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Le Pukkelpop 2015 était complet depuis belle lurette. Des places supplémentaires avaient même été remises en vente pour satisfaire la demande (ou piéger le marché noir, c’est selon). Pourtant, sur papier, l’affiche était bien loin d’être aussi alléchante que les autres années. Est-ce la crise qui a obligé les organisateurs à revoir leur programmation à la baisse ou une simple volonté d’assurer la rentabilité du festival ? La réponse, personne ne la connaît et ce ne sont pas les organisateurs qui nous balancent leurs statistiques qui vont assouvir notre curiosité. Au total, pas moins de 66.000 festivaliers ont foulé quotidiennement les prairies asséchées de Kiwiet, dans la banlieue d’Hasselt, non loin de Liège et Maastricht. Pendant ces 3 jours, sur 7 scènes (oui, on ne compte pas les Boiler Room et Dance Hall qui ne font que répéter des bruits assourdissants essentiellement de basses, et ce 24 heures durant), 255 groupes ont été programmés… dont 62 originaires de Belgique… Là encore, la question se pose : réalité économique ou émergence internationale de la scène musicale belge ?
Bref, une fois que l’on a accepté de vivre sans ces réponses et que l’on se penche sur l’affiche en détail, le constat saute aux yeux… On arpentera le sol flamand seulement le samedi… Sur papier, il y a du beau monde pour faire la fête (The Subways, The Offspring), des artistes émergents qu’on apprécie (Viet Cong, Allah-Las), des talents qui se confirment (Tame Impala, The War On The Drugs) et surtout, la reformation de l’année : Ride. Pour ne pas faillir à sa réputation, Viet Cong déçoit sur scène. Bien que les compositions studio du quatuor canadien soient impeccables, il semblerait que ceux-ci aient bien du mal à apprivoiser le live. S’en suit Allah-Las. Si la première moitié du set sent bon le rock psychédélique des années 60, la seconde partie, elle, nous ennuie et le groupe a tendance à vouloir endormir complètement le public, déjà bien assommé par le soleil et la chaleur. Ensuite, on frôle le pire avec The War On Drugs. Le public ne les connaissant que de nom, il faut faire abstraction du je-m’en-foutisme ambiant pour profiter des compositions du groupe de Philadelphie, dont Kurt Vile était membre fondateur. On arrive même à se laisser transporter dans des rêves incongrus sur Baby Missiles ou Under The Pressure. Mais ça s’arrête là.
Ensuite, la digestion, nous l’opérerons sur The Offspring… À regarder autour de nous, il est impressionnant de constater le succès toujours aussi florissant du groupe punk-mainstream auprès des jeunes… À croire que la quasi-totalité des festivaliers n’a pas encore atteint la majorité, mais connaît sur le bout des doigts les paroles des chansons qui nous faisaient sautiller 20 ans plutôt. Eh bien que certains boudent leur plaisir ou continuent d’écrire qu’ils n’arrivent pas à comprendre ce succès, nous, on acceptera le côté ‘grand public’ des Californiens… En fait un groupe, qui malgré son autosatisfaction même pas cachée, donne tout ce qu’il a sur scène, et ce bien que les membres fondateurs encore présents (Dexter Holland, Noodles, Greg K) aient la cinquantaine. Sur fond de Self Esteem justement, nous nous rendons au Marque pour Tame Impala dont on se demande si la prestation scénique sera à la hauteur de la qualité de leur dernier album, « Currents« . Après une courte intro, le groupe entame son concert avec Let It Happen et malgré la longueur du morceau, on frissonne du début à la fin. Enchaînant l’ancien et le récent, le quatuor australien déroule un set parfait. Le son est merveilleux, le show visuel psychédélique nous fait perdre toute notion de réalité et l’heure de concert réservée file à toute allure… À tel point qu’on rage de n’avoir droit qu’à soixante minutes de ce pur bonheur et que nous ne nous sommes même pas rendu compte que la nuit était tombée sur la plaine de Kiewit.
Peu de temps pour respirer et déjà Alt-J prend place sur la scène principale. Dubitatif quand au statut de tête d’affiche, la formation de Leeds assurera tout de même une prestation correcte sans vraiment percuter. Le public commence à fatiguer, la fin est proche.
Et pour clôturer cette 30ème édition du Pukkelpop, nous nous dirigeons sous le club où le constat est sans appel : Ride n’attire pas la foule. Le ‘Club’ n’est déjà pas grand et on ne s’y bouscule pas. Il est aisé de se faufiler pour trouver une place à proximité de la scène. Qu’à cela ne tienne, si les jeunes bourrés d’acné juvénile (signification du Pukkelpop) ne désirent pas découvrir les précurseurs du shoegaze, tant pis pour eux ! Lorsque le groupe entre en scène après une intro musicale digne des grosses pointures du rock, le public, forcément quadragénaire et plus, acclame les revenants. Bien que ne montrant aucun signe de complicité, on sent que Mark Gardener et Andy Bell apprécient de jouer de concert. La setlist est composée essentiellement de morceaux remontant aux débuts du quatuor, de Drive Blind à Like A Day Dream en passant par Chelsea Girl. Le groupe balancera aussi Black Nite Crash, leur dernier single avant séparation, seul morceau de « Tarantula » qui fut apprécié de la critique, l’album étant même retiré de la vente suite aux critiques négatives. Là aussi, une heure c’est trop court et on peut juste s’autoriser à rêver d’un éventuel retour en studio du groupe pour nous offrir un nouvel album.