Le second album des Dublinois, accouché dans la douleur.
Le cheminement du second album de The Murder Capital, révélés en 2019 avec « When I Have Fears », est empreint d’un grand clacissisme. Car si les Dublinois avaient accouché de leur premier opus, selon leurs dires, très rapidement, tant les émotions qui les habitaient – frustration, colère, sentiment de perte – avaient besoin de sortir, autant il n’en a pas été de même pour « Gigi’s Recovery ». Car, cette fois, le groupe mené par James McGovern avait la volonté d’élargir la palette, le spectre des émotions. Bref, le dilemme souvent compliqué du second album pour un groupe qui, en outre, croit en l’album comme format de référence, loin des standards de plus en plus répandus du streaming qui mettent en avant l’écoute de titres disparates. « Gigi’s Revovery » a donc mis de longs mois pour aboutir, avec une écriture et un enregistrement qui se sont évidemment déroulés sur des années étranges, en pleine pandémie. Clairement, le groupe aurait pu se planter dans les grandes largeurs ou alors, selon leurs dires encore une fois, exploser en vol. « Gigi’s Recovery », titre qui, au départ, ne voulait rien dire de concret, prend finalement beaucoup de sens. Car, d’une certaine façon, Gigi pourrait être vu comme une allégorie du groupe lui-même, revenu de loin après des moments difficiles.
Mais, au final, si le groupe avait envie de voir au-delà du spectre développé sur « When I Have Fears », il n’a pas oublié ses fondamentaux, à l’image de leurs copains de Fontaines D.C, qui avaient connu plus ou moins les mêmes soucis au moment de leur second album. Only Good Things, le premier single lancé il y a déjà plusieurs mois, avait annoncé la couleur. Le morceau est en effet solaire, ouvertement pop, mais, comme on avait eu l’occasion de le commenter à l’époque de sa sortie, joué de façon très directe, batterie présente et guitares en embuscade, comme pour dire qu’il ne fallait pas complètement se fier à ce côté guilleret et que The Murder Capital n’avaient pas oublié leur fibre post-punk. Ce côté très direct, avec peu d’effets, se retrouve d’ailleurs sur l’ensemble du disque, produit par John Congleton. Et la tension inhérente à la musique du groupe est tout de suite de mise avec Crying, puis un peu plus loin avec Ethel. Sur ces morceaux, le groupe renoue avec les longs morceaux emphatiques qui ont fait sa particularité sur leur premier album, sans pour autant revenir en terrain connu. En effet, là où lers morceaux s’étiraient en longues plages instrumentales, voire dissonantes, on a cette fois affaire à des structures en montagnes russes, remplies par le chant de James McGovern, beaucoup plus étoffé que précédémment, même si on se permettra de relever qu’il lui reste encore des progrès à faire pour devenir un chanteur complètement accompli.
Mais, pour autant, la démarche ne manque pas de brio et fait de « Gigi’s Recovery » un album à la fois fiévreux, épique, tourmenté et habité. Sur les momenrs plus calmes, le groupe réussit aussi à faire entrer un piano, notamment sur The Lie Becomes The Self, sans perdre encore une fois son ADN. Car « Gigi’s Recovery » incarne parfaitement ce qu’on appelle aujourd’hui le post-punk. Car si le nom renvoie à une époque précise, à ses groupes tutélaires et si les différents revivals qu’il a pu connaître depuis donnaient parfois vie à des groupes plus ou moins marketés, on en a désormais fini avec cette tendance pour faire du post-punk un genre à part entière. Un genre réceptacle d’émotions brutes, sublimées par un jeu où chant habité, riffs de guitare et intensité de la batterie sont irremplaçables. Un genre qui, à l’image de The Murder Capital aujourd’hui, ne s’interdit rien et regarde devant, avec beaucoup de classe.
- Publication 1 264 vues23 janvier 2023
- Tags The Murder CapitalHuman Season records
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The Murder Capital sur la route
Tracklist
- real feel
- bleach
- wna torture me tn? (with KARRAHBOOO)
- richest girl alive
- choke (feat. Cortisa Star & CARTERTHEBANDIT)
- box
- light! (with Lil Nas X & 9lives)
- play
- run
- rain
- princess
- heavy metal
- shut up and drive