Après un troisième album remarqué et abouti, Angel Olsen propose une tournée de rab'.
Le concept n’est pas neuf mais a le vent en poupe auprès des artistes qui atteignent un tournant dans leur carrière : sortir un recueil de titres laissés en route ou en retrait. Beach House l’a fait en juin, après avoir soufflé son monde en 2015 en éditant deux albums originaux, Angel Olsen prend le relais en cette fin d’année, un an après la publication de « My Woman », troisième album qui l’avait vue franchir un cap, dans l’ampleur de son songwriting, du spectre musical qu’elle couvrait et en tant que chanteuse. Cependant, dans son cas, la publication de « Phases » semble envoyer un autre message. En effet, « My Woman » tranchait avec les albums précédents d’Angel Olsen dans la mesure où ce disque la voyait briser l’armure d’une inhibition et d’une économie de moyens dont, en dépit du talent qu’on lui prêtait, peu l’imaginaient s’échapper. Or, « Phases » est justement composé de douze morceaux sur lesquels Angel Olsen est principalement, pour ne pas dire exclusivement, armée de sa voix et de sa guitare, comme si elle souhaitait nous faire comprendre que, même si elle s’est « émancipée » sur son troisième album, elle n’en reste pas moins la jeune femme sensible que nous connaissions.
A vrai dire, on en doutait guère, mais un rappel n’est jamais inutile. Et si « Phases » n’atteint pas les sommets, ou plutôt la cohérence de « My Woman », ce qui est d’ailleurs logique étant donné la nature du projet, ce disque n’en démontre pas moins qu’Angel Olsen est définitivement entrée dans le cénacle des artistes du moment qu’il faut absolument suivre. Sur les morceaux les plus dépouillés, elle se lance en effet dans des numéros de chanteuse époustouflants, en allant puiser dans des ressources une fois encore insoupçonnées sur California, en adoptant une diction délicate et touchante sur Sans, en s’abandonnant sans restrictions à un lyrisme très à propos sur Fly On Your Wall. Sur les titres les plus aboutis, les plus ambitieux, pourrait-on dire, même si dans l’exécution on reste dans la simplicité, ce qui prouve au passage que quand une chanson est parfaitement écrite, elle se suffit à elle-même, Angel Olsen livre encore une fois de véritables morceaux de bravoure. Au tableau d’honneur, on mentionnera Fly On Your Wall, encore une fois, pour son côté élégiaque, Special parce que le titre démontre la capacité rare d’Angel Olsen pour maîtriser les formats plus longs, avec pourtant une base d’accords et une phrase musicale réduites à l’essentiel, Sweet Dreams parce que le morceau déborde d’intensité et n’est pas sans rappeler les meilleurs moments d’un Chris Isaak (si, si) avec une touche de fragilité et de raffinement supplémentaires. « Phases » tombe donc à point nommé pour nous rappeler qu’Angel Olsen n’est pas prête à tomber dans l’écueil de la « maturité » qui fait trop vite basculer un artiste vers un polissage trop marqué tout en nous confirmant qu’il va falloir compter avec elle dans les années à venir. Il y a de quoi s’en réjouir.
- Publication 1 679 vues1 décembre 2017
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Tracklist
- Fly On Your Wall
- Special
- Only With You
- All Right Now
- Sans
- Sweet Dreams
- California
- Tougher Than the Rest
- For You
- How Many Disasters
- May as Well
- Endless Road