"> CharlElie Couture - Poèmes Rock - Indiepoprock

Poèmes Rock


Un album de sorti en chez .

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Eh oui, le rock français du début des années 80 peut parfois mériter le détour. Illustration avec les très jolis "Poèmes Rock" de CharlElie Couture

Charlélie Couture sur Indiepoprock ? Avouons que l’on n’est pas tout à fait dans la ligne classique généralement à l’oeuvre en ces pages. Il va donc falloir s’armer d’une certaine dose de curiosité pour se pencher sur ces « Poèmes Rock » et sur le cas de Charlélie Couture. Artiste multiforme, Couture est un cas à part en France. On peinera d’ailleurs à trouver quiconque se réclamant de son influence, ce qui pourra signaler, au choix, son insignifiance artistique ou sa singularité totale, voire un savant mélange des deux.

En tout cas, aussi surprenant que cela puisse paraître, la transposition dans l’Hexagone d’un style particulier de blues urbain n’a pas donné naissance qu’à des sous-Bukowski de pacotille. Si l’on veut bien passer outre un premier réflexe de suspicion et quelques scories propres à l’époque, les « Poèmes Rock » de Charlélie Couture valent bien de nombreuses baudruches et n’ont pas franchement à rougir d’une comparaison avec les albums concomitants d’Alain Bashung (« Roulette Russe », « Play Blessures »…). Sur le rock français de la période, il m’est difficile de donner un avis instruit – mes playlists d’alors contenaient plus souvent Anne Sylvestre et Steve Waring que Cure ou Joy Division. Quelques noms reviennent toutefois et permettent de décrire un paysage entre rock et variété, composé de braillards aux paroles très politisées (Capdevielle, Renaud), de ménestrels officiants entre rock et variété (le Cabrel des débuts) et d’intellos plus influencés par la New-Wave, comme Thiéfaine ou Bashung justement. Charlélie Couture penche peut-être musicalement plus vers un rock traditionnel voire un certain pan de la chanson française mais son inspiration urbaine et sombre le rapproche de ces derniers.

Le son de « Poèmes Rock » est très marqué par son époque : basses assez peu présentes, guitares claires en exergue, piano en embuscade, batterie aux aigus en avant (cymbales et caisses claires au premier plan, grosse caisse nettement en retrait). Côté composition, Couture joue sur plusieurs styles très différents, donnant à son album une variété thématique assez séduisante. S’il commence par un rock plutôt orageux et menaçant sur La Ballade De Serge K, il pourra se faire beaucoup plus mélancolique sur le blues fatigué de Tu M’As Pas Dit D’Où Tu Venais, plus léger sur Comme Si On Y Croyait ou fantasque comme sur le matois Envie De L’Eau. Sur un mode jazzy et sur une thématique animalière, la superbe Histoire du Loup dans la Bergerie vaut bien les Love Cats de Cure. On trouve également quelques morceaux plus minimalistes, marqués d’une certaine manière par Suicide (T’en Va Plus T’en Va Pas). Bref, si le réflexe initial était de se concentrer uniquement sur le hit Comme Un Avion Sans Aile (à la réécoute une chanson très réussie, probablement ce qui se fait de plus proche de The Dock Of The Bay de ce côté-ci de l’Atlantique), les onze morceaux de ce recueil recèlent bien d’autres bonnes surprises.

Les textes de Couture présentent déjà les caractéristiques qui en feront à la fois le charme et les limites sur sa pléthorique discographie ultérieure. Des paroles qui chantent un blues poisseux, urbain, marqué par la grisaille du quotidien, parfois avec la main trop lourde sur la poésie déglinguée. Ce type de narration décousue, hallucinée, désabusée reflète cependant aussi la mode de l’époque : Bukowski passe à la télévision chez Pivot, Coluche joue « Tchao Pantin » (sur une bande originale de Couture), Beineix met en images la dérive des personnages de Djian. Le plus difficile à apprivoiser reste finalement la voix de Couture, qui se perd déjà dans un chant plaintif et très maniéré, certaines syllabes démesurément accentuées, d’autres mâchées, avalées. Il faut pouvoir passer outre…

Au-delà des clivages musicaux, CharlElie Couture a travaillé, avec des réussites très diverses, plusieurs styles variés. C’est finalement son appropriation du rock sur ces « Poèmes Rock » qui est la plus séduisante ; c’est aussi la preuve que le rock français du début des années 80 peut parfois mériter le détour !

Chroniqueur

Tracklist

  1. La Ballade De Serge K
  2. Oublier
  3. Tu m'as pas dit d'où tu venais
  4. T'En Va Plus T'En Va Pas
  5. Envie De L'Eau
  6. Comme un avion sans aile
  7. L’histoire du loup dans la bergerie
  8. Longtemps Longtemps
  9. Le Chant De La Colline
  10. Comme Si On Y Croyait
  11. Le Fauteuil En Cuir (Combien De Temps)