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A l’occasion de la sortie du nouvel album de Beck, « Guero », le Nouveau Casino accueillait quelques fans pour un concert privé. Les apparitions du ‘looser’ sur scène sont suffisamment rares et prisées pour organiser un jeu lucratif à base d’appels téléphoniques, SMS, quizz et autres fantaisies. Le public rassemblé ce soir concentre donc la crème des crèmes des fans, les plus rapides dégaineurs de téléphone.
Vers 21h, la salle est pleine et la scène ressemble à une brocante d’instruments de musiques. Pendant que les mécontents mendient encore des places sur le trottoir; à l’intérieur, chacun raconte ses anecdotes pour obtenir son invitation. L’ambiance est zen, le public détendu. A 21h30, Beck arrive sur scène sans prévenir, accompagné de 4 musiciens, tous aussi joyeux que lui. Clic-clac, quelques bidouilles pour se chauffer mais stop, l’animateur radio déboule sur scène et stoppe tout : la pub n’est pas finie et il faut attendre l’heure exacte pour le lancement du concert en direct à la radio. Beck le regarde un peu effaré et patiente en bricolant ses platines. Annonce radio, la foule hurle, cette fois, c’est parti !
Devil’s haircut ouvre le set, simple, efficace, beat bluesy, vague hip-hop, son parfait. La suite s’enchaîne tout aussi bien, sans accrocs. Les morceaux sont carrés, le groupe est ultra en place et maîtrise parfaitement le set. Black Tambourine, Hell Yes, Girl, Rental Car, E-Pro, on découvre les morceaux du nouvel opus avec joie et délectation. Beck a une fois de plus réussi le mélange des genres, rappelant ses aspirations bluesy, sa passion du rock, sa fascination pour l’électro et le hip-hop. C’est rythmé, pêchu, surprenant et, comme d’habitude, très décoré. Il faut dire que le groupe a amené tous ses jouets : batterie, samplers, platines, une montagne de claviers, ordi, basse, guitare, xylophone, une armada de percus (tambourins, maracasses, claves, djembé, pot en feraille,etc).
Bref, les compères passent d’un instrument à l’autre et jouent les titres avec précision mais sans engouement exceptionnel. Seul le percussionniste, clone d’Austin Powers, se démène en front de scène, dans un break danse robotisé épuisant et impressionnant. L’ami Beck est au centre de la scène avec ses samplers et sa guitare et dirige sa troupe comme un maître d’orchestre. A sa gauche, le bassiste, looké en Ramones endimanché, s’acharne sur son instrument tandis qu’au fond le batteur joue tranquille, planqué derrière ses fûts. Le clavier est certainement le plus occupé : les voix digitales, les boucles, les ambiances, le clavier sixties sur Where it’s at, c’est lui.
La foule est conquise et réceptive mais timide. Disons que les molosses plantés devant la scène passeraient l’envie de danser à James Brown d’un simple regard. Les gars du premier rang ont autant vu le concert que ceux qui l’écoutaient à la radio. Ne parlons pas des tentatives de photos : appareils numériques et téléphones sont chassés et confisqués.
Le concert s’achève sur E-pro, repris en coeur par le public qui connaît déjà ce tube, matraqué sur les ondes hertziennes. Pour le rappel, on a droit à un Get Real Paid, apocalyptique, bien envoyé. Un régal ! Les zicos se lâchent et se font plaisir. Ils savent que c’est la dernière chanson, le concert est réussi et le taxi les attend. Beck a réussi un concert propre et précis, a bien défendu son nouvel album et son statut de bidouilleur.