"> Black country New road - Ants From Up There - Indiepoprock

Ants From Up There


Un album de sorti en chez .

Le second album de Black Country, New Road paraît alors que le leader du groupe se retire.

Jusqu’ici tout allait bien… Black Country, New Road, groupe éclectique et étoffé formé à Londres avait réussi à imposer sa partition atypique, entre musique klezmer, post-punk et expérimentation sur la foi de quelques prestations scéniques devenues presque mythiques puisque, Covid oblige, il fallait croire ceux qui y avaient assisté sans avoir la proche perspective de vérifier par nous-mêmes. C’est dans ce contexte qu’était paru leur premier album il y a tout juste un an. Un album qui brillait par sa spontanéité, révélait une musique brute et mettait en avant la personnalité de leur leader Isaac Wood, détenteur du supplément d’âme via sa voix au timbre particulier sans être travaillé et son côté bavard. A l’époque, le groupe s’étonnait du bon accueil reçu par cet album, car ils assuraient s’être très peu arrêtés dessus et que la suite était déjà en chemin. On les croyait sur parole et on avait raison puisque de nouveaux morceaux annonciateurs d’un second opus n’ont effectivement pas tardé à être divulgués et « Ants From Up There » est aujourd’hui bel et bien là. Trajectoire linéaire, limpide, donc. Et là, boum ! Quelques jours avant la sortie de l’album, coup de tonnerre, Isaac Wood annonce que chanter et jouer de la guitare est devenu pour lui une source d’angoisse et qu’il quitte Black Country, New Road. Dans le même élan, les autres membres s’empressent de préciser que l’aventure continue. Mais, en attendant forcément une réorganisation, le groupe, privé de sa voix, annule la tournée, en tout cas les premières dates, qui devait suivre la parution de l’album. Une situation pas complètement inédite dans l’histoire de la musique mais, évidemment, « Ants From Up There » prend une dimension particulière puisqu’il devient impossible d’en prendre la mesure sans oublier qu’il s’agit, sauf revirement, d’ores et déjà du dernier disque du groupe avec Isaac Wood à sa tête.

A l’écoute de l’album, si on fait abstraction de cette péripétie, il se confirme que le groupe était sur un tracé très évident. Car, sans grande surprise, « Ants From Up There » est un album qui arrondit un peu les angles les plus abrupts de leur musique. Parallèlement, leur formation, qui fait cohabiter cuivres, violons et guitares et des éducations musicales qui embrassent aussi bien le rock que le classique leur permet de continuer à évoluer sur un spectre large et aéré. On notera toutefois que la troupe n’aura pas mis longtemps à s’assagir car, sur cet album, les ruptures de rythme, les brusques accès de fièvre qui jalonnaient « For The First Time » ne sont plus là. L’aspect « exotique » du premier album cède lui aussi le pas à une approche, via les cuivres, plus naturellement jazz, dans sa mouture la plus accessible. Si tout cela révèle une approche sage et raisonnée, il ne faut toutefois pas s’arrêter définitivement à ce constat. Car cette approche s’accompagne aussi d’une réflexion, d’un travail sur les schémas de composition.

Un titre comme Snowglobes est en lui-même un résumé de l’évolution du groupe. Si, sur « For The First Time », on pouvait avoir l’impression que le groupe pratiquait l’art du collage et que certains morceaux étaient le résultat d’idées mises bout à bout, cette fois, on a clairement affaire à des morceaux pensés dans leur globalité, en dépit de leur longueur. Snowglobes répond ainsi à un schéma précis. Une phrase mélodique installée dès l’introduction, soutenue par un accord de violon. Et les neuf minutes du morceau seront en fait une reprise de ce même accord et de cette même phrase en faisant gonfler le tout via un léger crescendo très progressif. Et Isaac Wood, au chant d’abord très retenu, finira en déclamant encore et encore les mêmes paroles de sa voix qui semble lui échapper sans l’abandonner. Il y a quelques semaines, les membres du groupe lançaient un peu par boutade qu’ils ambitionnaient de devenir les nouveaux Arcade Fire. Une référence avant tout au fait que eux aussi étaient nombreux mais, au final, si, musicalement, les deux formations ne partagent pas les mêmes racines, la boutade n’en était, consciemment ou pas, pas complètement une. Le lyrisme très mis en scène qui se dégage de « Ants Form Up There » n’est ainsi pas complètement éloigné des débuts des Canadiens.

De fait, ce lyrisme, qui s’exprime principalement via des titres, au minimum au départ, assez lents et posés, est l’atout majeur de cet album. Sobre, discret et bien tenu sur Bread Song, beaucoup plus démonstratif sur Concorde, tout feu tout flamme sur Haldern, c’est lui qui plaide pour la musicalité du groupe et la bonne tenue de l’album. Maintenant, en dépit du contexte, on a un peu de mal à croire que « Ants From Up There » deviendra un album culte, chéri pour avoir documenté les ultimes moments de Black Country, New Road avec Isaac Wood. Si on se place dans la perspective de la continuité annoncée de la carrière du groupe, il est possible que cet évènement, et l’existence de cet album, serve néanmoins de coup de fouet salutaire au groupe pour reprendre en mains une trajectoire un peu trop tracée d’avance. Mais là, c’est l’avenir qui le dira.

Rédacteur en chef

Tracklist

  1. Intro
  2. Chaos Space Marine
  3. Concorde
  4. Bread Song
  5. Good Will Hunting
  6. Haldern
  7. Mark’s Theme
  8. The Place Where He Inserted the Blade
  9. Snow Globes
  10. Basketball Shoes

La disco de Black country New road