Ca fait déjà un bout de temps que Nick Cave pourrait se reposer tranquillement sur ses lauriers et s’honorer d’une oeuvre conséquente et impeccable. Pourtant, ces dernières années, il a écrit trois B.O de films, publié le 14ème album des Bad Seeds, sorti un livre et formé Grinderman, qui édite donc aujourd’hui son second album. […]
Ca fait déjà un bout de temps que Nick Cave pourrait se reposer tranquillement sur ses lauriers et s’honorer d’une oeuvre conséquente et impeccable. Pourtant, ces dernières années, il a écrit trois B.O de films, publié le 14ème album des Bad Seeds, sorti un livre et formé Grinderman, qui édite donc aujourd’hui son second album. A ce niveau, le risque principal est donc celui de la surchauffe et de l’empilement, ce qui aurait été un comble pour un artiste qui a toujours eu le souci de la cohérence de son travail et pris soin d’aller de l’avant sans balayer les acquis. Pour éviter cet écueuil, Nick cave a donc fait en sorte de mettre de l’ordre dans sa frénésie créative : les B.O sont un exercice à part, Grinderman est un groupe parallèle entièrement autonome des Bad Seeds dans son approche musicale et son fonctionnement.
Bien sûr, il existe des passerelles entre ces différentes entités, l’urgence du premier album de Grinderman ayant eu des répercussions sur le son de « Dig, Lazarus, dig », le dernier album en date des Bad Seeds. Nick et ses acolytes avaient aussi évité de nous faire le coup des mecs qui avaient fait table rase du passé pour sortir un premier album totalement affranchi. Au contraire, ils avaient plutôt tourné ce concept en dérision en jouant les quadras en pleine « middle life crisis » qui exorcisaient le passage du temps en copiant les ados qui font du rock dans leur garage. Tout cela n’empêche pas que Grinderman présente cependant pas mal de caractéristiques d’un groupe qui prend ses marques et s’affirme le temps du second album venu. Ainsi, si le premier opus valait avant tout par sa capacité à capter deux trois idées et à les coucher sur disque en gardant un côté brut et jouissif, « Grinderman 2 » s’affirme comme l’album d’un groupe où chacun prend ses marques et impose sa patte.
Première conséquence, les compositions prennent de l’ampleur, le son est toujours aussi brut, l’électricité en avant, mais avec une touche d’emphase et de groove en plus. L’entrée en matière est ainsi absolument parfaite, avec un Mickey Mouse and the goodbye man qui s’avance tel un tigre qui guette sa proie avant de la dévorer et un Worm tamer métronomique, radical et implacable. Sur le reste de l’album, Grinderman explore un peu toutes ses humeurs, jouant l’évidence sur le fédérateur Heathen child, calmant le jeu sans laisser la tension retomber sur When my baby comes, s’amusant à faire souffler un petit vent psyché sur Palaces of Montezuma. Mais toujours l’urgence et la tension demeurent, Evil ou Bellringer blues torturant le blues dans tous les sens.
Mais ce qui attire peut-être davantage l’attention, c’est la contribution de chaque musicien à l’édifice. Warren Ellis apparaît ainsi en maître de cérémonie en triturant les sons, de guitare, de clavier, dans tous les sens, rendant l’ensemble sans cesse mouvant. Jim Sclavunos est lui d’une précision et d’une énergie bluffante derrière ses fûts et les lignes de basse de Martyn Casey, à la fois lourdes et souples, que ce soit sur Worm tamer ou Kitchenette, donnent une densité sonore à l’ensemble à couper le souffle. Aussi bien épaulé, Nick Cave, sans doute le chanteur de blues, voire le chanteur tout court, le plus accompli de sa génération, n’a plus qu’à déployer son chant le plus primitif, en donnant au passage le sentiment de prendre un pied formidable à le faire. Dans ce registre, Mickey Mouse…. et Evil mettront l’auditeur à genoux à la première écoute. Cerise sur le gâteau, Nick Cave toujours nous gratifie dans les textes d’une véritable fête des mots et de formules désopilantes. Une telle fraîcheur, un tel accomplissement dans le plaisir filent une pêche phénoménale. Et on en redemande.
- Publication 492 vues27 septembre 2010
- Tags GrindermanMute
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Tracklist
- Mickey Mouse and the Goodbye Man
- Worm Tamer
- Heathen Child
- When My Baby Comes
- What I Know
- Evil!
- Kitchenette
- Palaces of Montezuma
- Bellringer Blues