Second album du side project de la moitié de Radiohead.
Y aura-t-il un jour un nouvel album de Radiohead, personne n’en sait rien. Cependant, la sortie de ce second album de The Smile, le projet de Thom Yorke et Jonny Greenwood, soit la moitié de Radiohead, flanqués du batteur Tom Skinner permet quelque peu d’en douter. Car les membres du groupe d’Oxford se sont déjà auparavant dispersés dans des projets annexes, mais, chaque fois, pour mieux revenir ensuite au bercail et remettre le bleu de chauffe. Dans le cas de The Smile, non seulement le projet implique deux membres, mais c’est la première fois qu’un projet annexe prend la tournure d’une véritable carrière sur le long, ou au minimum moyen terme. Le premier album de The Smile est en effet paru il y a un an et demi, une série de concerts a été donnée de façon quasiment concomitante et voilà donc qu’aujourd’hui sort déjà un second album.
Mais ce qui est encore plus troublant, c’est que, logiquement, vient la question : Thom Yorke et Jonny Greenwood ont-ils clairement changé d’orientation musicale ou bien trouvent-ils dans The Smile une formation et une façon de fonctionner qu’ils ne trouvaient plus dans Radiohead ? Et là, avec « Wall Of Eyes », la seconde hypothèse tient clairement la corde. Car si, sur le premier album de la formation, on pouvait considérer que la présence de Tom Skinner, batteur aux compétences clairement au-dessus de la moyenne, à la présence très affirmée (pour avoir assisté à une prestation live du groupe, nous pouvons en témoigner), et à l’univers musical différent, puisqu’il vient du jazz, ouvrait d’autres horizons à ses deux comparses, ici, c’est moins évident. Le premier aspect est que « Wall Of Eyes » étant le second album du groupe, celui-ci ne peut plus faire office de respiration, de projet plus ou moins en roue libre sur lequel ses membres se font avant tout plaisir en laissant libre cours à leurs inspirations sans trop se soucier de « cadrer » l’ensemble. « Wall Of Eyes », avec ses huit titres et 45 minutes, soit une certaine concision, semble d’ailleurs répondre à cette logique.
Musicalement, si l’album s’inscrit dans la lignée de son prédécesseur, on sent une volonté de resserrer un peu les lignes. Ainsi, si Tom Skinner est toujours à l’honneur, la batterie étant très présente au niveau rythmique et au niveau sonore dans la production, ses interventions sont plus dans la sobriété et une certaine sécheresse formelle. Thom Yorke, de son côté, joue, comme on commence à en avoir l’habitude depuis un bon bout de temps maintenant, de sa voix de tête et de ce phrasé qui semble toujours avoir sa volonté propre, un peu comme s’il improvisait au fur et à mesure du morceau. Quant à Jonny Greenwood, on le sent à l’aise dans ces compositions qui, naturellement, s’émancipent d’une structure couplet/refrain. Sans aller trop loin non plus, et c’est à cet égard que « Wall Of Eyes » est un album un peu plus bridé que « A Light For Attracting Attention ». Et, objectivement, on se demande un peu si Radiohead aurait fait quelque chose de radicalement différent…
Car « Wall Of Eyes » synthétise à peu près toutes les marottes de Yorke et sa bande depuis le début des années 2000. I Quit est ainsi une ballade ambient, sur laquelle des arrangements de cordes viennent se greffer sur des arrangements métronomiques. Friend Of A Friend est une autre ballade doucement onirique, qui nous place là encore en terrain connu, avec quelques accords de piano, et une intonation légèrement jazzy, mais qui pour le coup n’a rien d’aventureux ni d’audacieux. On retrouve aussi les aspects les plus agaçants de Radiohead, dans leur période où, à trop vouloir s’éloigner d’une forme pop classique, ils finissaient par se parodier en troussant des morceaux hermétiques et répétitifs qui tournaient à vide. La seconde partie de Under Our Pillows suscite surtout de l’ennui. Bending Hectic, la pièce la plus complexe de l’album, est quant à elle un bon résumé des forces et des faiblesses de l’album. La première partie, mélodiquement très soignée, séduit, mais la trame est usée jusqu’à la corde et on tombe dans la torpeur quand, soudain, le morceau bifurque pour laisser place à un cataclysme inattendu de guitares. Un final clairement salutaire. Mais, à la fin, que faut-il retenir de cet album ? Qu’il a ses bons moments, d’autres beaucoup moins. Ca c’est pour la forme. Sur le fond, on peut retenir que, d’un point de vue musical, Radiohead s’est désormais dilué dans The Smile. Chacun dira si c’est une bonne ou une mauvaise nouvelle.
- Publication 1 141 vues29 janvier 2024
- Tags The SmileXL Recordings
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Tracklist
- Wall Of Eyes
- Teleharmonic
- Read The Room
- Under Our Pillows
- Friend Of A Friend
- I Quit
- Bending Hectic
- You Know Me!