"> Dans La Série des Inaperçus @ Glaz'Art - 15/18 février 2005 - Live Report - Indiepoprock

Dans La Série des Inaperçus @ Glaz’Art – 15/18 février 2005


15 février 16 février 17 février 18 février 15 février C’est à Glaz’Art, passé récemment du orange au noir, toujours sous la menace d’une fermeture et donc en résistance, qu’a lieu cette année encore la neuvième édition du Festival « Dans la Série des Inaperçus », consacré comme il se doit à la nouvelle scène pop indépendante. […]

15 février

C’est à Glaz’Art, passé récemment du orange au noir, toujours sous la menace d’une fermeture et donc en résistance, qu’a lieu cette année encore la neuvième édition du Festival « Dans la Série des Inaperçus », consacré comme il se doit à la nouvelle scène pop indépendante. Une première soirée n’est pas loin d?afficher complet en raison d’une programmation déjà très alléchante sur le papier.

On aurait pu d’ailleurs l’estampiller d’un petit ‘CQFD-Les Inrockuptibles’ puisque les trois groupes ont figuré dans la fameuse sélection ces deux dernières années, à commencer par 1=0 et son contestataire Atcha. Vêtu d’une djellaba bleue, Salima Tej sort une flûte. Boucle en direct avant de se lancer dans un set un peu hétérogène qui voit deux écoles s’affronter. D’un côté un rock français un peu minimaliste, rythmiques électros, paroles crues, engagées, psalmodiées dans la lignée d’un Programme, et à côté un rock noise, en anglais, qui joue sur les intensités où l’on découvre que Salima Tej sait aussi chanter, et d’ailleurs plutôt bien. La basse, déjà croisée chez Nolderise, est brute, sans esbrouffe, et les guitares tantôt délicates tantôt rageuses. On pense parfois à Suicide ou Joy Division. 1=0 déroute, dérange parfois, mais devrait trouver un équilibre qui lui permettra de marquer les esprits.

Puis ce sont les barbus de LOS CHICROS qui prennent la relève. Rusés, ils font monter doucement la sauce et sans crier gare, vous êtes déjà en train de vous dandiner sur des mélodies très efficaces. Leur recette : « des choeurs fifties, des basses sixties, des guitares seventies, des synthés eighties, un chant nineties » pour ce qui se révèle une musique tout en phase avec notre époque. On retrouve ainsi la plupart des excellents titres de leur album Too Cool For School », Naked Girl, Back in the Wild, Never be a hit (if you don’t remember it) que le groupe ne se contente pas de recracher tel quel. Si l’esprit est encore là, une rage rock vient s’y ajouter, un peu plus d’approximation mais plus de tripes. LOS CHICROS maîtrise son sujet aussi bien sur scène que sur disque, confirmant tout le bien que nous pensions déjà du groupe.

Enfin débarque SPLEEN et son armada déjantée. Le grand lauréat de l’édition CQFD 2005, habituellement solitaire, se retrouve sur scène avec pas moins de neufs musiciens et choristes survoltés. Entre soul hyper-rythmée, hip-hop barré et rock, ce jeune artiste pourrait être une sorte de mix entre Keziah Jones, Lenny Kravitz, The Roots (old school) et Corneille. Tour à tour, seul avec une guitare, au micro en tutu, il chante, débite son flow, en anglais mieux qu’en français, puis est rejoint par sa team pour un joyeux et généreux bordel. Car il se passe toujours quelque chose sur scène, ici un play-back sur une chanson des années 40-50 avec les ‘r’ bien roulés, là un porté de danseuse, des cris, un clavier virtuose, un masque de carnaval, des chapeaux? Pas de concession, SPLEEN y va à fond, parfois un peu trop gourmand, il abuse de certains effets qui une fois font surprise, deux redites, et au bout de dix « magnéto, Serge ! » pour lancer la bande, on se lasse. Néanmoins SPLEEN vit sa musique, avec caractère, aussi bien dans le luxe que dans le plus grand dépouillement. Bref, à garder dans un coin de sa tête.

16 février

Nous sommes au deuxième jour du festival des Inaperçus, qui nous propose un plateau s’annonçant plus que motivant : les vidéos diffusées en boucle sur les écrans de Glaz’Art, en attendant les concerts, nous mettent déjà l’eau à la bouche en présentant les élus de la soirée.

Un petit changement de programme nous permet de découvrir en première partie DISCOVER, en version solo. Ses musiciens l’auraient abandonné à la dernière minute, le laissant seul affronter le public des Inap’. S’accompagnant soit au Rhodes, soit à la guitare, il nous livre des versions intimistes de son album, séduisant le public par son humour et sa modestie. Le soleil n’est pas loin, les lunettes de soleil sont de rigueur et le public aime ça.

Ambiance feutrée et détendue qui fait place à la pop mélancolique de MAARTEN. Ils n’auront pas gagné CQFD cette année bien que cela aurait pu être plus qu’envisageable à l’écoute de leur titre The only thing I know, sélectionné par les Inrockuptibles pour l’édition 2005. Le combo délivre une musique planante, qui nous plonge dans un univers intimiste dans lequel la voix envoûtante de Wilfried fricote avec les sonorités des excellents Girls in Hawaï, voire encore Grandaddy. Subtiles mélodies agrémentées de passages explosifs prouvent que ces Rouennais maîtrisent très bien le genre. On pourra cependant leur reprocher une légère récurrence entre certains morceaux qui pourraient parfois nous lasser. La convivialité est de rigueur et le public est malgré tout conquis.

SWEET APPLE PIE viendra électriser cette soirée avec un son proche des 60’s / 70’s. Tous les éléments sont là pour en faire un groupe des plus intéressants en matière de rock. Fender Rhodes recouvert d’un drap aux motifs hippies, choeurs, sosie de John Lennon à la guitare, on a envie de rentrer dedans et pourtant rien ne ressort de très convaincant, en ajoutant que la batterie a trop tendance à couvrir les voix. Les Toulousains sont cependant bien présents sur scène et nous prouvent qu’il existe de fervents défenseurs de la pop anglophone en France. Heureusement, elle ne se laisse pas intimider par les requins de l’industrie musicale prétextant des critères marketing pour brider ce genre.

La soirée est encore une réussite, le public répond présent pour ce deuxième jour à Glaz’Art. Les choses sont bien parties pour que le festival ne passe pas inaperçu, cette année encore.

17 février

Une troisième soirée moins remplie que les précédentes, alors que les groupes sont tous de Paris. La faune qui s’est déplacée est aussi plus diversifiée pour ne pas dire bigarrée. Deux-trois barbus, quelques poppies de rigueur, une crête rose et quelques SuicideGirls, un blouson noir, des ados chevelus et hirsutes qui auraient écouté Pearl Jam il y a dix ans, bref on ne sait pas encore sur quel pied danser lorsque KIMLICO entre en scène.

Le trio dévoile alors sa pop aquatique. Les lignes sont simples, la batterie marquée, la basse soutient les fondamentales, la jolie froideur d’Aurélia séduit, alors que la guitare dessine des motifs, développe les ambiances, la voix de Jacques s’envole. L’ensemble est plutôt intéressant même si on leur reprochera certains creux (pas forcément évident à trois) ainsi que des fins qui tournent sans de réelles évolutions. On retiendra le très accrocheur Super Héros mais peut-être pas très représentatif du reste du set.

TCHIKI BOUM réalise alors une entrée en matière plutôt inattendue et remarquée. Pendant cinq bonnes minutes (un peu trop longues d’ailleurs), le chanteur/guitariste fera un petit numéro (croonerie à la Elvis, solo de guitare et discussion avec le public) pendant que les autres musiciens, tour à tour vont backstage, à la recherche du cinquième larron que l’on imagine bien en train de comater dans les toilettes sous l’effet de quelconques substances. Le zozo fini par apparaître et c’est parti pour quarante-cinq minutes de rock’n’roll, rockabilly, rocksteady. Toujours à fond, le groupe assure un set des plus efficaces. Guitares droit-devant, basse primale, un clavier très surf, des harmonies vocales, on se laisse séduire par ces hargneux-teigneux au grand coeur. Des blousons noirs comme les aime Franck Margerin. Pas révolutionnaire mais ça fait juste du bien par où ça passe !

En tout cas, bien plus que les BRITISH HAWAII groupe en vue des scènes parisiennes actuelles. Car si la recette se veut être un peu dans la même veine, on reste malheureusement sur sa faim. Ce garage rock, punk sur les bords, qui leur a valu d’assurer la première partie de Black Rebel Motorcycle Club à l’Elysée Montmartre ou d’être l’un des rares groupes français invités au festival belge Boutik Rock, tourne un peu en rond. Si leur musique peut attirer l’oreille sur un ou deux morceaux, elle finit par lasser, ne proposant pas vraiment d’évolution ni d’alternative, le côté relativement statique du groupe sur scène n’arrangeant pas les choses. Bref, très décevant.

18 février

Pour cette dernière soirée, le public a pris son temps pour venir et c’est malheureusement devant une salle clairsemée que les niçois d’AMADEUS TAPPIOKA entament leur prestation. Malheureusement ! Et bien oui, car le trio constitue l’une des bonnes surprises des Inaperçus. Certes le groupe est encore pétri d’influences, surtout au niveau du chant qui va lorgner de manière insistante du côté de Muse. Musicalement rock pour des paroles un peu naïves et féeriques, AMADEUS TAPPIOKA pioche à droite à gauche, la guitare sature, et le couple basse-batterie assure un tempo marqué. Si le tout reste encore un peu jeune et parfois brouillon, on sent néanmoins une sincérité et un plaisir à jouer qu’ils tentent de communiquer à un public parisien, attentif mais souvent statique. Ils arrivent pourtant à le faire participer, ici par quelques bulles de savon, là remplaçant les briquets par des portables (puisque de moins en moins de personnes fument). AMADEUS TAPPIOKA séduit et on devrait les recroiser très prochainement, passant un peu moins inaperçus.

SPY prend le relais pour un set relativement énergique dans une certaine tradition du rock français. Très carré et puissant, on reste pourtant sceptique car si les chansons sont là, l’ensemble est plutôt lisse. Les paroles pas forcément des plus pertinentes malgré les références multiples au cinéma, à la littérature. On ne retiendra finalement que le Christina Ricci et la reprise à toute blinde du Tainted Love de Soft Cell. Finalement pas grand chose !

Et pourtant pas si mal aux vues de la prestation donnée par MADAME DE C***. Si le groupe peut attirer sur disque (« Throw It »), on a cru un moment que cela pourrait être aussi le cas sur scène. Malheureusement pas plus d’une minute tant le spectacle donné fut affligeant. Un chanteur géant tout droit venu des Ramones qui s’en sortirait peut-être pas trop mal si on percevait sa voix derrière le volume sonore hallucinant de l’ampli d’un guitariste complètement déchiré, qui fait trois notes, prend la pose, s’assoit, retourne vers son ampli, le monte encore, la sangle lâche, il la remet en tanguant, etc Côté sono, ça s’agite, ça grogne et lorsque l’ampli pète ça s’énerve pas mal. L’organisation poste des gars qui baissent le volume et qui éjectent celui qui voudrait encore y toucher. Dans la salle, le public est dubitatif et n’applaudit plus beaucoup. On entend encore quelques fans qui soutiennent vaille que vaille MADAME DE C*** et son attitude pseudo-décadente qui, si la musique assurait derrière, pourrait effectivement faire partie du spectacle. Mais comme il n’y a rien, un seul mot me vient à la bouche : pathétique.

Chroniqueur