"> Goat Girl - On All Fours - Indiepoprock

On All Fours


Un album de sorti en chez .

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Le second album de Goat Girl, récit de nombreuses épreuves surmontées.

Origine similaire, le sud de Londres, premier album publié en 2018, le second en ce début d’année, même élan post-punk à leurs tout débuts, Shame et le quatuor féminin Goat Girl partagent pas mal de points communs. Ajoutez que l’élaboration de ce second album n’a pas été simple et vous creusez la similarité. Toutefois, dans le chaos de la survenue de la pandémie l’an dernier, réussir à écrire et produire de la musique a forcément été compliqué pour tout le monde et a rajouté pas mal de doutes et d’incertitudes. Pour Goat Girl, les choses sont allées plus loin. Pendant l’écriture de l’album, on a en effet diagnostiqué un lymphome à Ellie Rose Davis, la guitariste du groupe, qui a dû subir une chimiothérapie. Et c’est alors qu’est survenue l’épidémie de Covid-19, que ne devait surtout pas attraper Ellie Rose Davis, au risque d’y laisser la vie. Parallèlement, Lottie Pendlebury, alias Clottie Cream à la scène, voix et principale plume de la troupe, ne voulait pas reproduire le même schéma que pour le premier album et souhaitait un plus grand investissement direct de ses comparses à tous les stades de l’écriture. « On All Fours » est donc un joli titre à tiroirs. Manière de souligner que c’est vraiment un album résultat de quatre membres et qu’elles sont bel et bien quatre, puisqu’Ellie Rose Davis, désormais en rémission, est fort heureusement toujours là. En même temps, on peut y voir une allusion à la sensation d’être un peu à terre que la pandémie a fait peser sur nous.

Musicalement, « On All Fours » est naturellement différent de leur premier album éponyme, ne serait-ce que par le mode d’écriture, et est surtout le reflet de ce que les filles ont vécu. La maladie d’Ellie Rose Davis n’est pas directement évoquée, mais un sentiment d’anxiété plane sur l’album, tout comme celui du spectre de l’ennui de longues journées passées à s’interroger et à rester cloitrées, confinement oblige. Et si « On All Fours » sonne autrement que leur premier opus, les guitares teigneuses étant laissées de côté, ou du moins en retrait, pour leur préférer des synthés et des beats, sans pour autant abandonner non plus un aspect organique, c’est avant tout l’essence de l’album qu’il faut aller chercher. Le côté volontairement foutraque, instable de leur premier album laissait déjà supposer qu’elles exploreraient d’autres territoires. Ici, tout se fait donc globalement sur un tempo lent, avec des vocaux posés, parfois même planants, et Goat Girl nous font parfois penser aux Américaines de Warpaint. A la différence, fondamentale, qu’ici, il n’y a pas de place pour le glamour. Car, encore une fois, la forme, c’est une chose, mais les filles de Goat Girl n’ont pas laissé tomber leur propos sombre et pas forcément optimiste.

De prime abord, l’exercice est parfois déstabilisant et il ne faut pas être trop pressé pour apprécier les morceaux d' »On All Fours ». La langueur de Jazz (In The Supermarket), les bifurcations de Once Again, si elles illustrent bien l’ennui poisseux, le font, si on n’y prête pas garde, un peu trop bien, au point de susciter cet ennui chez l’auditeur. C’est par le biais de titres plus enlevés, Sad Cowboy, titre déjà connu, ou The Crack, bien inspirés musicalement, qu’on reste dans l’album et qu’on y revient. Et, petit à petit, on découvre les méandres de titres finalement très ambitieux l’air de rien. Anxiety Feels et sa petite ritournelle qui s’incruste avant d’impressionner par les détours qu’elle prend, les deux derniers titres, Where Do We Go From Here et A-Men, qui imposent de belles boucles virtuoses et intenses pour le premier, un superbe final instrumental pour le second. Au final, si qualifier « On All Fours » de chef d’oeuvre serait excessif, c’est tout de même un beau tour de force. Un album insaisissable, qui parvient, à sa façon, à capter l’essence du post-punk dans sa dénonciation d’un monde qui nous échappe, à incarner frustration et dépit qui sont aussi à la base du genre, en laissant de côté ses atours les plus évidents. Le début d’une nouvelle ère, peut-être.

Rédacteur en chef

Tracklist

  1. Pest
  2. Badibaba
  3. Jazz (In the Supermarket)
  4. Once Again
  5. P.T.S.Tea
  6. Sad Cowboy
  7. The Crack
  8. Closing In
  9. Anxiety Feels
  10. They Bite on You
  11. Bang
  12. Where Do We Go From Here?
  13. A-Men

La disco de Goat Girl

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80%

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