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Interview de Viet Cong

Interview de Viet Cong

La bonne fortune, vous savez, c’est le coup de pot, de chance, le truc cool qui tombe dessus par le plus pur des hasards. Erreur de la banque en votre faveur. Et, à discuter avec Matt Flegel et Scott Munro, respectivement chanteur-bassiste et guitariste de Viet Cong, autour d’un bon petit-déjeuner en cette froide matinée de fin novembre, on se dit que c’est la meilleure manière de décrire leur parcours.

 

Vous jouiez ce week-end à la Mécanique Ondulatoire. Alors, comment c’était ?

Matt Flegel : C’était un bon concert. La scène, au sous-sol, fait l’effet d’être dans les cachots d’un donjon, c’est drôle. J’adore ce genre d’endroits, ce genre de club rock un peu crado.

C’était la première fois que Viet Cong jouait à Paris ?

M. F. : C’était la première fois avec Viet Cong, oui. On avait déjà joué à Paris avec Women et Chad VanGaalen.

Qu’est-ce que ça vous fait, aujourd’hui, de vous remettre sérieusement à la musique après avoir officié dans Women ? Parce que ça s’est fini de façon plutôt tragique…

M. F. : Cela fait du bien ! Avoir son propre groupe, se remettre à jouer, reprendre la route, etc. Cela faisait longtemps, c’est agréable de le refaire.

À propos de tournée, j’ai lu que ce premier album avait été écrit sur la route justement.

M. F. : En quelque sorte, oui.

Scott Munro : La plupart des titres sont venus assez naturellement. On tournait beaucoup, on les jouait très souvent et l’idée d’un nouvel album s’est imposée.

Et votre album a été enregistré dans une étable en Ontario ?

M. F. : C’est cela. C’était en décembre dernier, on revenait tout juste d’une très longue tournée (en 2013, le groupe a pris la route pour signer une tournée longue d’une cinquantaine de dates, NDLR), on était prêts à enregistrer.

Mais c’était un studio ou une simple grange ?

M. F. : C’était juste une grange, enfin, un studio aménagé dans une grange qui venait d’être rénovée.

Votre maxi, « Cassette », semble être le résultat d’un enregistrement sauvage effectué chez Scott Munro, dans son sous-sol. Il y a une teinte lo-fi indéniable. Maintenant, de s’isoler dans cette étable et d’enregistrer un véritable album dans des conditions studio, d’obtenir un son plus travaillé, vous aviez une réelle envie de vous éloigner de « Cassettte » ?

M. F. : Oui, bien sûr, mais tu sais, pour « Cassette », on avait déjà essayé de faire sonner ça bien ! (rires) Et là, on avait la même intention d’avoir un bon rendu sonore. Mais l’album est plus « haute fidélité », c’est sûr. Enregistrer en studio, c’était l’occasion pour nous aussi de passer d’un enregistreur 4 pistes à des magnétophones 24 pistes.

Oui, la différence se fait très vite ensuite. Le premier single de l’album, Continental Shelf, paraît déjà plus polissé et sonne comme un clin d’œil à la scène post-punk actuelle, j’ai lu qu’on vous comparait à The Editors, à Interpol, etc., mais aussi à The Cure, à Bauhaus évidemment (le groupe a repris Dark Entries sur son maxi, NDLR). Vous êtes d’accord ?

M. F. : C’est vrai qu’on nous a un peu comparés à Interpol. Et The Cure est une très bonne référence.

S. M. : C’est drôle parce que j’écoute beaucoup plus The Cure maintenant que je ne le faisais avant. Mais je pense que c’est une bonne référence qui a pas mal été mentionnée récemment. Une partie de nos nouvelles chansons sont plus dans l’esprit de ce genre de groupes, oui.

On parle beaucoup en ce moment de la reformation de Ride, programmé pour la prochaine édition du Primavera Festival. Et il y a toute cette vague de groupes anglais nés à la fin des années 1980, qui ont fait carrière durant les années 1990 et qui se reforment : Loop, Slowdive, maintenant Ride.

En chœur : Bien sûr, oui, on a en entendu ça.

M. F. : Ride, je connais un peu, ils étaient un groupe de shoegaze des années 1990. Je me souviens de ces groupes et de la musique des nineties, quelque part c’est la musique avec laquelle on a grandi.

Moi je trouve qu’il y a une mode en ce moment. On revient à des sonorités eighties/nineties. Il y a quelques années, c’était le psychédélisme qui était de retour, on retrouvait la chaleur d’un son garage et là, j’ai l’impression qu’il y a de plus en plus de groupes qui font du post-punk, donnent à entendre quelque chose de froid, d’industriel parfois. Et je trouve que vous en faites partie quelque part.

M. F. : C’est vrai. On a écouté pas mal de trucs post-punk britanniques même si j’ai l’impression que le post-punk est un genre tellement large que tu pourrais jouer n’importe quoi, tu trouverais le moyen de dire que c’est du post-punk. Mais cela ne nous gêne pas d’être labellisés post-punk. C’est bien même, tu sais que tu ne fais jamais quelque chose de neuf, de nouveau… je ne sais pas, pour moi cela fait sens.

L’histoire de « Cassette » est jolie. Sorti véritablement sous forme de cassettes, l’EP n’était destiné à aucun label et il s’est finalement retrouvé republié grâce à Mexican Summer. Vous pouvez nous raconter comment cela s’est déroulé ?

M. F. : C’est Mexican Summer qui nous a contactés. On a reçu un mail de leur part ; je ne sais même pas comment ils s’en sont procuré un exemplaire ! Ils l’ont écouté, peu importe comment, et ils ont voulu le sortir.

Et il a eu de très bonnes critiques… surprise !

M. F. : Oui, c’est drôle de voir ça parce qu’à la base, cet EP n’avait pas vocation à être mis à disposition d’un large public. C’était disponible sur internet, je pense, mais c’est drôle que Mexican Summer ait voulu le sortir. On aurait pu dire non et décliner leur offre, mais bon, quelque part, c’est le but. Puis c’était déjà enregistré.

Pourquoi, vous ne vouliez pas que le label le ressorte ?

M. F. : Non, ça allait. À ce stade-là, de toute façon, on était déjà passé à d’autres choses, on avait avancé. Mais on continue de beaucoup jouer les titres de « Cassette » sur scène. Après, on a enregistré notre album, on le leur a envoyé et, pour être honnête, je pense qu’ils ne l’ont pas aimé. (rires)

D’où le LP, publié chez Jagjaguwar ? C’était également de label de Women, vous vous sentez très proches, liés à eux ?

M. F. : On est très proches, oui. Et c’est très agréable de travailler avec des gens qu’on connaît déjà. On n’a pas besoin de tout reprendre depuis le début, de repartir à zéro. J’étais resté en contact avec eux, puis on est devenus amis, je ne les considère pas comme des simples relations de boulot. Pour cet album, ils ont fait en sorte que ça marche et tout s’est très bien passé. On a maintenant les types de Jagjaguwar qui crient à nos concerts : « on sait que vous allez cartonner » ! Bosser avec des amis, ça fait toute la différence. C’est être une famille en quelque sorte.

À la lecture des titres de l’album, on y trouve des associations curieuses, absurdes presque, c’est voulu ?

M. F. : C’est la manière dont je vois les choses en général. Mais c’est censé être absurde, oui, ça a été fait pour être drôle. Mais ça ne l’est peut-être pas après tout ! (rires)

Vous jouiez pour un autre artiste de Calgary avant : Chad VanGaalen. Il vous a aidé à concevoir vos EP et LP ?

S. M. : Oui, on avait bossé avec lui. On est amis, en fait. On se connaissait bien avant de faire de la musique ensemble. Mais il n’a pas vraiment travaillé avec nous sur Viet Cong, à part le mixage où il nous a un peu aidés. Disons qu’il est plutôt notre consultant ! (rires)

M. F. : Si, il a joué de la grosse caisse sur Newspaper Spoons et cela ressemblait à « boum boum boum ». C’était exactement le son qu’il faisait et il a été très utile pour ça ! (rires)

Eh ben ! Cela doit tout de même rendre les choses plus faciles de travailler avec ses potes !

M. F. : Plus ou moins. C’est drôle, mais c’est difficile aussi, je pense qu’il y a des jours où les gens ne se rendent pas compte de ce que c’est, être en tournée : tout planifier, organiser, respecter les délais, être à l’heure pour ce vol, ce train, etc. c’est épuisant. Ce n’est pas nécessairement stressant, mais c’est sûr que c’est fatigant à la longue, voyager en permanence… mais c’est ce que nous voulons faire aussi.

Vous avez pas mal tourné, trouvez-vous qu’il y ait des différences entre les publics européens et anglo-saxons ?

S. M. : Oui, je trouve que c’est très différent. On est mieux traités en Europe.

M. F. : Les gens sont plus enthousiastes ici. Enfin, jusqu’à présent.

Pourquoi ?

M. F. : Je ne sais pas, peut-être que les Européens ont de meilleurs goûts !

S. M. : La scène est très fun aux États-Unis ceci dit.

Dernière question : votre dernier coup de cœur musical, c’est quoi ?

M. F. : Blondie ! (rires)

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