Deux ans après la consécration de "The Greatest", où Chan Marshall laissait de côté ses atours d’écorchée vive sans délaisser l’émotion pour un grand numéro qui l’avait vue s’assumer comme une des plus belles plumes et voix du moment, la revoici pour la seconde fois dans l’exercice de l’album de reprises, après "The Covers Record" en […]
Deux ans après la consécration de "The Greatest", où Chan Marshall laissait de côté ses atours d’écorchée vive sans délaisser l’émotion pour un grand numéro qui l’avait vue s’assumer comme une des plus belles plumes et voix du moment, la revoici pour la seconde fois dans l’exercice de l’album de reprises, après "The Covers Record" en 2000. Allions-nous avoir droit à un retour à des ambiances plus brutes ? A un disque vite expédié, surtout voué à faire patienter les foules ? Ou bien à la confirmation de la nouvelle direction prise par Cat Power ?
C’est d’entrée cette dernière hypothèse qui s’impose. "Jukebox" confirme les choix faits sur "The Greatest", avec une instrumentation simple et soignée, qu lorgne aussi bien du côté de la soul que du folk. Chan Marshall vient poser sa voix sur ces morceaux d’autres grandes voix américaines (Sinatra, Billie Holliday) et leur fait honneur sans fausse note, scellant définitivement son statut. On notera surtout New York, avec un parti pris plus grave que l’original des plus pertinents, Don’t Explain avec son chant fiévreux et ses notes récurrentes de piano. Mais plus encore, on se laissera transporter par Metal Heart, dont l’original avait pour auteur… Cat Power !
Le fait que Chan Marshall elle-même soit l’auteur du morceau le plus réussi de l’album est assez significatif. Car s’il serait mal venu de nier que Cat Power est une des personnalités les plus fortes du paysage musical américain actuel et qu’elle mérite le statut qu’elle s’est forgée, on a le sentiment qu’elle vient prendre place parmi ses pairs sans les bousculer, poliment, de manière un peu trop lisse. On ne relève pas de reprise maladroite ou réellement ratée sur "Jukebox", mais il pointe parfois un léger ennui, le sentiment que cet album a des allures de "musique de salon". Classe certes, mais le relief un peu en berne. C’est notamment le cas sur Lost Someone ou I Believe In You. On ne va donc pas chercher querelle à Cat Power, mais simplement lui dire que l’on préfère lorsqu’elle se livre sans fard avec ses mélodies et ses mots à elle, et ajouter gentiment qu’il serait dommage qu’elle découvre les vertus des pantoufles.