Il y a une époque, pas si lointaine, plus très proche non plus où, en Angleterre, l'année musicale s'ouvrait avec le premier album d'une nouvelle sensation annoncée, et tout plein de petits clones débarquaient dans les mois, voire les semaines suivants.
Ce temps est révolu, on ne le regrette pas, et si 2013 aura globalement été un bon cru pour les premiers albums venus d’outre-manche, c’est en partie parce qu’ils n’ont pas grand-chose en commun. Toutefois, peut-être par déformation, à l’écoute du premier opus de London Grammar, on ne peut s’empêcher de faire un rapprochement avec le premier album de Daughter, sorti en début d’année, et qui nous accompagne encore aujourd’hui. Les deux groupes partagent en effet un même goût pour une mélancolie sophistiquée et, surtout, possèdent tous deux une voix, celle d’Elena Tonra pour Daughter, celle d’Hannah Reid chez London Grammar, qui retient immédiatement l’attention. Accessoirement, on s’amusera que l’album de Daughter s’intitule « If You Leave », celui de London Grammar « If You Wait »…
Mais comme le veut le proverbe, comparaison n’est pas raison et, encore une fois, il se révèle exact. Car si chez Daughter la voix est un élément qui met encore plus en valeur les arrangements et la beauté des mélodies, chez London Grammar, la voix d’Hannah Reid fait tout ou presque. Certes, les arrangements sont modernes et proposent un amalgame plutôt raffiné entre accords de piano, souvent, de guitare parfois et éléments electro diffus, mais on a quand même très vite l’impression que le but premier est de faire de la place à cette voix qui, il faut le reconnaître, ne manque pas de ressources, Hannah Reid étant capable de couvrir à peu près tous les registres. Bien sûr, on y verra là un atout de taille pour London Grammar, sans manquer de pointer une limite. Car, aussi belle soit-elle, une voix n’est jamais aussi touchante et pertinente que quand elle se pose sur un morceau qui brille par son écriture.
Des morceaux bien écrits, sur « If You Wait », il y en a. Stay Awake est ainsi une ballade toute simple, où tout est sa place, et à laquelle Hannah Reid n’a aucune difficulté à offrir un vrai relief, sans jamais forcer. Un peu plus loin, Wasting My Young Years distille un spleen étudié, dramatisé juste ce qu’il faut, avec un très léger crescendo sur le refrain. On citera encore Metal & Dust, très évident dès la première écoute, à la fois planant et, par instants, presque dansant. En revanche, il y a d’autres moments où Hannah Reid se voit contrainte au remplissage. Remplissage esthétique, classieux, mais qui, inéluctablement, finit par lasser. La reprise du Nightcall de Kavinsky est peut-être le moment qui illustre le mieux cet écueil. Sans surprise, le groupe ralentit le tempo, s’appuie sur un tout petit accord de piano. Au bout de deux minutes, tout est dit, alors Hannah Reid allonge la sauce en montant d’un octave, en répétant la même phrase encore et encore tout en glissant quelques vocalises supplémentaires. Que du très convenu… Sur le reste de l’album, il n’y pas grand-chose à ajouter : rien n’est vraiment mauvais, rien n’est transcendant non plus. Disons qu’au mieux, des morceaux comme Hey Now ou Shyer s’écoutent poliment, qu’au pire, Sights ou Interlude traînent leur emphase. Bref, plutôt que faire le bilan de cet album, ce qui vient à l’esprit est de considérer deux options pour l’avenir proche de London Grammar : soit ils deviennent un véritable groupe, soit Hannah Reid se lance très prochainement dans une carrière solo. Ce qui pourrait bien être le plus probable.
- Publication 852 vues4 décembre 2013
- Tags London GrammarWarner Music
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London Grammar sur la route
Tracklist
- Hey Now
- Stay Awake
- Shyer
- Wasting My Young Years
- Sights
- Strong
- Nightcall
- Metal & Dust
- Interlude - Live
- Flickers
- If You Wait
- Help
- Darling Are You Gonna Leave Me
- Help Me Lose My Mind
- High Life
- Maybe
- When We Were Young