Luminothérapie sur mesures
Ce n’est pas la première fois que nous évoquons Christophe Chassol sur indiepoprock, bien que ses productions s’éloignent d’un carcan rock indé, sa démarche artistique ne peut que titiller notre amour pour la marginalité et l’authenticité. Après La Nouvelle-Orléans et « Nola Chérie », l’Inde et « Indiamore », le monde créole et le nouveau venu « Big Sun » clôt sa trilogie ultrascores.
Revenons quelques instants sur ce qu’est l’utrascore. Chassol, doué d’une oreille hors du commun, s’emploie à « harmoniser le réel », l’ultrascore est une méthode qui tend à faire entrer le monde en studio. Nous sommes entourés et nous produisons des sons, rien de bien nouveau, l’artiste lui, prend le rôle du producteur, donne le liant et sublime le réel par ses arrangements, ses montages.
Chassol en termine avec cette trilogie par un retour aux racines, transcendant sa Martinique. Et ce début de mars, plein soleil sur le territoire français, ne peut être une simple coïncidence avec la sortie de « Big Sun », tant cet objet, recele chaleur, joie de vivre et sérénité. Cette troisième oeuvre montre une plus grande maturité dans la démarche que ses prédécesseurs, peut-être par une musicologie plus précise, ou une plus grande maîtrise du contexte. Il est possible aussi que l’écosystème créole soit de nature plus musicale aussi. Quoi qu’il en soit, « Big Sun » est bel et bien une vraie oeuvre musicale accessible et unique.
Ce qui donne aussi toute la saveur de la musique de Chassol c’est cette instantanéité, les prises de son sont uniques, une sorte de do it yourself et de croyance en la beauté du moment. Les interventions de madame Etienne Lise ou de Alix & Lisa viendront notamment récompenser cette intégrité par des moments sublimes dans leurs hésitations et leurs erreurs.
Outil indispensable à une immersion totale dans le travail de Chassol, le visuel. L’album est accompagné, comme pour les « Nola Chérie » et « Indiamore » d’un film. Film qui n’est autre que l’album en images, avec ce patchwork de personnages, le siffleur des montagnes, Madamme Etienne Lise, etc…
Voilà donc un objet artistique non identifié, qui malgré une démarche complexe, demeure d’une beauté pure, désarmante de profondeur et de lumière. Loin d’être l’oeuvre d’un musicologue nombriliste, « Big Sun » est une explosion de photons, un truc réellement à part, et viscéralement attachant.
Une telle oeuvre, à l’image des précédentes oeuvres de l’artiste, est par essence inclassable. D’aucuns y verront de l’electro, quand certains évoqueront peut-être une nouvelle forme de musique classique. L’ultrascore même ne peut vraiment se définir comme un style, parler d’ultrascore créole serait plus juste, ce qui nous amène à la conclusion inexorable que le débat n’a que peu de valeur.
Bien entendu, aucun titre ne peut réellement se détacher du tout, c’en serait criminel.