"> Hüsker Dü - Candy Apple Grey - Indiepoprock

Candy Apple Grey


Un album de sorti en chez .

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Au coeur de la période la plus cruciale de la carrière d’Hüsker Dü (de 1984 à 1987, à peu près), « Candy Apple Grey » fait figure de vilain petit canard, souvent méprisé au profit d’autres mastodontes comme « Warehouse : Songs And Stories » et « Zen Arcade ». Il représente pourtant, outre un album de hardcore mélodique tout à […]

Au coeur de la période la plus cruciale de la carrière d’Hüsker Dü (de 1984 à 1987, à peu près), « Candy Apple Grey » fait figure de vilain petit canard, souvent méprisé au profit d’autres mastodontes comme « Warehouse : Songs And Stories » et « Zen Arcade ». Il représente pourtant, outre un album de hardcore mélodique tout à fait représentatif de l’excellence du rock indépendant américain au milieu des eighties, un point d’entrée idéal dans une discographie assez trapue et exigeante.

Le positionnement de « Candy Apple Grey » est effectivement particulier : album bref, composé d’une dizaine de chansons, il arrive après une série pantagruélique (« Zen Arcade », « New Day Rising » et « Flip Your Wig », excusez du peu), juste avant le grandiose « Warehouse : Songs And Stories ». Ce format condensé intrigue et laisse à penser qu’il s’agit d’un disque de transition, comme si le groupe reprenait son souffle avant d’embrasser de nouveau un format plus ambitieux. Cette approche plus modeste permet cependant à l’album de rester plus facilement accessible pour de nouveaux auditeurs. D’aucuns y voient également les conséquences du passage de SST à Warner : en quittant son label historique pour rejoindre une major, Hüsker Dü aurait ainsi dû mettre de l’eau dans son vin. L’hypothèse est valable : par rapport à ses disques précédents, c’est vrai, le groupe ralentit nettement la cadence et même les titres les plus virulents (Dead Set On Destruction, Eiffel Tower High) s’imposent plus par leur aisance mélodique que par leur violence. A l’inverse, le seul titre franchement dispensable de l’album est aussi le plus bruitiste : il s’agit de l’inaugural Crystal. Encore une fois le groupe fait bien les choses en se montrant fidèle à son histoire tout en démontrant l’utilité d’évoluer.

Pour autant, cette transition et cette évolution du groupe n’entament en rien l’intérêt que l’on peut lui porter. Bien au contraire, « Candy Apple Grey » est, à l’instar de « Sister », un exemple éclatant de l’évolution du milieu indépendant américain qui délaisse progressivement l’expérimentation et la brutalité sonore pour s’aventurer sur des terrains plus fédérateurs. Un rapprochement avec le mainstream, certes, mais surtout le commencement d’une emprise de plus en plus marquée sur ce mainstream qui s’accommode de plus en plus mal des produits de synthèse de l’époque et ressent clairement le besoin d’un sang neuf, emprise qui culminera bien évidemment avec l’avènement de Nirvana.

Le milieu de l’album, avec Too Far Down et Hardly Getting Over It, marque aussi une pause d’apaisement musical et d’introspection pour un Bob Mould que l’on devine physiquement et psychologiquement épuisé : en opposition avec une première partie de carrière où la surenchère sonore fait office de seule échappatoire, Hüsker Dü montre à présent une totale appropriation du mid-tempo, une capacité à gérer l’apaisement sonore comme un temps fort.

A bien des égards, « Candy Apple Grey » fait donc office d’album mineur pour Hüsker Dü – pour tout autre groupe, il s’agirait d’un aboutissement mémorable. Il constitue pourtant une porte d’entrée idéale dans l’univers du trio et de façon plus générale une bonne introduction pour aborder tout le rock indépendant américain des eighties. Album de transition pour le groupe, il symbolise aussi l’arrivée et l’intégration progressive d’un rock exigeant, indépendant et violent dans le paysage de la musique populaire de consommation de masse ; une évolution qui permettra bientôt l’éclosion de nouveaux talents non moins fondamentaux comme les Pixies et bientôt Nirvana et les Smashing Pumpkins. Bref, en 1986, la classe musicale se décline en Angleterre sur « The Queen Is Dead » et en Amérique sur « Candy Apple Grey ». Rien de moins.

Chroniqueur

Tracklist

  1. Crystal
  2. Don't Want to Know If You Are Lonely
  3. I Don't Know for Sure
  4. Sorry Somehow
  5. Too Far Down
  6. Hardly Getting over It
  7. Dead Set on Destruction
  8. Eiffel Tower High
  9. No Promise Have I Made
  10. All This I've Done for You