"> Eurockéennes de Belfort, vendredi 5 juillet - Live Report - Indiepoprock

Eurockéennes de Belfort, vendredi 5 juillet


Soleil éclatant, programmation qui, ce vendredi, faisait la part belle à la scène française actuelle, avec en plus quelques poids plus ou moins lourds et plus ou moins à la hauteur...

Ceux qui y sont déjà allés le savent, les « eurocks », au-delà des artistes proposés, c’est un site (superbe), une ambiance (festive et plutôt bonne enfant) et un bon moyen, pour peu que le soleil soit au rendez-vous (ce qui était le cas) de bien commencer l’été. Y être, c’est donc déjà l’assurance de passer un bon moment. Ce qui ne doit pas faire passer la musique au second plan, dérive qui guettait un peu le festival il y a cinq ou six ans, mais qui n’est fort heureusement plus de mise aujourd’hui. C’est donc un public véritablement venu voir et écouter les artistes qui prend place devant les deux filles de Deap Vally sur la scène de la plage. Une à la guitare, l’autre à la batterie, répertoire blues/rock, le duo ne met évidemment pas longtemps à évoquer les Whites Stripes comme modèle, ce qui n’enlève rien à une performance très réussie, avec une vraie complicité avec le public et qui lance idéalement la journée. Au rayon des influences, c’est le nom de Grandaddy qui vient à l’esprit quand le binoclard Matthew White vient présenter quelques titres de son nouvel album sur la « Green Room ». Les titres les plus planants ont un peu de mal à retenir l’attention, en revanche, quand l’ambiance se tend un peu et que la kyrielle de musiciens qui accompagnent notre homme peut pleinement se faire entendre, on adhère. Et comme le personnage semble plutôt sympathique, on lui accordera un satisfecit global. Direction la grande scène pour ce qui, pour certains, sera la faute de goût de la prog’ du jour, pour d’autres, l’occasion d’un moment de rigolade. Car disons-le tout net, les riffs poussifs des metalleux d’Airbourne, paresseusement repiqués sur ceux de leurs compatriotes d’AC/DC, l’efficacité en moins, ne seront pas à même de retenir l’attention une heure durant. En revanche, ç’aurait quand même été dommage de rater l’entrée en scène : la musique de « Terminator » en fond sonore avant que le groupe ne débarque au triple galop, déjà trempés de sueur avant d’avoir commencé, et que guitariste et chanteur ne prennent la scène pour une piste d’athlétisme et se mettent à l’arpenter comme des dératés. Sincèrement, c’était drôle…

C’est déjà le début de soirée quand débute la « séquence française » avec Lilly Wood &The Prick sur la « Green Room ». Sur disque, c’est de la pop inoffensive et, sur scène, tout pareil. Bien sûr, la voix féminine ne manque pas de personnalité, mais on ne peut pas en dire autant du son général, lisse comme le plat de la main. Conséquence, un set sans véritable saveur qui fait gentiment mouche auprès de ceux venus fredonner les quelques refrains qu’on peut entendre sur les ondes FM. Après cela, retour sur la grande scène avec le « mini-phénomène » Skip The Use. Encore une fois, difficile d’adhérer au côté un peu pompier de la musique du groupe. Difficile aussi de supporter la rhétorique un peu limite du chanteur quand il s’adresse au public. En revanche, le groupe prend indéniablement la mesure de la grande scène en se donnant à fond et parvient à faire participer une grosse partie du public au concert et non seulement les vingt premiers rangs comme ça arrive souvent sur cette scène aux dimensions hors-normes. Mais déjà la nuit tombe doucement et ça se presse devant la « Green Room » pour Woodkid, qui pourra se targuer d’être l’artiste le plus attendu de la journée si on se fie à la ferveur d’avant entrée en scène. Quant au concert lui-même, il va révéler là encore ce qu’on peut ressentir à l’écoute de son album « The Golden Age » : le son est très travaillé, souvent mis en scène, la gestuelle des percussionnistes notamment tenant presque de la chorégraphie, la voix particulière de Yoann Lemoine est à la hauteur et le tout est agrémenté de vidéos en fond de scène faisant défiler des cathédrales imaginaires. Indéniablement, ça à de l’allure et le public adhère, mais le sentiment de redondance des morceaux lasse un peu et le côté trop maîtrisé, trop millimétré, gêne un peu dans le contexte du live. Bref, l’album a divisé, le concert n’aura certainement pas réconcilié pro et anti.

Conséquence de rester jusqu’au bout devant un concert, quand le suivant a lieu sur la grande scène, il ne faut pas espérer être aux premières loges. C’est donc de très loin qu’on prend en route le concert des Smashing Pumpkins, ou du moins ce qui reste du groupe d’origine. Les écrans géants permettent toutefois de constater que le temps n’est pas tendre avec Billy Corgan, qui commence à sérieusement s’épaissir. Est-ce un hasard, la performance, en tout cas ce qu’on en perçoit, est un peu à l’image de son évolution physique : quelques beaux restes, des titres qui font toujours leur effet sur scène, et d’autres moments en pilotage automatique, quasiment pas d’échanges avec le public. Le concert typique d’une ancienne gloire qui gère son patrimoine… Changement radical ensuite sur la « Green Room » avec le set du nouveau phénomène annoncé de l’electro française Gesaffelstein. Volonté manifeste de minimalisme, notre homme étant seul sur scène devant ses platines, pas de surenchère dans les éclairages et un set abrupt, plutôt radical, et martial, des sonorités qui ne cherchent pas l’originalité mais vont droit au but, à la fois froides et dansantes. Pas évident de dire si la formule tiendra la route sur album, mais à suivre… C’est le milieu de la nuit, il commence à faire frais, mais il fallait encore garder quelques forces pour Archive sur la plage. Aussi protéiforme sur scène que sur disque, le groupe fait alterner voix féminines et masculines derrière le micro suivant les morceaux, l’ambiance varie entre rock neo-prog et electro, mais le concert trouve son unité dans la volonté du groupe de resserrer des morceaux qui, sur disque, peuvent friser le quart d’heure et de mettre en place un son dense, puissant, qui ne laisse certes pas filtrer beaucoup de respirations mais se révèle adapté au contexte d’un festival. C’est carré et, somme toute convaincant. Aux environs de 3 heures du matin, chacun pouvait s’en retourner repus de sons et d’images…

Rédacteur en chef