Tobias Jesso Jr.

Le petit phénomène Tobias Jesso Jr. a emballé le grand monde de la musique ces derniers mois, nous nous devions donc d'écouter "Goon", le premier album de ce jeune canadien.

Après des extraits alléchants comme le très beau Hollywood, qu’il avait bien voulu partager avant la sortie de l’album complet, voici enfin « Goon ». Ce premier effort marque tout d’abord par sa maturité, la production confiée à Patrick Carney des Black Keys ou encore Ariel Rechtshaid (Vampire Weekend, Haim etc..) n’y est sans doute pas pour rien. Le jeune homme semble savoir où il veut aller, et il parvient à nous emmener avec lui sans encombre. Il a choisi le piano pour partager ses belles mélodies et ses histoires d’amour, et ça fonctionne à merveille. Surprenant pour quelqu’un qui ne presse les touches noires et blanches que depuis ses 27 ans. Mais il n’est évidemment pas le premier à parler d’amour sur des arrangements piano/basse/batterie/guitare.

Oldschool et vintage donc ? Certainement. Le choix du piano et de ces arrangements donnent un résultat assez puissant et intemporel, cet album se déguste sans modération et nous plonge dans des années largement révolues. Ringard ? Absolument pas, et c’est là que ce situe le tour de force. Il a su utiliser l’histoire du songwriting et de la pop-music sans tomber dans la simple paraphrase. On rencontre par-ci par-là John Lennon venu veiller sur lui comme un père. Cette influence est assez flagrante mais il ne tombe pas, là non plus, dans la copie. Il a su s’approprier le travail des uns et des autres pour nous présenter une oeuvre singulière et personnelle. Personnelle dans le sens où il présente les heures les plus touchantes et romantiques de sa vie, et comme souvent avec ce genre de textes tout n’est pas heureux, loin de là… C’est notamment le cas dans le formidable How Could You Babe où notre coeur est mis à rude épreuve comme l’a certainement été le sien.

Avec cet album, Tobias Jesso Jr. nous livre donc des chansons puissantes, parfois torturées mais toujours agréables et passionnantes. C’est un effort plein d’intelligence et de maitrise, mais un reproche nous est malgré tout apparu à propos de ce disque : il semble qu’après avoir trouvé la formule magique lui permettant de nous faire voyager, il en ait légèrement abusé. Finalement il ne réussit pas totalement à se sortir du format dans lequel il est entré : de beaux textes, qui parlent d’amour et de ruptures, sur des arrangements musicaux soignés. Ce disque est donc, comme nous l’avons déjà dit, personnel et singulier, mais peut-être manque-t-il de variété et de diversité pour entrer directement dans le panthéon des classiques instantanés. Mais arrêtons de chipoter et avouons quand même que cet album est un des très bons disques de ce début d’année 2015 !