments et une fois que tu en as trouvé un de chaque, tu dois travailler dessus pour créer ton propre son.

Créer mon son, c’est ce que je préfère et c’est ce à quoi sert GarageBand comparé à Logic, par exemple. Dans GarageBand il y a peu de reverbs, mais elles sont bien. Quand sur Logic je dois chercher une reverb, il me faut des heures pour trouver celle que je veux pour finalement me dire « Mais où est GarageBand ? ». Je me rappelle d’une fois où je voulais une reverb de GarageBand mais Leo a refusé en disant « Non, je pense qu’il faut que la reverb soit un peu plus longue que ça. » et il ne l’a pas trouvé sur Logic. Donc vraiment, GarageBand est mon bébé, je n’arrêterai pas de faire de la musique avec.

 

Trop d’options c’est synonyme de confusion ?

Oui. J’aime avoir un handicap. C’est une bénédiction.

 

Tu puises ton inspiration dans la peinture, la littérature voire même les séries télé ou les films. Où as-tu particulièrement puisé ton inspiration pour « Entity » ?

D’abord je puise mon inspiration dans les personnes, et puis après dans les films, les séries et la peinture. Pour cet album, j’ai beaucoup pensé à « True Blood », « Six Feet Under », à des films de Polanski, de Jonathan Glasser ou du réalisateur de « Only Lovers Left Alive ».

 

Tu sais que l’intro de Joachim me fait penser au thème de fin des épisodes de Dexter ?

Ah oui ? Je suis curieux. Attends, on écoute. (Lancement de Youtube et écoute du titre). Oh génial !

J’aime vraiment faire de la musique comme bande-son. J’aime recomposer les bandes originales de films. Je prends des scènes de films ou de danse contemporaine que je vole sur YouTube, je les mets en slow motion, j’en extrais un morceau que j’aime et le passe en boucle pour écrire de la musique dessus. C’est comme si les personnages dansaient sur ma musique. C’est génial de pouvoir écrire une chanson à partir d’images.

 

 

Peut-être que plus tard tu feras de la musique pour des séries télé ou des films.

C’est la seule chose que je veux faire. Je pense vouloir arrêter les shows dans 10 ans et être dans ma chambre à écrire de la musique pour la télé, des séries, des films.

 

Une série actuelle pour laquelle tu aimerais composer ?

« Masters of Sex ». Parce que « True Blood » est terminé, « Six Feet Under » aussi et depuis longtemps.

 

La vidéo pour Princes et très différente de celle pour Strange Entity. Tu peux nous parler des 2 univers ?

Pour Princes, nous voulions créer l’image d’un gang qui déambule dans les rues composé de personnages avec des sortes de super pouvoirs. Quand je suis avec mes amis, c’est un peu comme ça. C’est une sorte de fantasme.

Pour Strange Entity, en fait je n’avais pas beaucoup de temps pour penser à la vidéo. J’ai juste parlé au réalisateur, qui est l’un de mes amis, qui m’a dit avoir une idée cool en prenant le mythe d’Orphée et d’Eurydice, et le rendre de manière abstraite dans la vidéo. J’étais d’accord. L’actrice qui joue dans le clip est belge et très connue. Elle s’appelle Lize Feyrn. Elle va jouer prochainement avec Adrien Brody au cinéma. Elle est super belle. C’est un autre de mes amis qui s’est occupé du décor.

 

 

Y aura-t-il d’autres vidéos pour l’album ?

Pour la prochaine vidéo, je vais travailler avec Willy Vanderperre qui fait des fait des vidéos pour Dior. Je pense que nous allons simplement créer des images, et travailler sur le style, l’espace et les vêtements. Il n’y aura pas de vraie histoire à proprement parler, plutôt des extraits de vidéos.

 

Comment ça se passe la musique dans les Flandres ?

Je n’écoute pas beaucoup d’artistes belges. Pour la production, je la fais moi-même et je vais à Londres pour le mixage parce qu’il y a plus matière à travailler sur le sujet. Mais pour sortir un album, tu dois juste avoir de la chance de tomber sur un bon label qui apprécie ton travail et qui est prêt à te sortir. Tu dois aussi être diffusé en radio. C’est super important en Belgique.

 

Tu as joué au Silencio, à Paris, samedi dernier. C’était comment ?

Tellement beau. J’aimerais vraiment en faire mon salon. Ça ressemble à une maison. C’est super cosy sans être kitsch. Les gens dansaient beaucoup donc j’étais très content. J’y suis resté jusqu’à 7h du matin. Le personnel a essayé de me faire sortir alors que je ne voulais pas. (rires)

 

Comment as-tu rencontré les membres de ton groupe sur scène ?

J’ai fait passer des auditions pour trouver un bassiste. J’ai piqué le guitariste à un autre groupe. Le batteur est là depuis 3 ans maintenant. Je l’ai rencontré parce que notre ancien bassiste travaillait dans une école où il a demandé s’il y avait un prof qui savait jouer de la batterie et bingo.

 

Qu’est-ce que la scène t’apporte ?

Pour moi écouter un album ou un titre est différent d’aller à un concert et expérimenter le côté visuel. Je me déchaîne sur scène, j’ai envie que ça ne prenne pas de sens. Tu vois ce que je veux dire ? La présence est vraiment importante. J’ai juste envie de le faire à ma façon. J’aime danser, j’aime que la musique soit plus forte. J’essaie de créer une bulle dans laquelle je me sens bien. C’est important pour que les gens se sentent plus à l’aise et qu’une alchimie se crée.

 

Quel a été le meilleur moment pour toi cette année ?

Le défilé Dries Van Noten. J’y ai joué la musique. Il est super gentil. Le concept est tellement important pour lui et en faire partie a été un véritable honneur. Kanye West était devant moi. La musique a commencé, j’entendais ma voix et je me disais que tout le monde m’écoutait. Les mannequins et les vêtements étaient magnifiques et l’histoire racontée était très jolie.

Dries n’est pas le prototype du mec de la mode qui se la raconte. il est très terre-à-terre, décent et honnête. Il ne se met pas au dessus des gens, il ne croit pas à ce genre de choses. Les gens qui travaillent avec lui sont pareils.

Je l’ai rencontré quelques fois avant le défilé et nous sommes restés ensemble après. Il y a eu ce mec qui est venu lui dire « Julia Roberts a acheté de nombreuses pièces. » et « Tu es invité à la Maison Blanche parce que Michelle Obama a besoin d’être habillée [comme ça]. ». C’était un tout autre monde pour moi. Mais il reste normal et c’est important pour moi de rester comme ça.

 

 

Que se passe-t-il pour toi l’année prochaine ? Un autre album peut-être ?

Le prochain album sera pour 2016. Partir en tournée, ça oui.

 

Une tournée seulement européenne ?

Je ne sais pas. Nous allons peut-être jouer au Texas, mais rien de sûr. Ça va être plutôt une année occupée je pense. Je ne sais seulement qu’une semaine à l’avance où je vais, quelques fois moins. Je ne veux pas vraiment savoir où nous allons parce que j’aime être surpris à chaque fois. Parfois je ne sais même plus où nous sommes. (rires)

 

Tu es à Paris là. (rires)

Oui. Je me rappelle d’une fois où nous étions à Copenhague et je n’arrêtais pas de dire « Merci Oslo. ». Ils n’ont pas trop apprécié parce qu’ils sont plutôt très nationalistes. (rires)

 

L’album « Strange Entity » est sorti le 20 octobre sur le label PIAS.

Interview réalisée le 1er décembre.

Remerciements : Max, Hélène.

Chroniqueur