The Twilight Singers

Greg Dulli a vingt-cinq ans de carrière et deux groupes cultes à son actif, dont les Afghans Whigs, qui produisirent cinq albums en dix ans d’existence, entre 1991 et 2001. L’un des groupes les plus marquants de ces années là, intense, intègre, à la mesure de son chanteur à la pensée baroque et dramatique. "Dynamite Steps" est le cinquième disque de son second groupe, les Twilight Singers (qui fait suite à "Powder Burns" paru en 2006).

Seul membre permanent de cette formation, Dulli sonne toujours comme s’il pouvait tout quitter pour les êtres qu’il chérit dans ses chansons. Sur Wave, aux abois : « Toi et moi pourrions aller n’importe où »… Il joue ici et comme toujours des limites de sa voix pour rendre vraies ses histoires, partageant ses énergies entre physique et psychologie. "Dynamite Steps" ne constitue pourtant pas une torture intellectuelle ; l’aspect charnel est largement suggéré par le choc des guitares, par la richesse et l’amplitude des sons, par l’utilisation subtile d’éléments électroniques, et la lenteur de certains passages suscite une sensualité fragile. Greg Dulli avait coutume de dire que s’il avait eu une meilleure voix, il aurait sans problème fait des reprises de classiques soul Motown durant toute sa carrière. Avec The Beginning of The End, il sonne plus que jamais comme un artiste soul.

Plutôt qu’une torture, il s’agit dans les meilleurs moments, et si l’on accepte de jouer le jeu, d’une manipulation. Les choses deviennent intéressantes lorsqu’on se rend compte que Dulli apparaît, tel qu’il a souvent fait, lui-même manipulé. Sa dualité et son remords jettent des ponts, entre lui et nous, et encore entre lui et cette autre personne qui n’est peut-être pas une femme, mais la nuit enveloppante et pleine de propositions. Les Twilight Singers, et leur nom prend son sens, ont par le biais de Dulli cette aisance décrire de façon cinématique un monde noctambule dangereux, empli d’enseignes néons clignotantes, de fumée bleue et de plus de débauche et de vice en l’espace de quarante minutes que ce que la plupart des gens expérimenteront dans toute leur existence.

Sur "Dynamite Steps", Dulli essaie de former un ensemble qui puisse faire écho à l’ensemble de son œuvre – une douzaine d’albums en comptant son disque en solo et sa virée avec son ami de l’époque grunge Mark Lanegan (ex-leader des Screaming Trees) pour les Gutter Twins. Be Invited profite d’ailleurs de la prestation de Lanegan, au ton toujours satanique. La façon dont "Dynamite Steps" est séquencé, développé en fait un grand disque. On retient, par exemple, ces soli fiévreux – sur On the Corner, Blackbird and the Fox – qui émaillent l’ensemble.