Sinistre dans son intitulé, bienséant dans son écoute...
La naissance et la mort. Voilà deux instants où les humains sont placés sur un même pied d’égalité, quelque soit leur statut, leur origine ou leur couleur de peau. L’entre-deux existentiel, lui, est propre à chacun et condense un parterre de sentiments contraires qui, dans le pire des scénarios, conduit l’être à anticiper sa fatale déchéance. Visiblement inspiré par le sujet, MONEY, émérite formation installée dans la foisonnante Manchester, a axé son second album sur ce fil instable qui unit parfois l’homme et ses idées auto-destructrices. Bien lui en a pris.
Tel l’objet tranchant planté au milieu du front, le groupe britannique s’est entiché d’une réelle fascination pour le désenchantement, les blessures de l’âme et les libérations de celles-ci. Une sorte de pamphlet douloureux de l’existence, pendu aux espoirs d’un bonheur perceptible et de l’infinie quiétude desquelles l’individu recherche intarissablement les empreintes.
Étonnement, les morceaux introductifs (I Am The Lord, I’m Not Here) s’ouvrent sur des tons dépaysants et colorés, dessinés à partir d’inspirations typiquement orientales. En contraste, les émotions poignantes et mélancoliques font déjà leurs premiers ravages. Ces dernières gagnent ensuite en profondeur sur l’intense You Look Like a Sad Painting On Both Sides Of The Sky, sa mise en scène épurée et sa déchirante poésie participant au premier instant sublime de l’album. Son suiveur Night Came s’inscrit de facto dans cette foudroyante tornade de sentiments, magnifié en un poignant final par des boucles répétitives et ses chœurs divinatoires.
Le timbre inégal, désabusé et plaintif du leader Jamie Lee accentue en relief cette dimension enténébrée des à-propos, à l’image du presque éponyme Suicide Song, esquisse d’un acte inexplicable où la rédemption semble pourtant ardemment désirée. Vient le moment où l’espoir renaîtrait de ses cendres, où l’idée idyllique d’un monde meilleur annihilerait tous maux internes (Hopeless World) et que les aspirations d’une destinée moins morne soient à jamais exaucées, quitte à croire en sa bonne étoile (I’ll Be The Night).
A l’instar d’une oeuvre de but en blanc monumentale, les deux derniers titres All My Life et A Cocaine Christmas & An Alcoholic New Year balayent également un large spectre sentimental, de la plus simple beauté à l’obscur de l’être, articulés autour des contrastes existants entre désirs et réalité, tout autant qu’entre bonheur et déchéance. Des dissonances parfaitement mises en lumière par MONEY, un de ces groupes dont l’aura et les bouleversantes compositions ne cessent de vous retourner agréablement les tripes. Preuve ultime, rares sont les albums spleenétiques à nous offrir tant de satisfaction. « Suicide Songs » et sa splendeur saisissante font aujourd’hui partie de ceux-ci…
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- Publication 702 vues24 février 2016
- Tags MONEYBella Union
- Titres recommandés I Am the Lord You Look Like a Sad Painting on Both Sides of the Sky Night Came I'll Be the Night A Cocaine Christmas and an Alcoholic's New Year
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Tracklist
- I Am the Lord
- I'm Not Here
- You Look Like a Sad Painting on Both Sides of the Sky
- Night Came
- Suicide Song
- Hopeless World
- I'll Be the Night
- All My Life
- A Cocaine Christmas and an Alcoholic's New Year