Les Red Hot Chili Peppers, on en convient volontiers, sont loin d’incarner l’idéal d’une musique indépendante et exigeante. Depuis leurs débuts, les Californiens ont prôné le mélange décomplexé entre le funk le plus salace, le hip-hop (avec le chant rappé de Antony Kiedis), et le rock, voire le hard-rock. La musique, cependant, n’a pas forcément […]
Les Red Hot Chili Peppers, on en convient volontiers, sont loin d’incarner l’idéal d’une musique indépendante et exigeante. Depuis leurs débuts, les Californiens ont prôné le mélange décomplexé entre le funk le plus salace, le hip-hop (avec le chant rappé de Antony Kiedis), et le rock, voire le hard-rock. La musique, cependant, n’a pas forcément besoin de porter des binocles et de balader avec elle un exemplaire fatigué de « l’Attrape-coeurs » pour être intéressante, la preuve avec « Blood Sugar Sex Magik », chef-d’œuvre des nineties naissantes, paru au cours d’une année 1991 décidément bien prolifique. Après le décevant « Mother’s Milk », trop ouvertement metal, les Red Hot Chili Peppers décident de revenir à l’essentiel de leur musique : un funk sec et émacié, encore très influencé par Gang Of Four (modèle revendiqué du bassiste Flea) mais également par la folie des grands noms du genre (George Clinton en tête).
Pendant plus d’une heure, « Blood Sugar Sex Magik », bacchanale effrénée, voit se succéder sans discontinuer de purs moments d’efficacité funk (Give It Away, Blood Sugar Sex Magik, If You Have To Ask, Funky Monks), des bluettes plus ou moins réussies (Under The Bridge ou I Could Have Lied) et quelques démonstrations de rock au groove surnaturel (My Lovely Man, Suck My Kiss), pour s’achever sur une tornade salace aux guitares moites improbables (Sir Psycho Sexy). Gargantuesque, excessif, parfois caricatural et légèrement indigeste, cet album démentiel (au sens propre) laisse l’auditeur pantelant, essoufflé par un tel déchaînement d’idées.
Il faut insister sur le son absolument ahurissant développé par Rick Rubin. Le groupe a bien entendu sa part de mérite, mais « Blood Sugar Sex Magik » est également un véritable chef-d’œuvre de producteur. Le travail effectué sur les sons de guitares en fait une mine d’idées inépuisable pour tout apprenti guitar-hero. Rubin a certainement eu le travail facilité par l’inventivité d’un John Frusciante au sommet de son art, virtuose sans être exagérément démonstratif. Des rythmiques reptiliennes les plus démoniaques (Funky Monks !) aux soli les plus psychédéliques, Frusciante transcende littéralement la musique du groupe. Paradoxalement, la basse de Flea, pourtant figure de proue des Peppers, s’inscrit légèrement en retrait, même si quelques morceaux lui permettent encore d’étaler son goût pour le slap. Quant à Anthony Kiedis, il demeure le maillon faible du quatuor, son flow limité s’avérant cependant bien meilleur que ses tentatives de chant. Ceci importe peu au vu du déluge instrumental orchestré par ses comparses.
Guitares en pleine orgie psychédélique, basse bondissante, batterie soutenue (Chad Smith, pas toujours inspiré, n’en demeure pas moins un métronome des plus efficaces !) : en pleine bourre, les Red Hot Chili Peppers livraient ici leur dernier grand album, avant de sombrer dans une succession peu enthousiasmante de daubes retentissantes (« One Hot Minute ») ou de productions honnêtes sans plus (« Californication »).
- Publication 958 vues12 octobre 2009
- Tags Red Hot Chili PeppersEMI
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