De l'art du fun pentatonique
Commençons par une lapalissade pour tout album à forte dominante bluesy : l’écoute d’un album de Seasick Steve sera toujours assez loin des sensations ressenties à ses prestations live. Et encore une fois, de chaque titre de ce nouvel album suinte tout le potentiel scénique des compositions, associées à la personnalité ô combien charismatique du bonhomme, on en perçoit de belles promesses.
Ceci étant dit, concernant « Sonic Soul Surfer », malgré une démarche fun/garage/épuré encore plus exacerbée qu’à l’accoutumée, on se surprend tout de même à ne jamais décrocher de l’écoute. Le septuagénaire pourrait sans mal surfer (ah ah ah) sur son image de papy ultra cool, entre déglingue et bourlingue. De fait, il ne s’en prive pas, avant tout parce qu’il est cet homme, mais il ne s’arrête pas à ça, et traîne son baluchon sur des chemins de traverse de plus en plus profonds.
Avant toute chose, le son produit par la guitare (nous ne parlerons pas de six cordes, elle en a rarement autant) de Steve est son totem, un repère identitaire très fort. Dès les premières notes de Roy’s Gang, l’oreille éduquée n’aura aucun mal à retrouver ces sensations d’instrument monté à la va-vite avec les chutes d’une usine automobile, rappelant les styles indus et noise pourtant des plus antinomiques avec le feeling du monsieur. Sans scrupule avec ce matériel de récup, Seasick Steve n’hésitera pas à martyriser son engin à coup de solos parfaitement incongrus eu égard à son background blues vaguement country.
Ne vous attendez donc pas à trouver l’oeuvre d’un anarchiste, d’un iconoclaste, juste d’un bluesman un peu différent, sale, cool et très fun. Si l’on devait s’approcher d’une définition de la musique de Seasick Steve, c’est un peu notre rôle, ça tombe bien, on évoquerait un blues flegmatique saturé. L’homme est réellement attaché aux ambiances hypnotiques lourdes du blues, allant jusqu’au meilleur de la country et de la folk par des titres pleins de hauteur tels In Peaceful Dream, Right On Time, et surtout le Heart Full Of Scars Final. Voilà ce qui démarque le vieillard adolescent de la meute, cette obsession de l’atmosphère et cette manière naturelle de délaisser tout considération technique dans son jeu. On disait de Nirvana que leurs compositions étaient d’une simplicité enfantine, oui, mais eux les ont composées. Il en est de même pour notre ami, rien ici ne semble transcendant de risque ou d’originalité, mais cela fonctionne à merveille à la grâce d’un don naturel pour la beauté musicale.
S’il ne devait rester qu’un titre : Swamp Dog.
- Publication 771 vues7 avril 2015
- Tags Seasick SteveCaroline
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Tracklist
- Roy's Gang
- Bring It On
- Dog Gonna Play
- In Peaceful Dreams
- Summertime Boy
- Swamp Dog
- Sonic Soul Boogie
- Right On Time
- Barracuda '68
- We Be Moving
- Your Name
- Heart Full Of Scars
- Don't Ask Me (Bonus Track)
- Baby Please Don't Go (Bonus track)
- Man's Best Friend (Bonus Track)
- Silver Dagger (Bonus Track)