"> The Cure - Songs Of A Lost World - Indiepoprock

Songs Of A Lost World


Un album de sorti en chez .

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The Cure ajoute une nouvelle pépite à sa collection d'albums envoûtants et à la marque indélébile.

Commençons par une évidence :  face au déferlement de chroniques élogieuses, au minimum, de « Songs Of A Lost World », nouvel album du groupe de Robert Smith et le premier depuis 2008, auquel celle-ci, disons-le d’emblée, va venir s’ajouter, on n’échappera pas à la convocation de la nostalgie pour chercher à l’expliquer. Ce qui, précisément, nous donne l’opportunité de dire pourquoi, justement, c’est un contresens. La nostalgie consiste en effet à considérer que le passé valait mieux que ce qu’on nous propose aujourd’hui et à célébrer ce qui lui appartient exclusivement. Mais, d’une part, The Cure, même s’ils n’avaient rien publié de neuf depuis seize ans, n’ont jamais disparu du paysage et ne font donc aujourd’hui par leur retour à proprement parler. Des célébrations de leurs quarante ans de carrière en 2019 à d’autres tournées les années précédentes, ils étaient bel et bien là. Ensuite, si nostalgie il devait y avoir, elle consisterait, si on prend le concept au pied de la lettre, à chercher dans ce nouvel album tout ce qui manque en comparaison de ses glorieux prédécesseurs et donc à expliquer pourquoi, décidément, « c’était mieux avant ». Or, « Songs Of A lost World » s’inscrit dans la veine des albums les plus marquants de The Cure, « Pornography » et « Disintegration » en tête, mais est tout entier un album de 2024.

Bien sûr, pour les fans les plus anciens de The Cure, qui ont depuis longtemps le groupe dans leur panthéon éternel, les longues plages mélancoliques de synthés d’Alone, les lignes de guitare mouvantes et oniriques de A Fragile Thing, la noirceur intense et enveloppante de Warsong réveille un maelstrom d’émotions qu’ils portent et porteront toujours en eux. Mais la grande réussite de « Songs Of A lost World » ne consiste pas à singer des gimmicks ou des postures du passé mais bien à inscrire une patte singulière dans une époque. La singularité, elle se retrouve dans la structure même de l’album. The Cure, et plus précisément Robert Smith, ne sont plus les jeunes garçons qui, quand ils écrivaient « Pornography », sortaient de leur cocon romantico-sombre pour donner à leur musique des aspérités plus âpres, voire outrancières. Et nous ne sommes plus non plus à l’époque de « Disintegration » où, à l’aube de la trentaine, Robert Smith se jetait à corps perdu dans une longue descente inéluctable, assumant tous les tourments poisseux dont il ne pourrait jamais se débarrasser.

En 2024, Robert Smith n’est dupe de rien, et la structure de « Songs Of A lost World » devient un simple cercle. Les premières paroles de l’album sont ainsi « This is the end/of all the songs that we sing », le dernier titre s’intitule Endsong. Mais l’album n’est pas pour autant un pur exercice de style. Robert Smith s’est d’ailleurs dit désolé d’avoir annoncé dès 2019 que la publication d’un nouvel album était imminente. Car, pour explorer aussi intensément ses tourments, il ne suffit pas de coucher quelques paroles portant sur le délitement des sentiments ou la fatalité mais capter le moment où la nécessité de les transcender viendra. C’est ce qui rend aussi authentique et aussi forte la musique de The Cure et le chant immuable de Robert Smith qui, à 65 ans comme à 25 ou 30, continue d’osciller entre l’appel au secours et la bataille permanente. Enfin, ce qui impressionne sur « Songs Of A Lost World » et le rend définitivement très actuel, c’est sa production exceptionnelle. De la batterie, tranchante comme jamais du début à la fin, aux lignes de guitare en passant par les lignes de synthés, la densité sonore de l’album est à couper le souffle. Certains regretteront peut-être qu’elle ne laisse aucune place à une certaine fragilité, mais ça, c’est un écueil avec lequel il faut composer, et le final Endsong est à cet égard un vrai tour de force. En 2024, The Cure est un grand groupe d’hier mais surtout d’aujourd’hui, et c’est peu dire qu’avoir grandi avec leur musique dans les oreilles et d’avancer dans l’âge avec elle est gratifiant.

Rédacteur en chef
  • Publication 1 518 vues1 novembre 2024
  • Tags The CurePolydor
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Tracklist

  1. Alone
  2. And Nothing Is Forever
  3. A Fragile Thing
  4. Warsong
  5. Drone:Nodrone
  6. I Can Never Say Goodbye
  7. All I Ever Am
  8. Endsong
  9. Alone - Live Troxy London MMXXIV
  10. And Nothing Is Forever - Live Troxy London MMXXIV
  11. A Fragile Thing - Live Troxy London MMXXIV
  12. Warsong - Live Troxy London MMXXIV
  13. Drone:Nodrone - Live Troxy London MMXXIV
  14. I Can Never Say Goodbye - Live Troxy London MMXXIV
  15. All I Ever Am - Live Troxy London MMXXIV
  16. Endsong - Live Troxy London MMXXIV