Huit ans séparent l’album "Courtesy of choice" de "Blood, Looms and Blooms". Des années marquées par deux terribles épreuves. Il était dès lors compréhensible que Leila prenne ses distances avec la scène musicale. Mais c’était sans compter sur la force cathartique de la musique. Le fait de composer l’a ramenée à la vie pour notre plus […]
Huit ans séparent l’album "Courtesy of choice" de "Blood, Looms and Blooms". Des années marquées par deux terribles épreuves. Il était dès lors compréhensible que Leila prenne ses distances avec la scène musicale. Mais c’était sans compter sur la force cathartique de la musique. Le fait de composer l’a ramenée à la vie pour notre plus grand bonheur mais non sans douleur. Cet album est sans conteste fortement marqué par ces évènements douloureux, mais il en ressort aussi une irrépressible envie de vivre. L’art peut guérir et cet album nous en apporte la preuve la plus éclatante.
L’album oscille entre mélopées mélancoliques et trips extatiques, recueillement et extase, l’euphorie étant ici déplacée. Leila est une mélodiste hors pair, électronicienne ciselant sa musique comme une dentellière. Les beats bien présents s’ordonnent harmonieusement avec de longues plages mélodiques, dans un beau chassé-croisé. Leila triture sa musique, la secoue dans tous les sens, mais elle n’oublie jamais la cohérence. Rarement, l’électro avait acquis de telles lettres de noblesse.
Le très atmosphérique Mollie en ouverture confirme la règle et invite au rêve. Durant toute l’écoute de l’album, l’auditeur, en apesanteur, évolue dans un monde parallèle, loin des rumeurs du monde. Se laissant complètement happer par cette musique trop rare, envoûtante et hypnotique. Mettle rappelle les débuts de Massive Attack. Elle s’accompagne comme eux de vocalistes hors pair. Roya Arab chante divinement bien sur les mélopées mélancoliques de Daisies, cats and spacemen, et passe de soulsister au statut d’une chanteuse épanouie. L’autre fidèle Luca Santucci entonne des Teases me et Ur train nonchalants. Norwegian wood, reprise des Beatles, sonne comme si Eric Chenaux avait pris la clé des champs d’un électro douillet. Leila s’évade seule sur Carflos, instrumental tout en nappes synthétiques. Deux autres morceaux hors normes méritent le détour, The Exotics, ou les rythmes syncopés se mêlent à la cantatrice Seaming To, et Lush Dolphins, ou la magie opère grâce à la simulation parfaite de chants de dauphins. Deflect paraît plus accessible, et ce sentiment est renforcé par la présence de Martina Topley-Bird, chanteuse affirmée. Mais sa prestation vocale saccadée donne un rythme particulier à ce morceau. Sur le discret mais très beau Young ones, Leila laisse tomber les machines et la modernité pour un mini orchestre de musique de chambre, c’est forcément sublime. C’est à un vrai dialogue amoureux que l’on assiste à l’écoute de Why should I ?, duo parfait entre Martina Topley-Bird et Terry Hall, deux voix de velours agrémentées d’un clavier malicieux.
Cet album telle une bulle protectrice loin de l’exubérance des sentiments, est une œuvre pudique. Cet album n’a pas pour but d’apitoyer sur le sort malheureux de Leila, il n’est pas geignard ou tragique. Il touche cependant en plein cœur, car on sent les efforts qui ont été entrepris pour sa naissance. Il est l’œuvre pudique et très personnelle d’une artiste farouchement indépendante, d’une force de caractère imparable, malheureuse mais aussi très heureuse de pouvoir vivre pleinement de sa musique, laquelle l’abreuve et nous laisse comblés, émus, heureux et admiratifs devant tant de courage et de talent.
Tracklist
- Mollie
- Time To Blow
- Little Acorns
- Daisies, Cats and Spacemen
- Mettle
- Teases Me
- Carplos
- The Exotics
- Deflect
- Norwegian Wood
- Lush Dolphins
- Ur Train
- Young Ones
- Why Should I?