Hypothèse : si l’on a autant aimé autant Dinosaur Jr, c’est peut-être parce que ce groupe nous ressemble, souvent pataud, jamais trop à son aise, un peu mal foutu, avec une tendance coupable à l’embonpoint. Si l’on a beaucoup pardonné à Dinosaur Jr, et Dieu sait qu’il a fallu apprendre l’abnégation, c’est probablement grâce à […]
Hypothèse : si l’on a autant aimé autant Dinosaur Jr, c’est peut-être parce que ce groupe nous ressemble, souvent pataud, jamais trop à son aise, un peu mal foutu, avec une tendance coupable à l’embonpoint. Si l’on a beaucoup pardonné à Dinosaur Jr, et Dieu sait qu’il a fallu apprendre l’abnégation, c’est probablement grâce à "Green Mind", parce qu’on s’est persuadé que si Dinosaur Jr pouvait être touché par la grâce, après tout, la même chose pourrait bien nous arriver aussi…
Dinosaur Jr, c’est l’histoire de la lente glissade d’un groupe pop-punk volontiers bourrin vers un hard-rock verbeux et mou du bide. Une histoire dont le fil conducteur est un apprenti guitar-hero à tête d’endive braisée et doté d’une voix évoquant Kurt Cobain sous Hélium, J.Mascis. Une histoire dont l’apogée est, incontestablement, ce petit chef-d’œuvre de punk-rock idéalement muselé par des mélodies pop solaires, cette collection de tubes bricolo aussi imparables que mal fagotés.
Ici, Mascis semble miraculeusement économe de soli de guitare, et adopte plutôt une concision bienvenue, si l’on excepte une longue dégoulinade finalement assez réussie sur Thumb, enchaîne les refrains les plus accrocheurs en tentant même de maîtriser les faiblesses de sa voix. Résultat : du bonheur en barre, des chœurs débiles de The Wagon au refrain hymnique de Water en passant par les superbes sons de guitare spongieux qui imbibent les couplets de Muck ou l’intermède folk Flying Cloud, perdu pile poil entre voûte céleste et voûte plantaire. Plus euphorisant qu’une ecstasy gobée à l’Hacienda, plus réconfortant qu’une bluette de House of Love : "Green Mind" prouve que Mascis a bel et bien trouvé, un jour, une formule magique, qu’Evan Dando et ses Lemonheads lui ont certainement piquée pendant la sieste.
Il était probablement écrit que cet éclat improbable et contre-nature devait rester une parenthèse enchantée. D’ailleurs, après ce coup de génie le brontosaure Mascis commencerait déjà à rouler sur le flanc comme une otarie repue ("Where You Been") avant de finir les quatre fers en l’air, toute bedaine au vent, sur l’impardonnable "Without A Sound".
- Publication 974 vues20 mai 2007
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