Le retour en grâce de blonde Redhead.
Les retours après plusieurs voire de longues années d’absence ne sont plus de l’ordre de l’exception, certains sont plus guettés que d’autres. A regarder le parcours de Blonde Redhead, on peut presque s’étonner d’avoir immédiatement l’envie de savoir ce que ça donne. Car, au final, la carrière du groupe se résumait jusque-là à quelques albums bruyants qui n’avaient pas suffi à faire de la formation une des toutes premières du noise rock dans les années ’90, à deux albums en apesanteur au milieu des années 2000 dans lesquels ils s’étaient totalement réinventés, à la surprise de tous, en groupe pop grand format flamboyant, avant de redevenir moins convaincants au tournant des années 2010 en expérimentation quelque peu plus electro. Le site américain Pitchfork relevait d’ailleurs justement, à l’occasion de leur retour, le paradoxe Blonde Redhead en mentionnant que leur titre de très loin le plus populaire sur les sites de streaming était For The Damaged Coda, morceau qui referme leur album « Melody Of Certain Damaged Lemons » et qui en est à peine un puisqu’il s’agit plutôt d’une piste essentiellement instrumentale et improvisée avant tout pour refermer le disque, justement. Bref, Blonde Redhead est un groupe que la plupart de ceux qui les ont suivis a aimé à certains moments, moins à d’autres, et au statut un peu énigmatique.
Mais, le temps de leur meilleur, soit la période 2004-2007, avec la publication de « Misery Is A Butterfly » et « 23 », le trio formé par Kazu Makino et les frères jumeaux Simon et Amadeo Pace a sorti deux albums majeurs des années 2000 qui ont plus que bien vieilli. Et puis, pour ajouter à l’attrait du groupe, pourquoi ne pas mentionner aussi que Kazu Makino, flanquée de sa guitare, a toujours eu une allure folle sur scène et que cela suffit à frapper l’imaginaire et à rendre le groupe attachant. Et « Sit Down For Dinner » est parti pour faire encore monter leur cote d’un cran. Car on entre dans ce disque avec une évidence totale. On retrouve immédiatement les timbres de voix d’Amedeo Pace, presque en fausset, et de Kazu Makino, profond tout en semblant manquer de souffle, tous deux se partageant toujours le chant à tour de rôle, et sans aucune altération du temps. On retrouve aussi une musicalité raffinée, avec quelques synthés qui viennent se greffer au canevas sonore et porter tout en gracilité des morceaux soignés, trés mélodiques, et qui nous font surtout prendre conscience que le groupe a vraiment imprimé un savoir-faire qui lui est propre.
Formellement, on est sur un album qu’on place facilement dans la veine de deux meilleurs albums du groupe déjà mentionnés, sans que « Sit Down For Dinner » en soit une redite. Globlalement, les titres voguent sur un tempo encore plus apaisé, les guitares sont essentiellement acoustiques. C’est peut-être à l’échelle de Blonde Redhead ce qui se rapproche le plus d’un dique folk, avec la touche de sophistication en plus qui leur appartient. Un album qu’on traverse d’une traite, avec comme jalons principaux Snowman, Not For me, Sit Down For Dinner Part 1, extrèmement touchant par sa fragilité et son émtion à fleur de peau, le planant If, l’émouvant Via Savona. « Sit Down For Dinner » est un album rare par la sensation, clairement plus forte qu’à l’accoutumée qu’il procure d’écouter un groupe qui a d’une certaine façon réussi à arrêter le temps, tout en étant justement parvenu à laisser passer suffisamment de temps pour être en mesure de reprendre son chemin comme il le devait. Vraiment bluffant.
- Publication 1 414 vues20 octobre 2023
- Tags Blonde RedheadSection1
- Partagez cet article