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La programmation de la onzième édition du festival normand n’était pas passée inaperçue, surtout dans le milieu indé/rock. Il faut reconnaître que cela faisait quelques temps que ce style avait prédominé. Comme bien souvent avec le festival, un temps au rendez-vous va parfaire le week-end prolongé…
Aux portes du festival lors du premier set, nous verrons les derniers instants tout de même du concert de Mnnqns. Emprunts d’énergie purement rock, le jeune groupe va délivrer un son garage rock parfaitement à propos pour se mettre dans le bain. Habités et en pleine forme, Le groupe aura parfaitement su introduire les 4 jours à venir. Le groupe sera suivi par le local de l’étape et acolyte d’Orelsan, Gringe. Une foule déjà impressionnante se sera massée pour l’occasion. Mais il nous aura manqué un vrai intérêt pour son flow pour vraiment nous impliquer, et nous serons loin d’avoir ressenti le même enthousiasme que nombre de nos partenaires de jeu. S’enchaîneront alors les prestations de Therapie Taxy et Angèle. Reconnaissons-le, nous aurons également suivi tout cela d’assez loin, néanmoins un set très pro et proche de l’album pour les premiers, beaucoup d’énergie pour la deuxième. Non déçu mais pas vraiment invités, nous attendons la suite avec beaucoup plus d’appétit. Alors, le virtuose australien John Butler et son trio entrent en scène. A l’image de ce qu’on leur connait, les compères vont nous livrer un concert plein. Émotion, énergie et qualité musicale hors norme nous auront vite enchantés. C’est alors que retentit le début de l’arpège d’Ocean, on peut parler de passage obligé ou de fan service, mais clairement pourquoi bouder son plaisir devant tant de classe, magie… On se déplace alors encore sur un nuage et quelque peu méfiant quant à la suite, Limp Bizkit. Eh bien, il n’y a pas eu d’unanimité, mais nous concernant, le groupe nous aura scotché, avec une énergie intact, une belle symbiose avec le public, et même une reprise de Smells Like Teens Spirits sous speed, presque improbable de peps. Tant et si bien que nous en oublions que Gossip, les suivants draineront du monde. Il faut reconnaître que deux premières piètres expériences de festival les concernant ne nous poussaient pas à nous empresser. nous déciderons donc de nous avancer au plus près du concert de clôture, Fat Boy Slim, un des quelques cadeaux faits aux quadras de l’assistance. Quelque part gagné d’avance, le bougre nous aura fait bouger et bouger. Sorti de l’aspect dancefloor par un artiste maîtrisant parfaitement la pratique, il aura peut-être manqué d’un peu d’imprévu, mais nous aurons clairement eu ce que nous étions venus chercher… Il est 2h30, il est temps de reposer la machine, le marathon commence tout juste !
Il n’était pas question de rater l’entrée de ce vendredi. Nous retrouvons en effet les Rouennais de We Hate You Please Die, et avions hâte de revoir leur prestation sous cette chaleur poussiéreuse. Eh bien, les conditions n’auront que bien peu entamé le rock bestial de nos amis, avec un chanteur toujours aussi déjanté et des musiciens, bien que plus placides, tout aussi nerveux sur leurs instruments. Encore une fois nous avons eu droit à un pur concert de garage rock déjanté comme on en raffole. Cela aura commencé fort, très fort. Alors s’annonce Fantastic Negrito, pour lequel il aura fallu s’enquérir de quelques recherches de streaming pour se convaincre que lui non plus ne se ratait pas. Et quel monstre de scène !!! Mélangez la classe folle d’un James Brown à l’attitude primale d’un Iggy pop, c’est exactement ce que donne ce cinquantenaire (on en reviens toujours pas) sur scène. Une soul punkisante qui n’aura mis que quelques secondes à embarquer le public. Cette sensation un peu inattendue de symbiose que l’on avait ressenti quelques années plutôt avec Seasick Steve dans un tout autre registre. Juste géniale et brûlante comme le soleil sur nos crânes au même moment, Fantastic Negrito restera un très grand moment de ce cru 2019. Nous ne bougerons plus de cette scène, passant allègrement notre tour sur Tamino, Talisco et Lomepal, les quelques sons perçus au loin ne nous poussant pas spécialement à revoir notre jugement. Au lieu de cela, nous nous gardons des places de choix en commençant par Balthazar. Auteurs d’un set alternant entre l’entraînant sur les morceaux rock et le bien moins prenant sur les morceaux plus pop, les Belges n’auront ni failli ni enflammé les foules. Au contraire d’un Bernard Lavilliers qui, il est vrai, ne se déplace jamais sans sa horde de fan conquis d’avance… Alors c’est très pro et maîtrisé malgré un retard à l’allumage assez marrant des musiciens à l’appel du patron. Mais malgré cette assurance sur scène et 70 ans bien sonnés, Lavilliers reste vraiment impressionnant autant par sa prestance scénique que par son spectre musical. Il aura eu aussi la bonne idée de piocher un peu loin que récemment dans son répertoire pour finir d’enchanter les quelques milliers de badauds présents. Alors, la nuit est tombée, Lomepal a démarré depuis peu au loin son concert, le public s’est déjà avancé vers la scène vide, dans une proportion impressionnante. De notre humble avis, certainement jamais vu à Beauregard. A l’avant, la moyenne d’age a quelque peu baissé, mais on reste bien au-dessus du public fraîchement bachelier. Et quand après une ovation impressionnante à leur entrée, Joey Starr et Kool Shen évoquent leur centenaire à eux deux, NTM assume totalement son public. On peut être moyennement emballé par NTM, on peut dans le fond aussi regretter de voir la bourgeoisie, coupette à la main, s’encanailler sur Paris Sous Les Bombes mais le groupe et ses guests (de Raggasonic à Lord Kossity, ils étaient tous là) auront livré un show en tout point grandiose. Tous les titres y sont passés, avec un Joey Starr en grande forme, un Kool Shen, un peu moins… Le nostalgique quarantenaire en a au moins pris « plein la tronche » dans ce grand moment hors du temps. Le temps de sortir de cette marée humaine, nous avons le temps d’ouïr le set démarrant de The Blaze, mais l’énergie n’y est plus, et demain, mon Dieu demain, IDLES + The Hives…
La fatigue pointant déjà le bout de son nez, nous aurons délaissé encore quelque sets ce jour… Le pogo d’une heure durant sous le garage abrasif de IDLES aura pourtant bien participé à réveiller les organismes. Comment décrire un concert des IDLES… Fou, sans pause, en accélération permanente, il s’agira sans aucun doute du concert le plus rock du week-end, dans sa plus pure tradition. Une longue pause nous amènera jusqu’à Ben Harper, oui les quarantenaires du public étaient à l’honneur… Mais, on ne cherche pas tous la même chose en festival, mais le blues serein de Ben nous aurait plus emballé en salle, sur un set où l’on prend le temps d’installer l’ambiance. Alors non, il n’a rien perdu de sa voix ou de son jeu de guitare, son bassiste est toujours aussi ahurissant, mais de jour, sur une petite heure, on aura eu du mal à ne pas penser à autre chose le temps des proses de notre ami de longue date. Le contraire eut été bien étonnant, les Hives s’imposeront comme l’exact opposé. En bon IDLES sophistiqué avec un peu plus de maturité et de profondeur, les Suédois vont donner exactement ce que l’on attendait d’eux. Le set à la fois furieux et contenu, au rythme parfaitement maîtrisé, teinté d’un brin d’humour et d’un jeu récurrent avec le public, serait à montrer dans toute School Of Rock. Un set qui aura fini d’achever les dernières traces de muscles non raides… Avoir programmé Mogwai à la suite, ne fut pas un cadeau pour les Ecossais, et c’est certainement de les avoir vus quelques fois qui nous poussera à ne pas répéter l’expérience, à chaque fois très bonne. A coup sûr, ces-dernières expériences ne s’étaient pas passées après un concert comme celui des Hives…
Nous voilà arrivé au bout du parcours quelque peu usé par les trois jours passés. Peut-être est-ce cela, mais cette journée sera traversée par un sentiment de lassitude latent. Bror Gunnar Jansson sera intéressant par moments, mais finira par lasser, à l’image de Ben Harper la veille. Jeanne Added sera égale à elle même dans l’énergie, profitant d’un public de plus en plus fidèle. Mais ni Cat Power ni Tears For Fears ne réveilleront nos sens. Nous misons donc tout sur Interpol, risqué en live. N’ayant pas démérité, mais n’ayant clairement pas donné le meilleur d’eux-même, à l’image d’une discographie qui ne s’améliore pas, Interpol finit d’achever notre avis, un étoile qui a explosé bien vite.
Voilà donc la fin de la session 2019 du festival. Si la journée du Dimanche fut moins emballante, en partie due à la forme fragile des quarantenaires (on y revient), ce fut un très grand cru. A son image, le festival cherche toujours un équilibre sur les différents styles musicaux, tentant parfois quelques risques. Donc comme à notre habitude, et comme l’ensemble du public, il y aura eu des pauses bucoliques couchés sur l’herbe d’une scène sans show, et c’est aussi ce que l’on adore dans ce festival. Convivialité, sourires et de sacrément bons concerts, ce fut encore mille fois le cas cette année !