">
Il va falloir s’y faire, l’été s’en est allé et son successeur l’automne s’est installé. Les premières fraîcheurs nocturnes qui l’accompagnent sont d’ailleurs le prétexte idéal pour retourner se nicher dans les petites salles de concerts et pouvoir se réchauffer, entre autres, au son d’un agréable concert de rock. Pour ce qui est de notre cocon du soir, La Lune Des Pirates tient allègrement son rang en plein coeur d’Amiens, avec un espace certes exigu mais terriblement intimiste, et où la proximité avec les hôtes de scène fait le charme depuis trente ans sur le quai Bélu.
C’est donc dans ce lieu culturel bien établi qu’étaient programmés, en ce 3 Novembre, les Américains de Car Seat Headrest. En préambule, ce sont leurs compatriotes Naked Giants qui ont eu le loisir d’ouvrir les hostilités, avec la manière. Proches d’un style skate-punk et plutôt destiné à un public ados/jeunes adultes, le trio de Seattle n’en électrise pas moins la foule déjà présente à coup de cordes abrasives et grâce au renfort d’une superbe énergie, en partie lorsque ses deux leaders martyrisent basse et gratte à la manière de guitar-heroes. Quelques uns de leurs morceaux simplistes mais efficaces, extraits de leur premier album « SLUFF », nous auront tapé dans l’oreille, comme TV ou Everybody Thinks They Knows (But No One Really Knows).
Après un court entracte, au tour de Car Seat Headrest de prendre possession de la scène, avec son gringalet leader Will Toledo en chef de file. Tout de noir vêtu et entouré de six musiciens (dont les trois de Naked Giants), ce dernier et ses comparses entament le set avec Cosmic Hero, une ouverture taillée pour gentiment faire monter la mayonnaise, avant de poursuivre et d’arracher les premiers pogos avec Bodys. Tandis qu’au micro, Toledo se montre placide et clôt ses paupières en même temps qu’il use de sa voix, n’offrant au passage de son corps que quelques mouvements robotiques, la juvénile partie du public se trémousse dans tous les sens et bouscule la quiétude des trente/quarantenaires, puisqu’il faut le signaler, la centaine de participants représentait ce soir-là des âges relativement variés.
A l’instar du duo de titres cités, le groupe va alterner entre des morceaux des derniers albums en date : l’excellent « Teens Of Denial » puis le récent et revisité « Twin Fantasy », pour le grand bonheur d’une assistance plus connaisseuse que curieuse puisque beaucoup chantent en compagnie de Toledo. Fill In The Blank, […] Drugs With Friends […], Drunk Drivers/Killer Whales, Destroyed By Hippie Powers pour l’un et pour l’autre Cute Thing, Beach Life-In-Death et enfin la version live de Sober To Death (prolongée d’une reprise du Powderfinger de Neil Young), nettement moins à son avantage que sur l’album, celle-ci perdant de sa teneur par un tempo ralenti. Qu’à cela ne tienne, l’ambiance est à la hauteur et le rock de CSH électrifie les âmes au possible. Les instruments et leurs protagonistes s’en donnent à coeur joie et parviennent à transmettre leurs heureuses ardeurs sans encombre.
Comble du bonheur et d’une volonté d’asservir un auditoire averti, Will Toledo terminera sur un Encore défini par le public lui-même, en l’occurrence Something Soon, morceau « ancien » et unique extirpé d’une production de 2013 (« My Back Is Killing Me Baby »). Une note parfaite pour clore ce set d’une heure et demie, suffisante pour avoir apprécié Toledo & co. à leur juste valeur, sans regrets ni indigestion aucune, et s’être isolé du froid en leur énergique présence…
Crédits photos et remerciements : William Dumont
https://www.flickr.com/photos/will-dum/