Second album du duo electro originaire de Belfast.
Cela fait désormais un an qu’il est impossible d’aller danser en club. Ce n’est pas un clubber invétéré qui dresse ce constat mais ça n’en est pas moins accablant de se dire que les mois passent et qu’un pan entier de la culture urbaine est à l’arrêt. C’est dans ce contexte qu’est sorti « Isles », second album du duo composé par Andrew Ferguson et Matthew McBriar, il y a quelques semaines. Certains esprits chagrins n’ont d’ailleurs pas pu voir au-delà de ce constat et ont souligné à quel point écouter un album de Bicep à la maison, en sachant qu’il leur était impossible de se produire en DJ set, était décalé. Pourtant, considérer Bicep comme un duo fatalement amputé de son moyen d’expression naturel n’est pas leur rendre justice. Ecouter « Isles », avec des morceaux comme Lido ou Sundial nous fait en effet vite comprendre que le duo a pleinement pensé « Isles » comme un album à part entière, construit avec ses nuances, ses temps forts et ses moments plus posés, et pas comme un quelconque DJ mix. En cela, le groupe se place dans les pas de formations telles Underworld, Leftfield ou Orbital qui, dans la seconde moitié des années ’90, ont contribué à faire précisément sortir l’electro de son aspect unique de musique de club pour venir gagner sur disque ses lettres de noblesse.
La conséquence avait alors même été que, petit à petit, l’electro s’était éloignée des dance-floors pour se transformer en musique d’avant-garde. Avec ce second album, et c’est cela qui fait son importance, Bicep s’inscrit dans la lignée des groupes electro qui écrivent de vrais albums sans laisser de côté leurs racines club. En termes de style, « Isles » n’est pas un album qui cherche à bousculer l’electro mais plutôt une synthèse de ce qu’elle a pu nous offrir au cours des dernières décennies. De la house à l’abstract hip-hop en passant par des passages jungle, Bicep intègre tout avec une belle virtuosité. Et, pour plus d’incarnation, pour la touche organique, peut-être, le duo convoque des voix, à coups de samples sur Apricots ou Lido, ou en recourant à de belles voix féminines éthérées sur Saku, X ou encore Rever. Entre fibre mélodique, ambiances nocturnes et oniriques, variations des rythmes, art de la boucle, Bicep réussit un album qui a sacrément de la gueule.
De fait, sur « Isles », on peut tout faire ou presque. Au choix, le mettre très fort et danser dans son salon, l’écouter au casque et dodeliner doucement de la tête, fermer les yeux et se transporter ailleurs par l’esprit. Parmi les temps forts de l’album, on retiendra les excellents et même classiques immédiats que sont Atlas et Apricots, les machines bien huilées que sont X et l’addictif Rever avec sa boucle lancinante qui s’installe en milieu de morceau. Un vrai disque de genre, peut-être le meilleur qu’on ait pu entendre ces dernières années, apte à séduire au-delà du cercle des aficionados.
- Publication 1 647 vues15 mars 2021
- Tags BicepNinja Tune
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