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Patrick Wolf, qui ouvre cette soirée, débute par un chant a capella. Sa voix, située entre celles de Jeff Buckley et Morrissey, s’échappe d’un grand corps déguingandé. Par la suite, il s’accompagne de mélodies approximatives jouées sur une toute petite guitare ou au piano et un second acolyte le rejoint à la batterie. Vêtu d’un short en jean et d’une chemise découpée aux manches, il attaque même un violon de façon assez douloureuse. Dans ce bazar musical, Patrick ose faire une reprise de Kate Busk (Running Up That Hill), assez personnelle, sur laquelle les mélodies de voix semblent posées au gré de ses sensations peu rythmées. Très mélancolique, il dédie une de ses chansons à Paris et emporte ainsi l’adhésion d’une partie du public.
Avant que les lumières ne s’allument, Spleen commence avec des sons échantillonnés comme une vieille boîte à musique déglinguée. Ils sont trois dans le noir. Garçons ou filles, on ne sait pas. Sur les scansions de Spleen, une fille portant cagoule s’approche du piano. Un violon commence à jouer hors de scène et la voix ancienne de Bianca arrive, portée par des sons de mer et de coquillages brisés. Les mélodies tiennent à la fois des comptines de l’enfance et des vieux titres blues ou jazz du sud des Etats-Unis.
Le concert de CocoRosie se déroule totalement dans le noir, illustré par des vidéos et petits films d’animation créés et réalisés par les deux soeurs. Ces dernières font participer le public, le font hurler, taper dans les mains. Parfois, Spleen se couche aux pieds de sa belle. Les deux « human beat box » jouent une sorte de duel en forme d’intermède. Le nombre des musiciens (ils sont 6) force la réinterprétation des titres de l’album « La maison de mon rêve » et cela fonctionne si bien que le public en redemande.
Les histoires que les créatrices de CocoRosie nous content, à la fois engagées et irréelles, semblent se dérouler au long de leur vie et donnent la sensation de tout connaître d’elles. Elles nous font entrer dans leur intimité, dans leur monde fait de douceur et de mélancolie, de magie et de douleur. Des petits riens qui font que nous sommes humains. Comme si elles nous offraient leur journal intime écrit à quatre mains. Le violoniste chante parfois avec elles et sa voix rend l’interprétation de Beautyfull Boys superbe.
Le groupe au complet termine le set au devant de la scène, à danser dans une demi-lumière sur un hip-hop endiablé. Pour le rappel la lumière revient enfin, la projection est terminée. Certains ont quitté la salle en cours de route : loin des poncifs, ce groupe risque bien de déchaîner les passions, car la vision qu’ont ces jeunes femmes du monde qui les entoure est dérangeante.