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Prenons soin tout d’abord de rappeler à ceux qui n’ont pas encore mis les pieds à la Maroquinerie que ce lieu s?’vère particulièrement chaleureux et convivial. Ceci tient à la fois au vaste bar du rez-de-chaussée que de la proximité du public avec les groupes sur scène. Tout ceci concorde avec la qualité de la programmation. Remarque parfaitement désintéressée, cela va de soi. Dès lors, pour ce qui nous concerne, le sifflement de tympan, l’ffiche du jour remplie parfaitement sa tâche, à commencer par Dead Meadow, heureuse première partie.
Ce trio particulièrement singulier présente par la même occasion les titres de son nouvel album , »Feathers ». Les musiciens arborent une coupe de cheveux que l’on avait pas vue depuis les Stone Roses en 89 : au bol, ébouriffée, moche, sauf pour le batteur, barbu. Leur physique malingre suggère une alimentation davantage tournée vers la prise répétée d’acide que vers l’onglet de boeuf saignant. La musique est à leur image, une rencontre entre le Ride de « Nowhere » (pour la voix éthérée, mais plus lascive) et un rock épais noyé dans la réverb et la fuzz. Tous les morceaux reposent sur le même modèle de riff bancal, le tout très étiré et parcouru de solos (la wahwah est reine) : le grand carnaval psychédélique. Bref, lorsque le chanteur annonce le dernier titre, il reste en fait un quart d’heure de concert. Probablement rébarbatifs pour certains, captivant pour d’autres. Mais de toute façon, très éloigné de ce qui va suivre.
Le concert de Trail Of Dead débute comme le récent « Worlds apart », une intro à la Carl Orff et le titre Will you smile again ? comme avertissement : le punk-rock est prépondérant dans la musique du groupe, surtout en live. Mais l’aspect le plus frappant, autant visuellement que pour nos oreilles, c’est que le groupe tourne bien avec deux batteurs. Deux brutes. Synchronisées. Les cavalcades frénétiques qui forgent le style de Trail Of Dead sont ici décuplées et ponctuées par de retentissants coups de cymbales, pour un visuel très théâtral : les baguettes levées bien haut avant qu’elles ne s’abattent violemment, très impressionnant. A ceci s’ajoutent deux guitares, une basse et un synthé (tenu par le leader de The Black). Des trois membres fondateurs se sont donc ajoutés trois autres musiciens. La set-list s’appuie essentiellement sur les morceaux les plus puissants du groupe et délaisse les titres les plus pop du dernier opus. Certains lui trouvaient à sa sortie des relents du Floyd. Nous en sommes très loin. Pas vraiment de délicatesse mais une furia qui s’accroît à mesure que le concert progresse, avec ses aléas chaotiques : comme lorsque le batteur additionnel jette son charley par terre ! Pour le reste, le groupe semble particulièrement excité et heureux de jouer à Paris, notamment le batteur/guitariste (il y a alternance entre lui et l’autre guitariste) qui gesticule tout le long du set. Mais le problème essentiel du concert est la voix quasi-systématiquement fausse du début à la fin.
En définitive, l’intensité est constante, même lorsque Jason Reece entonne How near how far à la guitare, seulement accompagné d’un piano. Très beau et heureusement mieux chanté. Après cela, on imagine bien le groupe présent sur de gros festivals d’été. Leur musique concorde avec ce type d’événement : grandiloquent, fédérateur et intense. Et les deux batteurs sont des atouts de choix. A (re)voir, malgré les sifflements persistants.