"> Earthling - Radar - Indiepoprock

Radar


Un album de sorti en chez .

7

Le premier album des Anglais d'Earthling : une pépite méconnue de l'époque trip-hop...

C’est la dure loi de la musique : il y a définitivement des années où il vaudrait mieux s’abstenir de sortir un disque. 1995 était de celles-là : la fin de l’année 1994 avait vu paraître le premier album de Jeff Buckley ainsi que les magistraux « Protection » de Massive Attack et « Dummy » de Portishead. Ces deux derniers disques allaient compter parmi les oeuvres principales d’un genre, le trip-hop, qui allait monopoliser l’attention plusieurs années durant. Tricky vint peu après apporter sa pierre à l’édifice naissant avec le stupéfiant « Maxinquaye » ; autant dire qu’entre ces figures écrasantes il était quasiment impossible de se faire une petite place au soleil de Bristol.

Il est à la fois normal et injuste que l’album d’Earthling ait été affilié à ce courant naissant. Normal car effectivement le son de « Radar » présente toutes les caractéristiques les plus saillantes du trip-hop : tempo alangui, rythmes sourds et samples dépressifs, l’habillage sonore est indéniablement dans la lignée de ses illustres prédécesseurs. La présence sur certains titres de Geoff Barrow, l’orfèvre du son de Portishead, n’y est certainement pas étrangère.

Ainsi, l’auditeur pressé et inattentif aura donc eu tôt fait de classer Earthling dans l’infamante catégorie des vils suceurs de roue. Pourtant quelques écoutes suffisent à dissiper le malentendu. Par bien des côtés, c’est bien plus de hip-hop que de trip-hop qu’il s’agit ici. L’absence quasi-totale de voix féminines (contrairement d’ailleurs à ce que l’on peut constater chez Massive Attack, ce sont les morceaux les plus mineurs qui échoient aux femmes…) laisse le champ libre au rappeur Mau, qui apparait sur presque tous les titres. Et si Mau adopte parfois un flow lent et étouffé, se rapprochant ainsi d’un rap maladif et torturé dans la plus pure lignée Massive Attack / Tricky, sa voix se fait bien plus déclamative sur la plupart des morceaux. 1st Transmission et Nefisa, ainsi, comptent parmi les premiers titres majeurs d’un hip-hop britannique jusqu’ici quasiment inexistant. En contrepoint de la voix de Mau, le DJ T-Saul tisse un arrière-plan à la fois sobre et riche, jouant sur la mise en valeur en alternance d’une boucle mélodique et de la ligne de basse qui structure le morceau. Tout en restant à la limite de l’austérité, T-Saul parvient à rendre passionnants de bout en bout ces deux morceaux de plus de six minutes, grâce à ces subtiles variations qui soutiennent les changements d’intonations et de rythme de Mau.

Beaucoup de samples jazzy offrent un écrin assez doux aux diverses chansons, volutes cotonneuses qui contrastent avec la noirceur de certains textes (notamment sur Planet Of The Apes ou Ananda’s Theme). Le son se fait occasionnellement beaucoup plus martial, sur l’efficace Soup or No Soup ou encore sur Freak, Freak, mais l’album reste toujours dans un tempo assez lent. Quelques morceaux témoignent d’une volonté d’élargir le champ musical couvert par le groupe : Echo On My Mind, notamment, présente un refrain aux chants lorgnant vers la soul, impression que vient encore renforcer la présence de cuivres. Ailleurs, par contre, des boucles de Geoff Barrow viennent comme un cheveu sur la soupe, ce dernier se contentant d’utiliser des sons très proches de ce que l’on peut entendre chez Portishead justement.

Je n’irai pas jusqu’à prétendre que « Radar » mérite un déluge de superlatifs ; contrairement, par exemple, à l’insurpassable « Londinium » d’Archive, il présente trop de moments creux pour s’élever au rang des grand albums méconnus de son époque. Il s’agit, en revanche, d’un excellent premier album, d’un des rares disques de hip-hop anglais à présenter une personnalité assez forte pour se différencier radicalement des standards américains du genre.

Chroniqueur

Tracklist

  1. 1st Transmission
  2. Ananada's Theme
  3. Nefisa
  4. I Still Love Albert Einstein
  5. Accident at Injured Strings
  6. Soup or No Soup
  7. God's Interlude
  8. Echo on My Mind
  9. Infinite M
  10. Planet of the Apes
  11. By Means of Beams
  12. Freak Freak
  13. I Could Just Die

La disco de Earthling

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