Le premier album de Wet Leg, hype appelée à se dégonfler rapidement ou pas ?
Wet Leg ont au moins réussi à nous apprendre que l’île de Wight n’est pas seulement le lieu où des hippies se sont rassemblés à la fin des années ’60 pour un fameux festival musical, mais aussi une île habitée par de vrais gens, avec même certains qui se lancent dans la musique. Apparues dans le paysage il y a un an avec leur premier single, Chaise Longue, qu’on retrouve en début de ce premier album, Rhian Teasdale et Hester Chambers ont immédiatement suscité un engouement forcément déraisonnable. Car Chaise Longue fait partie de la ribambelle de titres ultra-malins dont l’histoire de la pop est jalonnée, avec texte sarcastique, phrasé-parlé, refrain mi-métronomique mi répétitif avec trois mots qui tournent en boucle qu’on trouve amusants de reprendre à l’envi. Avec le timing de sa sortie, beaux jours et relâchement des mesures anti-covid les plus restrictives, la hype pouvait s’installer sans contraintes. Par la suite, Wet Dream, leur second single, avait déjà réussi l’exploit de prolonger l’engouement avec un titre impeccablement catchy, bien calé entre dynamique pop indé canaille et refrain dansant à même de mettre à peu près tout le monde d’accord.
Avec la sortie de ce premier album, les deux filles étaient cette fois-ci plus ou moins au pied de leur Everest car, après les louanges pas forcément volés mais naturellement excessifs, la horde des énervés prêts à tirer le phénomène en plein vol histoire de les ranger au rang d’anecdote éphémère était au garde à vous. Et force est de reconnaître qu’en termes d’accueil, Wet Leg réussit un nouvel exploit en s’attirant une quasi-unanimité critique positive, allant même régulièrement à qualifier ce premier album de classique immédiat. Disons-le tout de suite, l’excès est toujours de mise mais doit s’apprécier à l’aune de la bonne surprise que constitue la tenue de ce disque. Car, s’il ne recèle aucun génie à proprement parler, il donne à entendre une belle collection de pop songs bien écrites, joliment interprétées, dans un bel équilibre.
Les principaux écueils sont ainsi tous évités. Le duo ne cherche pas à s’acheter une légitimité indé excessive mais s’approprie à bon escient des guitares catchy de temps en temps, sur Oh No ou Angelica. Le duo évite aussi de foncer tête baissée sur les cinq premiers titres pour fatalement s’essouffler par la suite, limite peut-être la plus récurrente des premiers albums. Les filles sont à l’aise dans les dynamiques ébouriffantes comme dans celles plus alanguies et doucement planantes, l’excellent I Don’t Wanna Go Out en étant le meilleur exemple, tout comme Loving You. Le reste du temps, le duo évolue dans un registre pop limpide, toujours souligné par des textes directs, pleins d’humour et de sagacité. A l’arrivée, on obtient un disque solaire, encore une fois parfait pour la saison, léger mais loin d’être inconsistant. Peut-être pas un classique mais un jalon dans cette année musicale, incontestablement.